Le Morvan s'annonce comme une croupe à peine accentuée
en saillie, mais qui contraste par son uniformité, sa
tonalité sombre avec le pays calcaire. Lentement il
s’élève vers le sud, d’où seulement, vu du bassin
d’Autun, il présente l’aspect d’une chaîne.
Le pays dont les différences s'accusent ainsi est bien
une de ces contrées à part qui, pour le cultivateur ou
vigneron des " terres plaines ", éveillent l'idée d'une
vie ingrate, et dont les usages, les cultures, les
patois constituent pour lui un monde étranger.
Ce n’est pas que le Morvan soit considérable par sa
hauteur ni par son étendue ; mais, fragment mis à nu du
massif primaire, il oppose aux belles cultures des
plaines qui l’avoisinent la pauvreté d’un sol siliceux,
privé d’éléments fertilisants, moins propre aux moissons
et à l’engraissement du bétail qu’aux arbres et aux
landes, aux genêts à balai, aux grandes digitales, aux
taillis de hêtres et de chênes.
Ce n’est pas ici l’aspérité des pics qui rebute la
circulation : le Morvan, arasé depuis les âges les plus
anciens, quoique temporairement envahi dans la suite par
diverses transgressions marines, n’a plus que le socle
de ses anciennes cimes ; il ne présente guère à la
surface que des croupes d’un modelé large et d’apparence
parfois presque horizontale.
Les grandes routes, à l’exemple des voies romaines,
n’ont pas eu de peine à s'établir sur la convexité des
parties hautes. Mais ce qui manque, c’est la chose dont
dépend vraiment la physionomie d’un pays, car elle règle
le mode d’habitation et les relations quotidiennes : la
circulation de détail.
Entre ces croupes il n' y a que des ravins ou des
vallées trop étroites ; une infinité de petites sources
imbibent les vallons et les creux, y suintent en vernis
ou marais semés d’aulnes et de joncs, noient les
prairies, creusent d’ornières profondes les sentiers
raboteux, multiplient des ruisseaux qu’on ne pouvait
jadis traverser que sur des troncs équarris ou des
pierres disposées au travers.
C'est ce qui a tenu isolés ces petites fermes ou ces
hameaux entre leurs sentiers couverts, leurs ouches ou
petits terrains de culture aux abords des maisons, leurs
haies d'arbres et leurs ruisseaux. Ce
n’est pas ici l’aspérité des pics qui rebute la
circulation : le Morvan, arasé depuis les âges les plus
anciens, quoique temporairement envahi dans la suite par
diverses transgressions marines, n’a plus que le socle de
ses anciennes cimes ; il ne présente guère à la surface
que des croupes d’un modelé large et d’apparence parfois
presque horizontale. |