
CHAOUABTIS
~
OUSHEBTIS

Selon
l'antique pensée égyptienne, tout être humain,
du pharaon au plus humble des égyptiens, était
contraint d'exercer un travail manuel dans le
Monde des morts, en vue de fournir les moyens de
subsistance requis pour vivre éternellement dans
l'Au-delà. Pour éviter les corvées laborieuses
ordonnées par les dieux de l’Au-delà, les
Égyptiens avaient eux-mêmes recours à des
figurines magiques qui pouvaient prendre leur
place. Ils n’étaient pas seulement des images de
leurs propriétaires, mais incarnaient en même
temps leurs serviteurs. Ce caractère double des
chaouabtis – maître et serviteur dans le même
corps – ne devint pas seulement visible dans
leur forme et leur apparence extérieure, mais
fut également exprimé dans une formule magique
inscrite sur eux.
Ondésigne sous le nom de chaouabtis, ouchebtis,
shabtys ou ushebtys,
les figurines funéraires d’aspect momiforme
connues depuis le Moyen Empire (XIIème dynastie)
et qui furent conçues dans le cadre des
croyances et pratiques funéraires des anciens
égyptiens, comme des éléments essentiels du
mobilier funéraire.
Ils sont passés du statut de simples répliques
du défunt à celui de serviteurs ou esclaves du
propriétaire à partir du Nouvel
Empire

Presque tous les rois thinites se faisaient
enterrer avec leurs serviteurs, probablement
sacrifiés à la mort de leur souverain. Les
monuments funéraires des monarques thinites que
l’on trouve à Abydos et Saqqarah montrent
généralement autour de la tombe royale, une
série de chambres sépulcrales, destinées à
abriter les corps des serviteurs royaux.
Durant l’Ancien Empire, on conserva la
coutume selon laquelle les fonctionnaires du
rang le plus élevé à la cour se faisaient
enterrer dans des quartiers de mastabas
construits dans ce but autour des pyramides.
Dans les chambres funéraires des tombes des
nobles sous les IVème et Vème dynasties, on
déposait des sculptures qui les montraient sous
l’aspect qu’ils devaient avoir eu pendant leur
vie terrestre. Ces statues représentaient le
propriétaire et en même temps, une sorte de
substitut qui effectuait les travaux nécessaires
pour obtenir l’alimentation et la boisson dans
l’au-delà.
Le lieu du jugement et celui de la résidence du
défunt devenu esprit glorieux dans le ‘Champ
des roseaux’, autrefois région solaire devinrent
une zone d’influence osirienne, même s’il faut
admettre que la vie dans ces paradis n’était
possible que par la grâce de Rê
Ainsi à travers cette évolution des idées
funéraires, est apparue les « Champs d’ Ialou »
comme royaume d’Osiris où les esprits des
justifiés jouissent d’une vie douce pour
l’éternité.
Pour essayer de pallier à ces différentes
servitudes, et d’aider le défunt à accomplir ces
tâches pesantes, on a commencé à inclure dans
les ‘Textes des Sarcophages’ des formules pour
qu’il puisse échapper à certaines contraintes
grâce à des substituts, images de bois qui
seraient son double dans l’au-delà.
Le but principale de ces statues, étaient de
remplacer leur propriétaire dans les travaux
agricoles qu’il devait réaliser dans l’au-delà
pour produire de la nourriture. Par le moyen de
ces figurines, le propriétaire pouvait garantir
que lui-même, sa famille et ceux qui l’avaient
servi sur terre, seraient exemptés, par
substitution, des travaux agricoles qu’il
fallait obligatoirement accomplir dans le
royaume d’Osiris.
Extrait des Textes des Sarcophages, N remplace
le nom du défunt :
“Paroles dites par le N justifié : Oh toi,
ushebty qui as été fait pour N, si N est appelé
pour accomplir ses tâches ou si une corvée est
imposée à N comme à n’importe quel homme dans
son travail, tu diras je suis là! Si N est
appelé pour surveiller ceux qui travaillent,
revenant dans les champs nouveaux pour retourner
la Terre ou pour transporter en bateau le sable
de l’Orient à L’Occident , diras je suis là!
Moi N justifié”
Au début du Nouvel Empire, de même qu’au temps
de la XVIIème dynastie et des Hyksos, on
fabriquait encore les dénommés « ushebtys-bâtons » .
C’étaient des figurines funéraires en bois, avec
des inscriptions en hiératique à l’encre. A
cette époque, ces pièces du mobilier funéraire
étaient devenues normales et habituelles, à la
différence du Moyen Empire où leur présence
n’était ni une obligation, ni constante

A partir de ce moment, les ushebtys se
perfectionnèrent lentement, finissant par
constituer d’authentiques portraits du défunt.
La raison principale pour laquelle on
déposait ces statues dans des cachettes des
sables du désert ou dans les sanctuaires, était
la nécessité de trouver des aliments et des
provisions dans l’au-delà; il s’agissait de
pouvoir agir dans les lieux où l’on pensait
pouvoir accéder facilement aux Maîtres de
l’Eternité, ceux qui prenaient les décisions
pour pourvoir du nécessaire les kaou des défunts
justifiés. Les principaux lieux sacrés, sièges
des tribunaux défunts sous le Nouvel Empire
étaient localisés à Abydos, Busiris, Buto,
Heliopolis, Letopolis.
Le temple d’Osiris à Abydos, lieu de
l’enterrement mythique d’Osiris est la zone où
l’on a retrouvé le plus de cachettes pourvues
d'ushebtys. On y a construit de nombreux
cénotaphes et depuis le Moyen Empire, on y a
déposé une grande quantité de stèles et de
statuettes avec la formule du ushebty
Durant cette période du Nouvel Empire,
l’habitude était de recouvrir les ushebtys
d’un texte, même si l’on en produisit de grandes
quantités sans inscriptions. Parmi les
inscriptions les plus fréquentes, on trouve le
chapitre VI du Livre des Morts, connu aussi
comme « le chapitre des ushebtys ».

Durant la période amarnienne, les croyances
osiriennes diminuèrent fortement, au moins à
Akhetaton. Pourtant, l’on continua à fabriquer
des ushebtys qui portaient simplement ce type
d’inscription :
Puisses-tu respirer les
souffles doux du vent du nord qui viennent du
ciel sous la main du disque vivant! Vivification
par les rayons du disque, Santé du corps sans
cesse renouvelée, Capacité de sortir de la tombe
à la lumière du jour en compagnie du Dieu
Solaire et ravitaillement de la tombe !”.
A l’époque du Moyen Empire, le défunt était
pourvu d’une seule statuette, mais à partir du
Nouvel Empire, principalement dans les
funérailles royales, le nombre d’exemplaire ne
cessa d’augmenter, pour arriver, à partir de la
Troisième Période Intermédiaire et dans le
mobilier funéraire de simples particuliers, au
nombre de 365 (un pour chaque jour de l’année),
accompagnés de 36 “Inspecteurs”, ce qui faisait
qu’une équipe d’ushebtys atteignait alors
normalement le nombre de 401 pièces. Plus tard,
on déposa même deux figurines par jour : l’une
pour la journée, l’autre pour la nuit.
A la fin de la XXème dynastie et jusqu’à la
période saïte, (environ 1.080-525 av. J.-C.) la
figure de “l’inspecteur” ou “chef des Dix” sera
fréquente. Il porte habituellement des vêtements
de tous les jours, comme ceux du maître et est
pourvu d’un ou deux fouets
La prédominance d’Amon-Rê seigneur des dieux,
éclipsa à cette époque Osiris dans le monde des
morts. Comme preuve, la découverte des
étiquettes de bois dans des coffres à oushebtys
qui montrent que “l’oracle du dieu de Karnak
s’est tenu et a décrété que les serviteurs
devaient travailler pour le défunt dans l’Au-Delà”.

D’autre part, la religion funéraire avait évolué
à cette époque, de telle sorte que le défunt
devînt lui-même Osiris et fût appelé Iakeby (le
Pleureur)
Les ushebtys étaient ses esclaves et
travaillaient pour lui dans les champs qui lui
avaient été concédés par le dieu Amon-Rê comme
propriété dans l’au-delà
Ces changements aussi radicaux, qui en viennent
à faire d’Amon -Rê le dieu tout puissant qui
concède aussi aux particuliers leurs
transformation en Osiris, ont précipité la
décadence et la mise hors d’usage de ces objets
funéraires à l’époque ptolémaïque

Les Coffres à
ushebtys étaient en forme de sarcophages ou
de naos.
Ils étaient destinés à contenir les figurines
des ushebtys. Au Moyen Empire, quand il n’y
avait qu’une ou deux figures déposées dans les
tombes, elles étaient placées dans des
sarcophages de bois ou de céramique. Une
autre variante existe, dans laquelle les
statuettes étaient debout, adoptant la forme
d’une chapelle qui montrait à l’intérieur
l’image du défunt momiforme, avec ses noms et
ses titres
Ces modèles furent construits de manière
multiple sous la XIXème dynastie et à partir de
la XXIème ; ils furent en forme de sarcophages,
décorés de peintures qui représentaient des
bateaux, allusion au pèlerinage fluvial à Abydos
A l’époque saïte, on soigna davantage
l’élaboration de ces coffres, en leur donnant la
forme des chapelles avec de beaux décors

A partir de la moitié du Nouvel Empire, les
ushebtys
sont généralement accompagnés de houes et de
paniers, instruments pour extraire et
transporter la terre dans les “Champs d’Ialou”.
Ils sont en miniature et faits en bronze, bois
ou faïence
Plus tard, on peignit les outils sur les
figurines et sur l’épaule, un sac ou un panier.
Parfois, on les représente aussi la houe à la
main avec sur l’épaule un filet. Parfois, on
représente aussi des palans avec des récipients
à eau, des moules à briques ou à diverses
amulettes.
A la Basse Epoque, les instruments de travail
sont et le sac ou petit filet. Ces éléments
étaient normalement moulés ou gravés sur la
statuette qui était dotée d’un pilier dorsal. Ce
dernier permettait de donner plus de stabilité à
l’ushebty,
prenant la place de la colonne vertébrale du
défunt, lui permettant de demeurer
éternellement debout.
Les matériaux utilisés étaient très variés
; bois, argile, cire, pierre, bronze, faïence et
pâte de verre étaient les matériaux les plus
courants. La faïence fut l’élément le plus
utilisé surtout à partir de la fin du Nouvel
Empire,
elle consistait en une pâte céramique faite
à partir de quartz granuleux ou de sable auquel
on mélangeait un agent agglutinant comme le
natron.

Les
matériaux utilisés dans la fabrication des
ushebtys les plus pauvres sont ceux de bois,
particulièrement à la XVIIème dynastie et ceux
en terre cuite des ateliers de potier, à partir
de la Troisième Période Intermédiaire
Malgré leur apparence modeste, comparée aux
autres restes archéologiques égyptiens, les
ushebtys constituent un élément très
important pour l’étude de l’évolution religieuse
sociale, politique et économique de l’ancienne
Egypte.

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