Interview de Marc & Patrick (Fanzine Devor-Rock, n°43, janvier 2000)
     
Texte  
 

Il y a quelques temps, Thomas le batteur de Venus s'est étonné auprès de Claudy que Devor-Rock n'avait encore rien fait sur eux alors qu'à chaque fois qu'il faisaient quelque chose on était les premiers à en parler. Et bien voilà l'interview. En fait, il ne savait pas qu'elle était déjà réalisée avec Marc et Patrick et qu'on venait juste de boucler Devor-Rock et donc qu'elle était reportée au numéro suivant, c'est-à-dire celui-ci.
C'est vrai qu'on est sûrement les derniers sur la balle mais cela ne doit pas cous empêcher d'encore un peu vous attarder sur le groupe car ils viennent quand même de sortir un des meilleurs albums de l'année.


On avait fait l'interview il y a un an ici au Botanique, et là vous revenez en tête d'affiche avec un battage médiatique assez important. Comment voyez-vous cela ?
Patrick (scénariste) : Tout n'a pas explosé d'un coup. C'est une année où on a énormément travaillé, fait énormément de concerts, on a enregistré, on a trouvé des gens pour nous signer. On a eté jouer pas mal à l'étranger. On a fait pas mal de concerts en Italie vu q'uon est sur une maison de production italienne. Mais on n'a pas le sentiment de quelque chose qui a surgi d'un coup de nulle part.

Comment s'est passé pour vous le spectacle aux Halles de Schaerbeek ?
L'idée, c'était de faire un one-shot et de vivre ça comme une expérience un peu différente comme musicien.

Et l'après ?
Ca nous a apporté plein de choses au niveau du travail de scène qui est différent du travail de scène traditionnel des groupes de rock. Je croîs que cela a apporté quelque chose à tout le monde.

Cela vous a servi dans le nouvel album ?
Toutes les choses que tu fais au jour le jour te servent pour l'avenir. Tu avances et tout ce qui est acquis, il est là.

On dit souvent que le premier album d'un groupe, c'est un peu un fourre-tout de tout ce que le groupe a fait jusque-là. Ici, je n'ai pas l'impression que c'est le cas. Ce sont des nouveaux morceaux ?
Marc (chanteur-guitariste) : Il y a des très vieux et des très récents. On en a enregistré environ 20. Et on n'a pas pris spécialement les plus récents ou les plus vieux. On a pris forcment ce qu'on trouvait a la fois le plus abouti et le meilleur. Je pense que c'est ce qui fait que c'est un beau petit voyage. Et les morceaux qu'on a pas utilisés, ceux sont ceux dont on pourrait dire qu'ils feraient double emploi. Ceux-là, on les mettra si possible comme inédits sur les singles. On n'a quasiment rien jeté. C'est aussi un peu normal avec le temps qu'on a passé sur ce disque.

Il y a eu un travail très long sur le disque?
Je suppose que c'est long. On a mis deux mois pour les prises mais et un mois pour le mix, plus une semaine pour le mastering.

Je trouve personnellement qu'il y a deux choses qui ressortent très fort, c'est le travail sur les ambiances qui est super important et qui met l'auditeur dans un climat...
Il y a eu un double travail à ce niveau-là. Au niveau des endroit où on a enregistré, des prises et des autres parties qui concernent le mix et le mastering. A la base, on a énormément travaillé sur les prises mais on a aussi énormément travaillé après sur les effets même si à la base tout est acoustique.

Dans votre tête, vous saviez où vous alliez, du moins en brut ?
En brut, oui. Quand on a commencé à enregistrer dans une salle ici à Bruxelles, ce n'était même pas en studio. On a amené du matériel avec à la base une mauvaise reverb qu'on a du arranger. Comme on était là, on s'est posé la question de savoir par où on commençait. On a regardé les morceaux et en fonction de l'acoustique qu'il y avait là-bas, on a commencé par tel ou tel morceau. Et on a travaillé à chaque fois comme ça par rapport au lieu où on était. En Italie, on a principalement travaillé dans un petit studio tout en bois. On a aussi travaillé dans un grand studio à vocation classique très acoustique avec une grande reverb. On avait une idée de base par rapport aux morceaux et aux endroits où on voulait les enregistrer et même comment. La plupart des morceaux ont été enregistré séparément. Mais il y a aussi des morceaux où on a joué ensemble.

Un autre travail que j'ai trouvè important, c'est au niveau des voix. Elles sont au bon endroit.
Merci. Mais je pense que c'est comme pour le reste, on a essayé de trouver la bonne recette, toujours à la limite de l'excès mais que ce soit dans l'agressivité ou l'inverse. Il a fallu à chaque fois trouver le bon niveau pour l'interprétation du chant proprement dit. On a passé des heures là-dessus.

Ce ne fut pas dur ? On n'a pas peur a un moment donné de ne pas trouver le bon feeling ?
Si, c'est arrivé quelques fois mais alors, tu laisses tomber et tu recommences deux ou trois jours plus tard. Mais en règle générale, c'est toujours la même chose. J'enregistre les voix 5 fois. La première tu sais d'avance que c'est l'échauffement, la deuxième est meilleure. Mais tu sais que la troisième ou la quatrième seront sûrement la bonne car tu es dedans, tu es bien chaud et voilà.

Vous avez aussi tourné énormément. Tous ces concerts vous ont aidés d'une certaine manière car à forçe de tourner, on a des idées sur certaines ambiances, certains chants...
Je pense que c'est à double tranchant. Il est clair que si tu chantes 50 fois la même chanson, soit cela ta donne des mauvaises habitudes, soit ça t'ouvre des possibilités que tu n'avais pas aperçues au départ. Au moment d'enregistrer, tu dois faire un petit bilan pour éviter à tout prix ce qui va dans le sens de l'habitude, des choses installées. Car cela se ressent au niveau de i'interprétation car l'émotion ne passe pas. Or c'est le but à tous niveaux, même pour le chant car quand tu écoutes un morceau, ton oreille va d'abord vers la voix humaine et pas vers les instruments.
(Départ du scénariste qui va finir de régler les lumières)

La première pochette [le RoyalSucker EP] était un peu nature, par contre, celle-ci est carrément urbaine. Pourquoi?
C'est du papier glacé format digipack mais je pense qu'il y a eu un travail qui va plus loin que la forme. La première pochette était plus quelque chose de beau et un rien provocateur mais pas vraiment avec un fond. Ici, il y a une idée que je vais essayer de t'expliquer le plus clairement possible. On a d'abord trouvé le titre de l'album en studio pendant que je chantais un truc, on a flashé dessus. On était tous d'accord très vite. Puis, on a pensé à l'illustration. Il fallait trouver une vieille salle de bal un peu cracra, à la limite bordel, mauvais genre. Alors, on s'est rendu compte que cela restait très premier degré et en plus, il fallait trouver la salle où tout le monde était d'accord. Alors Patrick a commencé avec l'idée que comme on était en studio et qu'on ne voyait que le studio, la maison, le restaurant, que la seule possibilité de s'ouvrir vers l'extérieur était la télévision. Il a commencé à faire plein de photos de ce qu'il voyait à la télévision que ce soit l'actualité type journal télévisé ou les jeux, télé-achat, feuilleton américain et il se fait qu'à ce moment-là (mars-avril-mai 99) il y a eu des événements très lourds. Et la pochette de l'album, c'est une bombe placée par un déséquilibré mental dans un quartier chaud qui, si je ne me trompe, est Soho à Londres à une heure où il y avait pas mal de monde. Et toutes ces photos qui se situent sur l'album et les différents singles, c'est ça "Welcome to the modern dancehall". Ce paradoxe que toi, tu enregistres ton album, tu t'investis complètement dedans et pendant ce temps-là, il y a aussi des événements. Ce n'est pas une moralisation mais simplement un constat de se dire "C'est quoi la musique. Je continue malgré tout. Il faut relativiser mais continuer à la faire".

Déjà le titre de l'album, c'est presque bizarre par rapport à la musique.
C'est décalé ?

Oui, c'est ça.
Il y a déjà dans le nom "modern dance-hall" un côté désuet, salle de bal mais moderne, c'est un mot qu'on utilise plus tout à fait, suranné.

Salle de danse avec votre style de musique, ce n'est pas...
Oui et non car dans certains morceaux, tu retrouves un côté cabaret.

C'est une autre forme de danse que celle qu'on peut s'imaginer maintenant ?
La dance ?

Par exemple.
Oui évidemment. Mais si tu le prends littéralement c'est "salle de bal". Un truc complètement dépassé. Je crois qu'au départ, c'était là-dessus qu'on voulait jouer avec des instruments acoustiques. C'est aussi pour montrer qu'avec ce type d'instruments, on peut faire quelque chrose de très actuel. Et s'il y a un clin d'oeil à la dance, tant mieux parce que c'est tellement éloigné et ce n'est pas pour autant qu'on en écoute pas.

Au niveau des labels, c'est 62TV et Bang! qui s'occupent de vous en Belgique. Et pour le reste ?
A l'origine, on a signé avec Sonica Factory qui est un label italien indépendant. On a un contrat discographique avec eux. En Italie c'est distribué par Universal. Au printemps de Bourges, EMI était vraiment intéressé et ils ont signé un contrat de licence avec Sonica. EMI nous a en licence pour le monde sauf pour la Belgique où on travaille encore avec 62TV et Bang!. On a d'abord signé en Italie ce qui a prêté à rire chez certains, mais maintenant ils rigolent un peu moins quand ils voient le travail fait. Ces gens sont très sérieux et très compétents. Je suis fier de ce partage car il est presque en décalage. Qui aurait pensé qu'un groupe de rock signerait un contrat en Italie ?

Bourges a été une date importante ? Ce fut un déclic ?
Il y a eu un premier déclic, c'est notre tournée en Italie et la rencontre avec Sonica Factory. Et le second, c'est Bourges où dans la salle, il y avait pas mal de gens de majors et qui après le concert ont voulu nous signer.

On a l'impression en vous ecoutant que Venus est de moins en moins belge mais de plus en plus international ?
Européen ?

Oui.
Cela me conviant bien même au niveau artistique. Je pense que chez les autres aussi, mais pour moi l'influence est à la fois très américaine et à la fois très française. Je pense qu'il y a une façon d'harmoniser les chansons très française dans la tradition et si tu remontes très loin, c'est Edith Piaf et plus près Jacques Brel. Mais il y a aussi le côté anglo-saxon, allemand comme Brecht ou des choses comme ça. C'est une digestion très belge, très petit pays, très petite culture traditionnelle comme on est un pays très jeune. Moi, je ne me sens pas spécialement belge mais venant d'une région d'Europe.

Non seulement au niveau musical mais aussi au niveau carrière ?
Depuis quelques mois oui, on a tourné plus à l'étranger qu'en Belgique et c'est tant mieux.

Lucifer Sam

 
  Notes  
 
Un grand merci à simonb de nameless.
 
You won't tell me, I know it's hard
To keep your dream alive
Royalsucker
 
 
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