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Rencontre
avec Jean-Luc Choplin,
nouveau directeur du Châtelet, à la rentrée 2006 / 07
Encadrant
notre invité, Caroline Alexander et Nicole Duault commencent par rappeler
le parcours de Jean-Luc Choplin, auquel ce dernier ajoutera des précisions
au fur et à mesure du déjeuner : études de philosophie,
de flûte à l’Ecole Normale, d’économie –
pour faire plaisir aux parents -; responsable administratif de la Danse à
l’Opéra de Paris, à l’Orchestre de Nancy, des vitrines
de Noël aux Galeries Lafayette; poste à Disneyland Paris, etc...
L’homme se définit comme « un amoureux des arts plastiques
», qui a souhaité une programmation hétéroclite,
un « renouveau dans la continuité ».
Emu d’être au milieu de professionnel, lui-même se sent,
en comparaison, peu qualifié, ne prétendant à rien sauf
à être un bon artisan, une « utilité »,
un serviteur qui refuse d’être sur le devant de la scène
pour mieux ouvrir des portes et mettre les gens en relation. Bref, moins préoccupé
de lui-même que des autres, M. Choplin se sent proche
de la pensée de Levinas : « c’est l’altérité
qui fonde la morale. »
Lui qui a eu la chance de travailler avec John Cage, Rudolf
Noureev – l’ouverture d’esprit du danseur est saluée
au passage -, ou Bob Wilson – dont le projet commun
sur La Passion selon St Jean remonte à loin -, est à
l’aise avec l’idée de projet collectif et souhaite, en
se préoccupant d’une œuvre, se soucier de ceux qui vont
la servir. Ainsi, Jean-Christophe Spinosi, Emmanuelle
Haïm, responsables de formations trop peu engagées à
Paris, sont évoqués, ainsi que les noms de talents plus ou moins
nouveaux, plus ou moins connus, invités ou non de cette première
saison : Bérénice Collot, Pierrick
Sorin, Christian Boltanski, David Cronenberg,
Gérard Pesson etc...
Si de futurs projets sont précautionneusement évoqués,
Jean-Luc Choplin avoue ne pas savoir à l’avance
de quoi seront faites ses prochaines saisons, lui qui ne souhaite rien de
systématique et adapte ses envies au hasard des rencontres.
La première saison
Le contenu de la prochaine saison, connu depuis la conférence de presse de la veille, est largement commenté. Tout en applaudissant l’absence d’hommage à Mozart, Charles Rosenbaum regrette et reproche une saison sans Verdi ni Puccini. Evoquant les liens entre Cunningham et Cage justement, Philippe Verèle remarque de nouveau la faible présence de la danse au Châtelet à l’avantage, cette année, de la comédie musicale. De la même façon, Nicole Duault s’interroge sur ce Chanteur de Mexico qui ouvre la saison.
Jean-Luc Choplin s’explique sur ces points : il n’a pas souhaité une saison traditionnelle mais différente, avec du grand spectacle qui convoque tantôt l’opéra, tantôt l’opérette et la comédie musicale. M. Choplin refuse de s’abandonner à « l’errance de l’être » d’où cette ouverture tout en légèreté avec Francis Lopez - qualifié d’ « inventeur mélodique inégalé » - et qui répond à sa vision d’un lieu qui a toujours défendu de concert tradition et transgression. Emilio Sagi, chargé de la mise en scène, est vu comme un homme de goût et d’élégance, qui fera entrer le Châtelet dans le XXIe siècle (à l’instar d’une affiche créée par Pierre et Gilles.) La télévision française, de TF1 à Arte, a d’ores et déjà manifesté son intérêt pour ce spectacle ! En ce qui concerne la danse, le Théâtre de la Ville gère mieux que quiconque ce domaine et il n’est pas question de rivaliser.
Cultures du monde... et d'entreprise
Homme de dialogue, Jean-Luc Choplin souhaite « donner des couleurs » à un théâtre à la « véritable dimension populaire ». Il est sensible aux grandes cultures du monde qui seront représentées cette saison (Chine, Inde, Sahel) puisqu’elles s’interrogent sur le « passage de l’animalité à l’humanité jusqu’à la spiritualité ». Per Nygren en profite pour parler des jeunes talents londoniens et de coproductions possibles avec Manchester, de même que Pierre René Sernat rappelle l’intérêt de faire découvrir les zarzuelas aux Français. La venue du West-Easter Divan Orchestra, programmée par Piano ****, est l’occasion de rappeler qu’il est « impossible de changer le monde mais qu’on peut commencer à le changer. » A la question de Leszek Bernat sur l’utilité d’un papier dans la presse étrangère, M. Choplin avoue y être sensible puisqu’une telle chronique sert l’image culturelle de Paris.
Que Nicole Duault
évoque Thaïs en version de concert et nous entrevoyons la frontière
entre public et privé : pour des raisons familiales, et malgré
un appartement sur Paris, René Fleming ne souhaite pas trop s’éloigner
de ses enfants. D’autres confidences suivront, comme ces exigences financières
de Sir Gardiner, concernant sa direction de Carmen avec son équipe
et qu’il n’a pas souhaité revoir à la baisse - d’où
un projet avorté.
C’est l’occasion pour Edith Walter d’évoquer les
nouveaux tarifs et l’enveloppe du théâtre : selon Jean-Luc
Choplin, elle est de 29 millions d’euros et couvre l’année
civile. En tant que gestionnaire, M. Choplin doit veiller
au renouvellement d’un public tout en étant attentif au «
jeu sur la mémoire ». Ainsi, la reprise des Paladins est
vue comme un soutien du travail de Montalvo et Hervieu
autant qu’un « acte de cœur » envers son prédécesseur,
Jean-Pierre Brossmann, tandis que des Fêtes de la pleine
lune semblent plus aptes à toucher de nouveaux spectateurs que les
Midis musicaux qui disparaissent.
Au final,
si beaucoup de craintes sont exprimées aujourd’hui – de
l’identité du lieu jusqu’au format des programme ou la
poursuite de l’édition de DVD -, Caroline Alexander apprécie
le retour des hommes de théâtre du Châtelet, Edith Walter
salue celui de l’abonnement libre, et Olivier Le Guay se félicite
d’un allongement de la saison sur juillet. Tout au long du déjeuner,
Jean-Luc Choplin a cherché à rassuré
sur les collaborations qui perdurent avec les formations parisiennes (Orchestre
de Paris, Ensemble Orchestral), sa concertation avec Gerard Mortier
à l’Opéra pour harmoniser leurs saison, le maintien
du service de presse actuel (salué par de nombreux convives.) A la
question de Didier Van Moere concernant la presse internet et ses difficultés
à être reçue, le futur pilote du lieu précise qu’il
ne peut pas mieux dire en souhaitant voir l’émergence d’un
« i.Châtelet. »
Mercredi 1er mars 2006,
Laurent Bergnach
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