CHAPITRE VII
MALGRE LE BEL ETE…
1960
A partir de cette époque, notre ardeur
professionnelle s’engourdit.. Mes parents, conquis par les passages Répétés des
Saulieu et de ceux de leurs amis qu’ils nous avaient fait connaître, me
facilitèrent désormais les
séjours à Paris
L’entrée
de la Télévision dans notre existence
enroba nos problèmes dans une pellicule anesthésiante.
De cette période, ne me reste qu’un souvenir flou
et sans arrête ;-sur le plan agricole au moins….J’étais
désormais presque
entièrement absorber par mes nouvelles relations mondaines et par la vie
parisienne
qui s’ouvrait de nouveau devant moi. Il allait en
être ainsi jusqu’à l’été 1963.
Pendant ce
temps, la ferme marcha comme elle put.
Mon Père, bien que sous surveillance médicale
faisait l’aller-retour dans la journée.
Quant à ma Mère, en Janvier elle se plaignit de
maux d’estomac. La Doctoresse Faine demanda des
Radios. On découvrit un gros intestin replié sur
lui-même. Il avait l’aspect d’un amoncellement de Strates
entassées comme une pile d’assiettes. Notre amie
pressentie la situation :c’était sans doute la rançon de
tout ce qui nous préoccupait, ma Mère et moi,
depuis dix huit mois. Elle conseilla donc une diversion :un
séjour à l’étranger peut-être…dans une petite ville
d’Italie, Sienne, Pise, Florence…Mon Père devina la
peine qu’elle aurait à visiter seule quelque ville
que ce soit. Il plaida donc pour son maintien en France
et plus particulièrement à La Glazière ;
souhaitant que son esprit trouvât là un aliment intellectuel en
rapport avec ses possibilités. En échange, il
promettait de lui lasser une solitude apaisante ; il
s’installerait avec moi à Paris et ne viendrait
inspecter la ferme que trois fois par semaine.
Nous
vécûmes donc entre hommes, mon Père et moi, pendant tout un trimestre. Nous
avons le
chien : (Grisby,) il fallait promener la pauvre bête. Mon Père s’en fit un devoir
et un joie : ils partaient pour de longs trajets. Mais des deux, lequel
promenait l’autre ?…
Quant à moi je restait seul bien souvent. Régina
devait chaque jours au chevet de son homme. . Et par
Mesure de sécurité mon Père emportait avec lui la
clef de l’appartement qui restait habituellement sur
La porte… C’était là une arme à double tranchant.
Cette
solitude alarma la famille
D>eux ou trois fois, ma Mère demanda à
interrompre sa cure de solitude et de silence et vint passer
vingt-quatre heures avec ses hommes. Sinon, nous
allions comme convenu lui rendre visite dans sa
campagne. Celle-ci lui devenait de plus en plus
chère.
Pendant sa retraite briarde, elle eut l’occasion de
dire à Chauvaut, notre maître de culture ce qu’elle
comptait faire de la ferme et de moi. A la suite de
cet entretien, Chauvaut manifesta encore plus
d’attachement à mon égard. Fut-ce heureux ou
malheureux ? En effet de multiples évènements
allaient se charger de ramener la chère utopiste à
une plus juste vue des choses. 1960, fut pour
une année charnière. Ce fut pour moi la dernière de
vraie tranquillité.
Les deux
célibataires que nous étions, revinrent pour l’été à La Glazière afin
d’assister à la moisson.
Elle fut honnête, me semble-t-il.* Elle fut coupée
et rentrée de nouveaux moyens mécaniques qui venaient
d’entrer à la ferme : deux nouvelles remorques
et une moissonneuse-batteuse.(Un dernier tracteur devait
être acquis plus tard, mais j’eus peu l’occasion de
le voir fonctionner.) Ce devait être le dernier matériel que j’ai vu utiliser
par le personnel de mon Père.
* Heureusement effectué grâce à l’aide de Monsieur Poisson agriculteur à Moisenay. (Août 1960)
Dans l’auto qui nous amenait, mon Père et moi en Seine-et-Marne,
il y avait aussi Dominique Brisset, le
frère de Jean-Claude qui m’avait introduit au
Concile de Brétigny. Il précédait auprès de nous un jeune
Anglais qu’on nous avait promis dès le moi de juin :
Sir Simon Harvay
Ce jeune homme qui avait alors 19 ans, était fils de l’amie intime
de Peggy Aubé ;
elle-même faisait partie du groupe présenté par les
Saulieu. Simon devait rester jusqu’aux
derniers jours de
septembre. Il voulait entrer au Foreign Office et
ambitionnait de représenter sa Gracieuse Majesté auprès de
notre sacrée République que malgré tout il aimait…
C’est dire combien notre été fut marqué d’Entente Cordiale.
son amitié ne ce relâcha jamais et nous procura
même de nouvelles relations parmi ses camarades.
Je dirai plus tard ce qu’il est devenu . Pour
le moment ce n’était qu’un garçon costaud, portant lunette
d’écaille, imberbe et parlant un français déjà
parfait. Et ceci ne gâte rien. Il était je crois d’origine alsacienne
et s’entendit également bien avec ma Mère à
laquelle il demandait des rudiments d’allemand, langue dans
laquelle il voulait se perfectionner aussi.
Son premier
acte de compagnonnage fut de participer au chantier de construction ouvert par
Monsieur le
curé Bernard Marteau. Il voulait ériger un
Sanctuaire à Notre-Dame du Pain. Ce chantier était situé si je ne
me trompe à Blandy-les-Tours, cure nominative de l’Abbé Marteau. Il va de soit
que Simon, Dominique
et moi, n’étions pas les seules à nous intéresser à
ce chantier. Il y avait un groupe de « Compagnons
Bâtisseurs » (ici des Belges) qui assuraient
le travaille quotidien de construction. Il s’agissait de leur
donner un coup de mains quand il y avait surcharge.
Notamment, il s’agissait dans le cas présent de
décoffrer les premières fondations. Etant donné le
caractère particulier de ce chantier confessionnel
et pour ne pas heurter les convictions de l’ami
Anglais que nous ne connaissions que depuis,
peu nous
nous ne l’y entraînâmes qu’une seule fois.
L’arrangement qui avait amener Simon à La Glazière datait de la
mi-juin. Il aurait donc été trop tard
pour décommander les autres projets qui auraient pu
être formés (à supposer que les bonnes volontés
ne se manifestaient qu’après les examens scolaires
ou universitaires). En fait, mon escortes estivale
fut doublée. Simon n’eut je crois, qu’à s’en féliciter autant que moi.
Les
ballades furent autorisées ;-et recommander. Ma Grand ‘ Mère recevant en
septembre, ceux de ses
Petits-enfants qui étaient disponibles, demanda à
mon Père une exactitude plus scrupuleuse, il était bien
Incapable de la promettre !
-« Ma Mère lui dit-il, puisque vous voilà
entourée, j’ai envie de prendre quelques vacances, la moisson étant
terminée ».
C’est ainsi que la 403 après avoir transporté des
sacs de blé, transporta cette fois une vraie famille.
Avec chiens et bagages, nous nous embarquâmes pour
les demeures ancestrales du centre de
la
France. Je me souviens d’une halte à Chinon. Nous
voulions montrer à Simon, épris d’européanisme
Un des principaux foyer de résistance à l’occupant
d’autrefois .
Ce n’était pas du meilleur goût, mais il sut faire
preuve d’humour,--en vrai amoureux de l’Histoire.
L’Ecluse
et La Chaise, propriété des L’Estoille
,nous ouvrirent chambre et parc .L’Ecluse fut
témoin de l’Histoire. Le château servit de
cadre au Maréchal Pétain pour définir sa Charte du
Travaille.
Du
bourbonnais, nous plongeâmes plus bas encore pour montrer Davayat à notre
nouvel ami
on lui montra une cache dans un mur et on lui
expliqua qu’elle servit naturellement de refuge à un
Prêtre réfractaire.
Après un
certain concoure hippique organiser dans le parc de Davayat , il fallut
songer au trajet
De retour vers notre piquet de pénitence. Pour en
l’amertume, ma Mère demanda à Madame
Sommier la permission de faire visiter à Simon le
château de Vaux-le-Vicomte. En grande
dame, elle voulut guider elle-même notre parcours.
Cela se termina par un thé très britannique
dégusté à
l’endroit même où la Princesse Elisabeth d’Angleterre avait pris le sien ;
quelque
vingt ans auparavant. Ce qui produisit une grosse
impression sur notre Travailliste…
A cette
collation d’octobre 1960, participaient Madame Sommier, ma Mère et trois
garçons
d’âge divers. S’y trouvait aussi le Baron de
Barantes, oncle de la maîtresse de maison. On se
mit à parler du futur mariage royal belge, qui
occupait les plumitifs. Monsieur de Barantes eut
ce commentaire : « Je trouve la
future Reine des Belges un peu courte sur pattes ». Dernier
grand rire (discret) de cet été.
Il faut ajouter que l’invitation estivale de
l’Oncle François de l’Estoille,
terminait pour deux de
ses filles l’épreuve d’une pénible année de pension
parisienne.
Pour
des raisons de commodités familiales, Oncle François, un cousin de mon Père,
souhaitait
voir ses enfants clore leurs études secondaires
dans la capitale. Aussi nous avait-il demander d’ouvrir
notre appartement à deux de ses filles, Elisabeth
et Clare, afin de voir si son projet
était raisonnable.
Par malheur, la place nous manquait pour les loger
au 3eme. Ma Mère sollicita donc de Grand ‘Mère
une chambre à son étage pour les recevoir toutes
deux.(On leur donna la chambre de garçons des
deux oncles : dite chambre Louis-Philippe). Il
était entendu que nous les prendrions pour chacun des
dînés qu’elle voudraient bien nous consacrer. (Ses demoiselles déjeunant habituellement au
collège
ou au Restaurant Universitaire).
Elisabeth et Claire arrivèrent pour la rentrée
d’Octobre 1959. Et je les vis avec plaisir s’installer à
notre table. Elle furent soumises à ma tyrannique
Télévision1. Ces jeunes filles restèrent nos hôtes
durant tout l’Hiver scolaire. Elles nous furent
d’un bon et charmant secours lorsque sa santé éloigna
ma Mère de Paris.
Vers le mois de mai, Elisabeth m’annonça que son
Père avait acheter un appartement rue Treilhard
ce qui les plaçait très près de nous, et vice
versa.
Après ce nécessaire retour sur le passé, il ne me reste plus qu’à tirer
la leçon de 1960.
Sur le
plan personnel, cette année m’avait permis de reprendre souffle.(Avant les
dernières
Batailles, qui seront les plus dures).
Ce chapitre
s’intitule « Malgré le bel été… »-La
conclusion devrait être : « La
Décision demeure toujours la même »
chaque conversations avec ma
Mère sur le sujet se terminait par la même
constations :
« De toute façon, il faut attendre
La fin du bail. Mais il faudra arrêter un jour ou l’autre. Cela est trop fatiguant
pour votre Papa».
A cette conclusion général de chapitre (écrite
en même temps que la première rédaction),
j’en ajouterais volontiers une autre.
¨Pour
moi Il ne fait aucun doute que ma Mère
profita de la cure thérapeutique, ordonnée par la Doctoresse
Faine, pour structurer, fortifier et rendre
inattaquable
sa passion
pour cette propriété de campagne :Elle la protégera mieux désormais
Des ennuies et soucis de toutes natures que ma Mère
savait ne pouvoir éviter à Paris.
Dernier moments d'insouciences suivez-moi encore