Proche-Orient
Arafat et Barak s'engagent à fond dans la négociation
Les Américains continuent de maintenir un strict huis-clos sur le contenu des négociations israélo-palestiniennes. Les rares informations qui ont filtré indiquent que les délégations ont abordé de front la question de Jérusalem et celle des réfugiés.
On ne sait pas encore si le sommet de Camp David va se conclure par un succès
ou par un échec, mais déjà, chacun prend ses dispositions.
Côté palestinien, les jeunes du Fatah mobilisent et vont ouvrir
dans les jours qui viennent des sessions de formation militaire, dans l'éventualité
d'une rupture des négociations. Chacun s'attend en effet, en cas d'échec,
à un regain de violence dans les territoires palestiniens pouvant déboucher
sur des affrontements violents entre Israéliens et Palestiniens. Cette
fois-ci, chacun le sait bien, il ne sera plus question de guerre des pierres.
L'Autorité palestinienne est désormais pourvue d'une véritable
petite armée, même si elle n'en a pas le statut et de nombreux
civils palestiniens sont également dotés d'armes à feu.
Le chef d'état-major israélien, le général Shaul
Mofaz, avait d'ailleurs averti qu'en ce cas, Israël enverrait ses chars
dans les localités palestiniennes.
Mais tous les préparatifs ne reposent pas nécessairement sur une
hypothèse pessimiste: selon le journal Haaretz, le premier ministre israélien
Ehoud Barak a confié à un spécialiste des relations publiques
la tâche de préparer une campagne-éclair pour un référendum
ou une campagne électorale afin de faire entériner les résultats
obtenus à Camp David. En effet, seul le parlement israélien peut
décider de soumettre un texte au référendum. Si Barak n'obtenait
pas ce vote de la Knesset, il dissoudrait celle-ci et provoquerait des élections
anticipées en prenant le peuple israélien à témoin.
Tout indique en effet qu'après de longs mois d'attentisme et de tergiversations
afin de préserver sa fragile coalition, le chef du gouvernement israélien
a brûlé ses vaisseaux. Il s'est engagé à fond dans
la négociation avec Arafat malgré l'opposition d'un tiers de son
gouvernement. Désormais, c'est par-dessus les partis qu'il s'adresse
à l'opinion israélienne, à la manière de De Gaulle
lors du règlement de la guerre d'Algérie. Mais cela n'interdit
pas d'élargir sa base, ce qu'il a fait en conviant à Camp David
un ancien ténor du Likoud, Dan Méridor, actuellement président
de la commission des affaires étrangères du parlement.
De son côté, Yasser Arafat tente également d'élargir
sa base politique. Il a demandé à plusieurs responsables palestiniens,
membres du FDLP, du parti communiste et du Front populaire, de le rejoindre.
Les Israéliens ont avancé des propositions sur la question de
Jérusalem et des réfugiés. Israël accorderait une
« large autonomie » à certains quartiers palestiniens et,
sans reconnaître sa responsabilité dans le problème des
réfugiés, accepterait de verser des indemnisations « substantielles
» à un fonds créé à cet effet. C'est très
en deçà des demandes palestiniennes, et il est trop tôt
pour dire si ces premiers pas permettront d'arriver à un compromis. En
revanche, ce qui apparaît nettement, c'est que les deux parties sont désormais
engagées à fond dans la recherche d'une solution réelle.
Du coup, Bill Clinton peut changer de rôle. Puisque l'on n'a plus besoin
d'un médiateur, il lui revient d'être un « facilitateur »
et de jouer avec son équipe le rôle de « boîte à
idées » pour aider les négociateurs à sortir de l'impasse.
OLIVIER DA LAGE
14/07/2000