Compte-rendu de Lau :
Vu pour la première fois Venus en concert. Sonnée.
Dans ma petite ville de province française, étonnée
d'avoir vu un noyau de vrais fans, des djeunes qui plus
est (genre à la question posée par un déçu-en-les-voyant-arriver
"il est vieux le chanteur!?", réponse d'une
djeune fan: "ben oui, il a au moins 42 ans!").
Moi, hors course, allant voir un groupe belge par principe
(oui oui, je vais les voir tous, chacun sa manie), m'attendant
-vu Vertigone- à une pire daube brit pop... et sortant
séduite.
Classe pure au millimètre: la rage, la concision,
l'absence de redondance (comme on trouve sur Welcome mais
plus sur Vertigone).
Rêver d'une pop apaisée? Fausse route. Sinon
on fait autre chose. Pourquoi les belges (Gorki, Hooverphonic
et Venus pour ne nommer qu'eux) rêvent-ils d'orchestres
de chambre? Pourquoi est-ce que j'entends dans Vertigone
des accents de Tubular Bells? Quite a vouloir faire "sérieux"
(je crée dans la musique contemporaine de mon époque),
mieux valent les ruptures de rythmes à la Adams-Reich-Glass
- plus vraies et plus efficaces : à preuve, Venus
sur scène c'est ça, pas des ruisseaux de cordes
et une voix qui s'écoute chanter.
Et ça marche au point de laisser des hagards vautrés
dans Welcome en boucle -genre je traverse la ville walman/discman
etc. (après c'est une question de moyens) sur les
oreilles et genoux mous et j'en veux encore et encore et
encore...
...puis, suite à ma demande d'autorisation de
publier ce mail :
Par pitié, si tu veux vraiment publier le mail (moi
je n'y tiens pas), pas
avec les fautes, que je renie! Mais c'était un peu
aigre comme courriel et
donc très injuste.
Il faudrait en dire plus sur l'entreprise de séduction
qu'est Venus sur scène. Et ça c'est possible
à faire, mais il faudrait un peu de temps - que je
n'ai pas. Vertigone est surproduit, mais pas si mauvais
que ça en fait au fond. Comme on dit "il n'a
pas un mauvais fond cet enfant". Mais je reste soufflée
par le travail de représentation en scène,
une théatralisation minimaliste du point de vue du
spectateur -beaucoup de travail de la part des acteurs j'imagine-
qui transforme un petit bonhomme à l'apparence banale
(Huyghens) en animal de scène.
Car c'est sur lui je présume que se cale la construction.
Comment fait-il/font-ils pour, sur scène, (ré)concilier
une rage radicale (qui a des racines punk, même si
elles ne sont pas visibles au sens Wysiwyg du terme) avec
une élégance vénéneuse qui mélange
rigueur classique (c'est vrai que je ne peux m'empêcher
de penser au trio Reich-Adams-Glass) et fantaisies de pop
pure?
Sans compter qu'il y aussi de la frustration adolescente.
Je reste mystifiée. D'autant qu'après avoir
entendu une interview sur France Inter il y a quelques années,
j'étais partie sur l'idée que Venus, c'étaient
des grands frisés en pulls marins (!?!?) un peu plus
instruits que la moyenne des popeux. Le plus mystifiant,
c'est que les avoir vus sur scène change l'écoute
des disques.
En fait le concert m'a fait penser à une performance
de Brion Gysin que j'ai vue à Paris au début
des années 80. C'était pendant une soirée
poétique au Centre Culturel Américain. Une
cata : des vieux barbus norvégiens qui déclamaient
des odes aux fjords en norvégien -tu vois si ça
peut être opaque- et des rombières en robes
noires et colliers de perles qui battaient vaguement du
bout des doigts pour éviter de ronfler. Et puis le
vieux Gysin est arrivé avec le groupe de Ramuntcho
Matta et tout a explosé. Et en écrivant cela,
je me rends compte que Matta/Huyghens, ça pourrait
vraiment bien le faire, si les égos ne clashaient
pas! Il faudrait que quelqu'un les présente l'un
à l'autre s'ils ne se connaissent pas (même
génération, même Italie).