Proche-Orient

Sharon face à son parti

 


Trois mille militants du Likoud doivent se prononcer sur l'entrée au gouvernement des travaillistes préconisée par Sharon


Le Likoud serait-il en train de devenir le principal parti d’opposition à Ariel Sharon, son président ? On pourrait le croire à l’ouverture de la convention du parti qui doit se prononcer sur un texte l’autorisant ou non à négocier l’élargissement de son gouvernement à « toute formation sioniste, sur la base du programme du gouvernement et conformément à ses décisions », autrement dit, du parti travailliste de Shimon Peres.


L’affaire est loin d’être réglée et les opposants à la politique de Sharon sont très mobilisés, notamment derrière le ministre sans portefeuille Uzi Landau qui fait figure de chef de file des faucons du Likoud. Déjà, au mois de mai, les militants avaient massivement rejeté le plan Sharon de désengagement unilatéral de Gaza, même en échange de l’accord des Etats-Unis pour consolider plusieurs colonies existantes en Cisjordanie. Devant l’échec subi, le Premier ministre israélien avait répliqué qu’il ne se sentait pas lié par le vote des militants. Sharon avait également été désavoué en 2002 par les militants du Likoud sur son projet de créer un État palestinien, même dépourvu des attributs de souveraineté.


Cette fois-ci encore, Ariel Sharon a par avance indiqué que le vote de la convention du Likoud n’aurait pas valeur contraignante et que la seule confiance qui importait était celle de la Knesset, le parlement israélien. Néanmoins, le chef du gouvernement a tenté de désamorcer la fronde en annonçant en début de semaine qu’il autorisait la construction d’un millier de nouveaux logements  dans sept colonies juives de Cisjordanie, décision qu’il avait gelée deux semaines auparavant afin de satisfaire aux demandes américaines. La construction de nouveaux logements dans les Territoires occupés est en effet en totale contradiction avec la Feuille de route promue par le Quartette (Etats-Unis, Europe, Onu et Russie) et à laquelle se réfère systématiquement l’administration américaine. Pour autant, la Maison Blanche s’est bien gardée de critiquer ouvertement cette décision, toute critique d’Israël étant politiquement risquée en cette année d’élection présidentielle américaine, ce que n’ignore évidemment pas Ariel Sharon.


Vers des élections anticipées ?


En tout état de cause, si les pourparlers informels durent depuis un bon mois entre Ariel Sharon et les travaillistes, et s’il est patent que les dirigeants travaillistes, Shimon Peres en tête, sont impatients de mettre fin à leur cure d’opposition, rien n’est encore décidé. La politique économique est un enjeu au moins aussi important que le désengagement de Gaza dans ces négociations, les travaillistes exigeant qu’il soit mis un terme à la politique libérale menée par le ministre des Finances Benyamin Netanyahou et que le gouvernement infléchisse sa politique dans un sens nettement plus social. Cependant, Sharon refuse de modifier le budget 2005, tel qu’il a été élaboré par l’équipe actuelle.


En cas de blocage –rejet par le Likoud d’une coalition élargie aux travaillistes et impossibilité de se mettre d’accord avec ces derniers pour former un nouveau gouvernement– le chef du gouvernement israélien n’aura pas épuisé la panoplie à sa disposition. Les analystes politiques israéliens n’excluent pas qu’en ce cas, Ariel Sharon, qui demeure très populaire en Israël, convoque des élections anticipées et se présente à la tête d’une nouvelle formation, constituée par ses partisans au sein du Likoud, les membres du parti laïque Shinoui, et les « travaillistes de gouvernement ».


OLIVIER DA LAGE
18/08/2004
 

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