> Jean Nithart Grand Prix de la PMI
Par Guy Erismann

Il est d’usage que l’Association de la Presse Musicale Internationale (PMI), réunie en Assemblée Générale, honore une personnalité dont l’action a contribué au rayonnement de la musique.
Son choix se porte généralement sur un grand interprète dont le rôle a permis d’approfondir, voire de renouveler, le sens d’une œuvre.
Mais il existe, en marge de ces destins souvent médiatiques, d’autres professions et d’autres acteurs de la vie musicale dont les mérites restent obscurs bien qu’ils constituent souvent les rouages essentiels de la transmission des connaissances dans le domaine qui nous occupe.

Certes ces acteurs sont nombreux mais la PMI s’est arrêté cette année au vaste monde de l’édition, non pas celui des partitions, mais celui des livres, qui permet à la musique de s’inscrire plus directement dans l’univers culturel. Ainsi en est-il de Jean Nithart qui s’attacha, voici plus de trente ans, au sein des Editions Fayard, à faire connaître la vie et l’œuvre des grands musiciens avant, progressivement, d’élargir son champ éditorial.

Jean Nithart se réfère à l’exemple de Jean et Brigitte Massin. Après la reprise du Beethoven et du Mozart, il édite le Schubert de Brigitte et le gigantesque Mahler d’Henry-Louis de La Grange, en trois volumes, autant d’ouvrages appelés à faire date et obtiennent, contre toute attente, de remarquables succès commerciaux. Citer de tels ouvrages revient à définir un style de biographie dans lequel l’analyse musicale est étroitement associée à l’étude historique, psychologique et intime du créateur.

Le cas de Jean Nithart directeur de collection est donc exemplaire. Est exemplaire aussi son cheminement personnel, fait de perspicacité, d’audace et de persévérance. Directeur administratif et financier des Editions Fayard, il a pu, fort de ces succès, convaincre la direction générale de son entreprise de créer une collection d’ouvrages consacrés à la musique et aux musiciens ainsi que des guides précieux qui se sont révélés indispensables et sont appelés à figurer dans toutes les bibliothèques. Jean Nithart a assumé seul la responsabilité de l’orientation éditoriale, le choix des thèmes et des auteurs et la surveillance des manuscrits jusqu'à leur parution. Il fit preuve d’éclectisme, de neutralité et de clairvoyance. La collection complète des ouvrages de la collection Fayard avoisine les 250 titres répartis en plusieurs séries parallèles, à commencer par une série imposante de monographies comportant plus de 70 noms parmi lesquels, aussi bien Alkan et Berlioz que Boulez, Lully que Magnard, Schütz que Scriabine et Chostakoitch, Haydn que Sibélius, Roland de Lassus que Puccini, c’est à dire un riche éventail couvrant le Moyen-âge jusqu’à notre temps. Le travail de Jean Nithart s’est développé également selon d’autres itinéraires. Outre les guides groupés sous le titres Les indispensables de la musique, d’autres séries, telles que Les chemins de la musique, Ecrits de musiciens et Les grandes études, aussi bien techniques que théoriques ou historiques, sont venues enrichir nos connaissances.

Des investigations plus ciblées abordent l’Opéra et le chant, ou encore le Jazz, Blues, Negro spirituals, Rock. On comprend donc que la conception éditoriale de Jean Nithart ne peut être qualifiée de franco-française. Elle s’est investie dans toutes les musiques, de toutes origines et de tous styles, sollicitant les auteurs les plus qualifiés à l’étranger comme en France, de telle sorte qu’il a été amené à commander de nombreuses traductions, servant ainsi la musicologie internationale.

Les attaches de Jean Nithart avec les Editions Fayard ont été rompues par l’âge mais il continue à impulser de ses conseils la collection musicale. Depuis son départ à la retraite, son ancienne collaboratrice, Sophie Debouverie, a pris le relais de sa tâche éditoriale à un rythme soutenu, annonçant dans les différents domaines des ouvrages dont la diversité surprendra. On y retrouve l’esprit d’aventure calme et résolu de celui que la PMI vient d’honorer.


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