C’est une ville d’explosifs,
le paradis des insurgés. Le site de al Qaqaa où
ont disparu les 350 tonnes d’explosifs selon l’AIEA a servi longtemps
après la chute du régime à ravitailler les
groupes d’insurgés irakiens. Lorsque je travaillais sur
des cellules de la guérilla qui gravitait autour de Lattifiya
en novembre 2003, j’avais suivi le groupe qui quelques jours plus
tard après notre visite à al Qaqaa allait commettre
l’attentat contre l’avion de la DHL. Abou Abdallah et ses compagnons
d’armes étaient venus dérober du TNT et des explosifs.
Le spectacle offert par cette ville de bombes, caverne d’Ali Baba
du terroriste qui s’étendait sur des dizaines de kilomètres
était stupéfiant. Pour s’y rendre, le groupe de
l’attentat de la DHL connaissait toutes les routes de traverse,
les petits chemins non goudronnés que les soldats américains
n’empruntent pas parce qu’ils sont trop risqués. A les
écouter, après la chute du régime, ils avaient
déménagé des armes et des stocks de TNT par
camions entiers pensant que les Américains boucleraient
cette réserve d’armes trop tentante. Ils nous avaient montré
leur arsenal.
Des lance-roquette,
des grenades des missiles d’hélicoptère bricolés
enterrés dans des champs de courgettes jaunes. Mais très
vite, ils s’étaient rendu compte que c’est une armée
entière que les Américains auraient dû mobiliser
pour garder l’ancienne usine d’armes d’al Qaqaa. Alors ils n’ont
plus pris la peine d’entreposer le TNT dans le jardin de leurs
fermettes. Dans les gigantesques hangars, recouverts de terre,
tumulus d’explosifs, il leur suffisait de se servir. Grâce
à la précieuse poudre rouge, le groupe d’Abou Abdallah
m’avait assuré avoir fait sauter un convoi sur la route
entre al Asoua et l’autoroute de Bassora.
Peu surveillé
Alors que la voiture
de la guérilla se dirigeait vers le dépôt
de munitions d’al Qaqaa, elle avait été interceptée
par une patrouille américaine. Sur un char, une jeune soldate
avait pointé son arme automatique sur le groupe. Abdallah,
sorti de la voiture en souriant, s’en était sorti en plaisantant
en arabe avec l'officier américain d'origine jordanienne
qui l'interrogeait. Au bout de trois minutes, on l’avait laissé
repartir. Lorsque nous sommes arrivés à l'usine,
personne ne nous en avait interdit l'accès.
Les rares gardes armés irakiens que nous avions croisés
ne nous ont même pas demandé ce que nous venions
y faire. Abasourdis par tant de facilité, nous avions pu
déambuler dans cette ville de bombes, d'obus et d'explosifs.
Toute l'histoire militaire de l'Irak gît ici. A la chute
du régime, de nombreux pillards se sont fait sauter en
se disputant les obus qui jonchaient le sol. Impossible de comprendre
pourquoi l’endroit n’est pas mieux gardé. Le lendemain
à une des fêtes de départ donnée par
une agence américaine au Palais, je demande à un
des généraux chargé de la formation de la
nouvelle armée irakienne pourquoi al Qaqaa n’est pas plus
surveillé. Il n’a jamais entendu parler de cette ex-plus
grande usine d’explosifs et de bombes du Moyen-Orient…
d'après l'article
daté de nov.2003 :
Irak
: EXCLUSIF:Au
coeur de la guerilla antiamericaine, novembre 2003
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REPORTAGE: "RESISTANCE, PHOTOS
EXCLUSIVES": 6 nov
2003
SARA
DANIEL |