(extrait du chapitre 1, page 9)

Un double clic et une multitude de pages miniatures s'affiche à l'écran, marquée de couleurs vives :

- On dirait une collection de timbres.

- Douze lignes de quatorze vignettes, une par page. Les jaunes du début correspondent aux deux premiers chapitres, avec la mise en place des personnages. Ensuite, les pages deviennent rouges. Tu vois celle avec un petit revolver ? Il indique le moment le meurtre. Le premier rebondissement a été placé au chapitre six et le second au chapitre neuf. Regarde, il y a des petites bombes sur les pages.

 

Pierre se cale dans le fauteuil :

-Marge de manœuvre sur le scénario ?

-Totale ! En bougeant les curseurs avec la souris, tu ajustes directement la place des rebondissements, pour changer le rythme. Autre chose : tu vois le bouton modifier les personnages ? Il donne accès aux fiches d'identité, avec le supposé Maigret, Mata Hari, Lolita et Charles Henri ; c'est le nom du joueur de golf... Et ces pointillés jaunes au milieu... Ils indiquent les entrées en scène. Vu ton impatience, ajoute Tran, clique plutôt sur un chapitre. Tu vas voir ; chacun est résumé dans une fiche signalétique.

- On y accède par là, suppose Pierre en survolant de sa flèche une petite grille numérotée de un à douze.

- Exact.

Il clique rapidement sur le chapitre sept. Un coup d'œil à la grille de description proposant lieux, personnages, actions, style et il revient à la vision d'ensemble.

- J'ai compris le principe, marmonne-t-il entre ses dents : toutes les décisions sont prises par défaut. Restent juste à choisir les paramètres que l'on souhaite modifier.

- Allons à l'essentiel. Clique sur O.K, pour voir le texte.

Les yeux de Pierre s'écarquillent : deux pages de front suggèrent une édition de luxe avec un filigrane. Ecran après écran, il découvre le roman avec avidité, comme quand on enlève un pochoir pour révéler le résultat. Avec la souris, l'informaticien feuillette de doubles pages en doubles pages. Chaque début de chapitre est même illustré d'une superbe photo pastel. Titre ? Le crime de Saint Pierre des Corps.

- Par défaut, les meurtres ont lieu dans la gare, précise le patron de Virtual Soft.

- Pourquoi pas à la Gare Montparnasse ? j’avais choisi une histoire entre Paris et Tours ?

- Priorité à la province. Bien sûr, ces paramètres sont modifiables. En utilisant le menu de gestion de l'intrigue, tu transformes les circonstances. -Tran lui a pris la souris.- La victime, le coupable, le moment et le mobile se choisissent également là. Allez. Tiens, vas-y...

 

Trois minutes s'écoulent pendant lesquelles Pierre, hirsute et muet, picore ici et là des morceaux du texte.

- Tran, elle a l'air sympa ton histoire ! C'est vrai qu'on dirait un roman.

- T'es gonflé ! Bien sûr, que c'est vraiment un roman. Permets-moi de te faire remarquer que tu n'en as encore rien vu. Hier soir, je m'étais dit, je vais devoir me le fader et... en fait, ça m'a scotché et j'ai tout lu d'une traite... Mais je n'y suis pour rien ; tout le mérite en revient à Romanesque.

- Surtout à Naïma Ikkache, si j'ai bien compris. Cette fille a fait un sacré boulot.

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