Ecole communale de garçons.
Cours Complémentaire d'Enseignement Primaire Supérieur
18, rue du Moulin des Prés. Paris 13°
Cette école recevait des élèves depuis le Cours
préparatoire (CP) 6ans, jusqu'au cours complémentaire (Ccre
Ière et 2nde année) Cours) supérieur; (CS Ière
et 2nd année) 14 à 16 ans
Le registre, tenu sous la responsabilité du directeur, servait
à l'inscription des élèves lors de leur entrée
dans l'établissement. Le registre couvre la période allant
de novembre 1935 à Octobre 1940. Les élèves y sont
inscrits chronologiquement
On y trouve donc :
=====un numéro d'ordre ( ici de 3869 novembre 1935 à 4878
automne 1940)
Puis des informations sur l'état civil de l'enfant :
=====Nom
=====Prénom
=====Date et lieu de naissance
=====Profession des parents
=====Domicile
=====Nationalité
Puis des informations sur la scolarité
=====Ecole d'où vient l'enfant
=====Date d'entrée à l'école Moulin des Prés
=====Cours et classe dans lequel l'enfant est placé lors de son entrée
à Moulin (CP, CE1, CE2, CM1, CM2, Ccre 1, Ccre 2, CS 1, CS 2)
=====Date de la sortie définitive de Moulin
=====Cours et classe auquel l'enfant appartenait à sa sortie de Moulin
=====Observations sur son comportement, ses résultats scolaires,
les diplômes obtenus
(Certificat d'études (CEP), Certificat de fin d'études complémentaires,
Brevet élémentaire (B.E.)etc) et l'établissement dans
lequel l'enfant est admis à poursuivre ses études ou l'emploi
éventuellemen,t trouvé ou toutes informations connues au moment
de son départ de l'école.
La recherche à entreprendre:
Etablir une liste d'enfants présents pendant l'occupation allemande
et qui sont inscrits « sortis » avant la libération de
Paris fin août 1944 et dont les motifs de la sortie n'apparaissent
pas clairement. Puis rechercher si ces noms figurent sur les listes connues
de déportés.
L'objectif est donc de sélectionner avec soin les élèves
sur lesquels l'enquête doit porter, car l'ensemble des élèves
sortis pendant l'occupation est trop grand, et nulle part il n'est fait
mention d'une arrestation dans le registre. Ce sont donc les deux dernières
colonnes les plus importantes. Les dates mentionnées sont à
confronter avec les périodes d'arrestations de juifs dont les plus
importantes sont indiquées dans la chronologie ci-dessous, et surtout
celle de juillet 1942 la rafle dite du « Vel' d'hiv' ». Un départ
en cours d'année scolaire sans précision doit aussi attirer
l'attention.
Autres indications importantes, à croiser avec ce qui précède,
les noms qui semblent d'origine étrangère et la nationalité
éventuellement étrangère de l'enfant.
Quelques dates repères
(source J-P Azéma De Munich à la Libération . Paris
1979)
1O mai ... 24 juin 1940 : invasion allemande et défaite française..
Exode de millions de civils vers le sud. : sur le registre la plupart des
élèves sont marqués dans la colonne observation comme
sortis en 8Bre 40, (c'est à dire en Octobre 1940) ne sont pas revenus
par la suite à l'école. Ils ont certainement fuit avec leurs
parents lors de cet exode fin mai et début juin 1940.
Jusqu'en novembre 1942 la France est divisée en deux zones la zone
occupée (les 2/3 nord et est du pays) et la zone non occupée
dans le restant du pays au sud. A partir de novembre 1942 toute la France
est occupée.
3 octobre 1940 le statut des juifs. (Vichy)
Janvier 1941 projection à Paris du film antisémite allemand
« le Juif Süss »
Mars 1941 Xavier Vallat nommé commissaire général aux
questions juives
14 Mai 1941 arrestation à Paris de juifs étrangers
2 juin deuxième statut des juifs (Vichy)
juin 41 invasion hitlérienne de l'URSS. Les communistes entreprennent
des actions militaires contre les occupants === > été 1941
début de l'exécution d'otages en représailles par les
Allemands (une centaine dès octobre 41 dont les 28 de Châteaubriant)
Septembre 1941 exposition à Paris au palais Berlitz prés de
l'Opéra de l'exposition « le juif et la France ». 12 décembre 1941 arrestation à Paris de 750 personnalités
juives de nationalité française.
27 mars 1942 départ du premier convoi de « déportés
raciaux » mai 1942 Darquier de Pellepoix nommé commissaire général
aux questions juives
29 mars obligation pour les juifs de zone occupée de porter l'étoile
jaune 16-17 juillet 1942 la rafle du « Vel' d'hiv' » août1942 des juifs étrangers de zone sud sont livrés
aux nazis
11 novembre 1942 invasion allemande de la zone sud
15 août 1944 derniers convois de déportés juifs ou
résistants
19- 25 août soulèvement et libération de Paris
Documents
Souvenirs d'un déporté de la rafle du Vel' d'Hiv' (16
juillet 1942)
"Le 16 juillet, à l'aube, l'opération est déclenchée
: la police parisienne arrête, dans tous les quartiers de Paris et
dans sa banlieue, près de treize mille Juifs étrangers et,
pour la première fois, des familles entières avec des enfants
à partir de l'âge de deux ans. L'énorme agglomération
parisienne est le théâtre d'une sauvage "chasse au Juif"
: dans tous les quartiers en même temps, on arrête hommes, femmes
et enfants, on enfonce les portes, on emporte les enfants fiévreux,
on fait des descentes dans les écoles. (...) les familles sont enfermées
au vélodrome d'Hiver, en pleine ville.
Rien n'était préparé pour les accueillir : plus de
quatre mille jeunes enfants et deux mille adolescents et adultes étaient
parqués dans les gradins sans aucun moyen de couchage, presque sans
nourriture, sévèrement rationnés en eau, avec des toilettes
rapidement et irrémédiablement bouchées, avec un service
médical réduit à quelques infirmières de la
Croix-Rouge.
Tous ces malheureux ont vécu cinq jours épouvantables dans
l'énorme enceinte remplie d'un vacarme assourdissant fait des cris
et des pleurs des enfants et des adultes à bout de nerfs, des hurlements
et des râles de quelques personnes devenues folles ou de malades et
de blessés après des tentatives de suicide."
Georges Weller, "L'Étoile jaune à l'heure de Vichy",
Fayard, 1973, pp.83-84. Repris dans Dominique Veillon , "La Collaboration,
Textes et Débats" , Le livre de poche (n 5002) Paris, 1984.
Indignation des résistants après la rafle du 16 juillet
1942
"Quelle honte ! Et quel avertissement pour ceux qui croyaient qu'on
ne verrait pas "ça" chez nous. Nous y sommes ! en pleine
terreur, en pleine bestialité hitlérienne.
Le 16 juillet, les bêtes fauves de la S.S., les apaches des Sections
d'assaut qui règnent sur notre Paris ordonnent à la Police
française, à la Garde mobile, aux Inspecteurs, d'arrêter
tous les Israélites étrangers de Paris. (...)
Les policiers français, contraints d'obéir, sont écoeurés
par la besogne infâme. Certains refusent ; 400 arrestations parmi
eux. Quant à la population parisienne, elle est admirable de solidarité
agissante ; oncache les traqués, on recueille les enfants, on maudit
publiquement les bandits nazis. Paris n'en peut plus de cette honte. Paris
se prépare à la lutte pour retrouver son vrai visage (...)
Français ! Prenez-y garde ! Ne vous imaginez plus désormais
que les brutes hitlériennes vous traiteront mieux que les Polonais
et les Tchèques martyrs !
Qu'on ne s'y trompe pas : pour les Allemands, nous Français, nous
sommes des esclaves "étrangers" vis-à-vis du peuple
maître, seul digne de vivre. Hitler prendra nos hommes, nos femmes
et nos enfants, comme il le fait avec les autres peuples et avec les Juifs.
Ne croyez pas, Français, qu'on nous ménagera plus que les
autres (...).
Ce qui s'est passé à Paris le 16 juillet, cette honte dont
tout homme rougit, c'est un avertissement pour nous tous.
C'est avec une joie sadique, dans des buts bien déterminés
que les nazis traitent ainsi Paris. Accepter, quand on est Français,
de telles infamies, c'est pire que d'être vaincu.
Français de la zone non-occupée ! gare à vous ! La
terreur hitlérienne approche, Français de tous les milieux,
de toutes les classes, de toutes les religions ; quand Hitler frappe, tue,
torture en France, c'est vous qu'il vise, tôt ou tard.
Révélez les horreurs de Paris ; soyez solidaires de toutes
les victimes ; abritez-les ; cachez-les ; refusez de laisser salir la France,
et luttez avec les mouvements de résistance, contre les bourreaux
nazis, leurs traîtres et leurs chiens couchants.
POUR LA LIBÉRATION QUI VIENT !"
Extrait d'un tract du "Franc-Tireur", août 1942. Dominique
Veillon, "La Collaboration, Textes et Débats", Le livre
de poche (n 5002) Paris, 1984.