À Abou Dhabi

La création du Conseil de coopération du Golfe
a été marquée par des divergences sur la sécurité


Abou Dhabi (correspondance).– Lorsque la création d’un conseil de coopération du Golfe, regroupant l’Arabie Saoudite, le Koweït, Oman, les Émirats arabes unis, le Qatar et Bahreïn, fut annoncée à Ryad le 4 février dernier, trois projets étaient en présence. Celui du Koweït prévoyait un organisme commun de coopération économique. L’Arabie Saoudite insistait sur la sécurité. Oman proposait, de son côté, la création d’une force commune chargée de la protection du détroit d’Ormuz avec l’appui logistique des forces anglo-américaines.


En définitive, le projet retenu, mardi 26 mai, à l’issue des travaux du sommet d’Abou Dhabi et que les souverains du Golfe ont ratifié, est très proche du projet initial du Koweït, tout en incluant les questions de sécurité dans les attributions du conseil de coopération. Pour éviter de se couper des autres pays du Golfe, le sultan Qabous d’Oman a dû se résigner à signer ce document, tout en réaffirmant, lors de la séance de clôture, qu’il faisait de la sécurité du Golfe «la priorité des priorités».


Le communiqué final, pourtant, condamne expressément la présence «de troupes et de bases étrangères dans la région», au moment même où l’île omanaise de Massirah s’apprête à accueillir des militaires américains. À l’évidence, le sommet d’Abou Dhabi représente un demi-échec pour le sultan Qabous. En témoigne l’éloge appuyé de Cheikh Zayet, premier président du Conseil de coopération du Golfe (C.C.G.) pour la «compréhension» dont a fait preuve le souverain omanais.


Certes, ce dernier ne manquera pas de faire valoir qu’il est fondé à ne pas renvoyer les Américains tant que les Soviétiques conserveront une base à Aden. De ce point de vue, chacun est ici conscient que l’arrivée de navires soviétiques à Aden, au moment où prend fin le sommet d’Abou Dhabi, est la réponse inquiète de l’U.R.S.S. à la constitution d’un groupe régional modéré qui risque de contrebalancer l’influence du front de la fermeté au sein de la Ligue arabe. C’est la raison pour laquelle le Koweït –seul pays du Golfe à entretenir des relations diplomatiques avec les pays socialistes– s’emploie à persuader les autres membres du C.C.G. de nouer des liens avec l’U.R.S.S.


En définitive, le C.C.G. est à la fois un «chapeau» pour les multiples organismes communs du Golfe qui se sont constitués depuis une dizaine d’années, et quelque chose de plus. A cet égard, la volonté affichée de ne pas apparaître comme un pacte dirigé contre qui que ce soit laissera sans doute dubitatifs les pays du front de la fermeté, seul groupe constitué jusqu’à ce jour au sein de la Ligue arabe. De plus, parmi les six commissions économiques dont la création a été arrêtée par les chefs d’État, la plus significative est sans conteste la commission du pétrole qui a pour but de mettre en œuvre une politique commune, qu’il s’agisse de l’exploitation, de la distribution, mais aussi et surtout des prix et du niveau de la production. Avec 700 millions de tonnes par an, les États membres représentent près de 60 % de la production totale de l’OPEP.


Selon les statuts, les six chefs d’État doivent se rencontrer deux fois par an, le prochain sommet devant se tenir à Ryad en novembre prochain. De leu côté, les ministres des affaires étrangères se réuniront tous les trois mois. Commentant ces dispositions, les responsables du Golfe soulignent leur volonté d’avancer pas à pas sans hâte vers la solution des problèmes, y compris le plus délicat d’entre eux, celui de la sécurité. Si le siège du conseil de coopération est à Ryad, le secrétaire général est koweïtien, l’accord s’étant fait sur le nom de l’ancien ambassadeur de ce pays aux Nations Unies, M. Abdallah Yaacoub Bichara. Ce diplomate expérimenté doit notamment sa notoriété au fait que c’est à son domicile que M. Andrew Young avait rencontré des responsables palestiniens. Enfin, une commission a été créée pour mettre fin aux nombreux différents frontaliers qui existent entre tous les pays membres de la nouvelle organisation.

OLIVIER DA LAGE

Retour à la page d'accueil