N° 486
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 18 décembre 2002.

PROPOSITION DE LOI

tendant à compléter le code électoral en vue de la reconnaissance du vote blanc comme suffrage exprimé et instaurant le vote obligatoire pour tous les électeurs.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République...)

PRÉSENTÉE
par M. Dominique PAILLÉ,
Député.

Elections et référendums.
EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La démocratie repose sur l'exercice du libre choix des citoyens pour élire leurs responsables politiques. Ce droit de choisir s'exprime à travers le droit de vote, droit essentiel de l'individu en tant que détenteur d'une fraction de la souveraineté nationale. Ce principe constitutionnel a été consacré il y a plus de deux siècles dans la Constitution du 24 juin 1793. Mais il fallut attendre le 23 avril 1848 pour que soit instauré le suffrage universel.
Depuis plusieurs années, à chaque scrutin, il apparaît que le nombre des abstentionnistes ne cesse de croître. Les citoyens n'exercent plus ce droit fondamental. Ils ne remplissent plus le devoir civique qui leur incombe 63,1 % d'abstention lors du référendum sur la Nouvelle-Calédonie en 1988, plus de 30 à chaque élection législative depuis cette même année, 53,25 % aux élections européennes de juin 1999 et 69,3 % au référendum du 24 septembre 2000 relatif au quinquennat.
En outre, aux élections présidentielles de 1995 et de 2002, le vote blanc et nul approche les deux millions de suffrages. A l'élection législative de 1997, au second tour il atteint le record de 6,32 %. A celle de juin 2002, il a été de 4,33 %. Enfin aux élections européennes de 1999, les votes blancs se situent toujours à un niveau très élevé : 5,93 % des votants et 2,8 % des inscrits.
A cette manifestation de désintérêt évident pour la chose publique, d'hostilité très forte à l'encontre des femmes et des hommes politiques et d'indifférence à l'égard de la vie démocratique s'ajoute la montée des attitudes contestataires. Car quand nos concitoyens décident de voter ils ne trouvent plus d'autre voie que celle du vote extrémiste pour exprimer leur mécontentement face aux choix proposés.
Ce double phénomène met gravement en péril la démocratie tout entière car il amène à douter de la légitimité des élus. Voter est non seulement un droit mais un devoir civique. La loi a pour obligation de permettre à chacun d'exprimer son choix. Or, certaines règles qui régissent le droit de vote sont aujourd'hui inadaptées. Deux peuvent être citées. La première est inscrite dans l'article 30 du décret du 2 février 1852, reprise dans la loi du 29 juillet 1913 devenue l'article L. 66 du code électoral. Elle reconnaît l'existence du vote blanc sans pour autant lui donner une quelconque valeur juridique. Il ne se distingue pas en ce sens ni du vote nul, ni de l'abstention. La seconde porte sur l'absence de reconnaissance du vote obligatoire.
Le vote blanc est le fait pour un électeur d'accomplir son devoir civique en participant au scrutin mais de refuser d'opérer un choix entre les options qui lui sont proposées ou les candidats en lice. Soit parce qu'il n'a pas d'opinion définitivement arrêtée sur la question posée, soit parce qu'il désire exprimer son insatisfaction face aux alternatives qui lui sont soumises. Le vote blanc est donc un acte positif qui apparaît comme un mode normal d'expression. En ce sens, l'électeur qui vote blanc n'est pas un abstentionniste car il fait l'effort de se déplacer aux urnes. Mais en l'absence de valeur juridique, il ne voit pas son geste pris en considération.

(...)

PROPOSITION DE LOI

Article 1er
Après l'article L. 2 du code électoral, il est inséré un article L. 3 ainsi rédigé :
«Art. L. 3. - Le vote est obligatoire pour tous les Français répondant aux conditions visées à l'article L. 2 du présent code.
«Tout électeur qui n'aura pas pris part aux opérations électorales tendant à l'élection du Président de la République, des députés, conseillers municipaux, régionaux ou généraux, des représentants au Parlement européen ou aux différentes consultations par voie de référendum sans motif reconnu trois fois dans un délai de cinq ans est radié des listes électorales pour une période de cinq années.»

Article 2

Après le premier alinéa de l'article L. 58 du code électoral, il est inséré un alinéa ainsi rédigé
«Sur cette même table, le maire met à la disposition des électeurs des bulletins blancs de format identique aux bulletins des candidats pendant toute la durée du scrutin.»

Article 3

L'article L. 65 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
«Les bulletins blancs sont décomptés distinctement et entrent en compte pour la détermination des suffrages exprimés.»

(...)

486 - Proposition de loi de M. Dominique Paillé sur la reconnaissance du vote blanc comme suffrage exprimé
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