Devant la toute petite maison ("Ici, ce n'est pas un chateau, mais c'est propre"), le petit portillon blanc du petit jardin est fermé à clef. "Le midi, quand je mange, je ferme. Comme j'entends de moins en moins bien, ça m'évite d'être surprise".
Un visage rond et très chaleureux vient vous ouvrir. "Oh ! tu es le fils de Nicole" ( le O est grave et très accentué). Passée la rapide présentation, le portillon s'ouvre.
A peine prononcé le nom de Seznec et les yeux pourtant grands, derrière de forts carreaux, s'entrouvent, étonnés, coquins tout autant que méfiants. "Guillaume, moi j'ai ... du respect pour lui". "Dans ma famille, mes cousines m'ont toujours dit que notre grand-mère était sa marraine, mais c'est loin tout ça".
Alerte, un peu sourde, la belle et coquette inconnue a plus de 80 ans.
Et puis, il faut bien dire pourquoi l'on vient, quel est le but de notre visite : s'entendre dire ! S'entendre dire : oui, c'est moi. C'est moi, cette main anonyme, si souvent évoquée dans les articles de presse consacrés à Guillaume Seznec. Cette main qui, depuis de si longues années, ne cesse de fleurir la tombe de Guillaume. Et sur laquelle tous, au village comme ailleurs, aimeraient mettre un nom, un visage. Et une explication.
Or, la main que l'on vient de serrer, c'est la même. Mais la belle inconnue refuse de l'avouer. "Qui peut t'avoir dit que c'était moi, qui donc alors?".
On explique, on dit. Qu'après cinq ans passés au pays, il y a peu, sachant depuis le premier jour l'intérêt que vous portiez à Guillaume, on vous l'a dit. Qui? Mais, une telle et un tel, confirmé par sa propre mère.