Proche-Orient
Sommet impromptu Arafat-Clinton
Bill Clinton reçoit à la Maison Blanche Yasser Arafat pour
une rencontre impromptue décidée lundi soir, lors d'une communication
téléphonique entre les deux hommes, quelques heures après
l'attentat à la voiture piégée au nord de Tel Aviv.
Nouveau rebondissement dans un processus de paix qui n'en est pas avare : Yasser
Arafat s'est envolé pour Washington afin d'y rencontrer le président
Clinton à la Maison Blanche. Il aura ainsi de vive voix les éclaircissements
qu'il demande à Washington sur les «paramètres» soumis
aux négociateurs israéliens et palestiniens par le chef de l'exécutif
américain. Du coup, le premier ministre Ehoud Barak, qui avait fait connaître
son accord de principe au plan Clinton, a insiqué qu'à son avis,
il est peu probable qu'un accord soit conclu d'ici au départ du président
Clinton de la Maison Blanche le 20 janvier.
Les réserves exprimées par le premier ministre israélien
sur un point-clé du plan Clinton, à savoir la souveraineté
palestinienne sur l'Esplanade des mosquées, ont déjà sérieusement
nuancé l'appui israélien aux propositions américaines.
La rencontre impromptue entre Yasser Arafat et Bill Clinton contrarie la diplomatie
israélienne qui s'apprêtait à lancer une campagne internationale
pour expliquer que l'échec des négociations était dû
à l'intransigeance des Palestiniens. Ces informations, amplement commentées
dans la presse israéliennes, ne sont sans doute pas pour rien dans la
décision d'Arafat de se rendre sans délai à Washington.
Le leader palestinien n'a pas oublié comment, en juillet dernier, le
président américain lui avait fait porter la responsabilité
de l'échec des pourparlers de Camp David. Mais, derrière ce voyage,
il y a probablement davantage qu'une opération de relations publiques
de la part de Yasser Arafat. Le président palestinien a enfin réussi
à faire prendre conscience aux dirigeants américains que ce n'était
pas pure rhétorique de sa part lorsqu'il affirme être soumis à
de fortes pression de la part de son opinion publique. Les nouvelles propositions
Clinton représentent, de ce point de vue, une amélioration sensible
du point de vue palestinien par rapport à celles de Camp David. En refusant
de donner sur le champ sa réponse à Bill Clinton, Arafat a exercé
sur ce dernier une pression qui n'est pas sans effet sur un président
qui est bien décidé, jusqu'à la dernière seconde
de son mandat, à faire tout ce qui est en son pouvoir pour amener Israéliens
et Palestiniens à signer la paix.
Arafat ne désespère pas d'amener Clinton à infléchir
encore ses positions
D'autre part, les Palestiniens ont bien noté la hardiesse des dernières
initiatives du chef de l'exécutif américain. Certes, il a renoncé
au projet qu'il caressait de se rendre en Corée du Nord, mais il a publiquement
déploré les effets de l'embargo mené depuis quarante ans
contre Cuba et il a utilisé les dernières heures de l'an 2000
pour apposer la signature des Etats-Unis sur le traité créant
la Cour pénale internationale. Arafat ne désespère pas
d'amener Clinton à infléchir encore ses positions sur le dossier
israélo-palestinien.
Certes, cela ne fait pas l'affaire d'Ehoud Barak. Mais confronté à
une nouvelle offre, précise, de Bill Clinton, acceptée par Arafat,
ses options sont très limitées. Un refus, et c'est la victoire
assurée du chef du Likoud Ariel Sharon qui le devance déjà
de plus de vingt points dans les sondages ; un accord in extremis suscitera
un tollé en Israël, et pas seulement dans l'opposition. Mais c'est
la seule carte qu'il reste à Barak. Car le thème de sa campagne
(« votez pour moi ou vous aurez la guerre ») peut être présenté
autrement : signature d'un accord de paix avec Barak, ou absence d'accord avec
Barak ou Sharon, et ce sera vraisemblablementla guerre, quel que soit le vainqueur
des élections israéliennes du 6 février.
OLIVIER DA LAGE
02/01/2001