G.Tomski, Le JIPTO et le Système JIP, Editions du JIPTO, 2005, 214 p.

ISBN : 2–35175–000–4

 4.1. L’éducation des enfants doués

Les enfants particulièrement doués ne sont pas forcément en tête quand on leur propose les tests classiques d’intelligence, ils ne brillent pas toujours dans leurs études, les notes scolaires ne correspondent pas à leur avance intellectuelle réelle. La question de l’éducation des enfants surdoués est capitale pour l’éducation en général.

4.1.1. Les enfants surdoués

Rémy Chauvin note que les enfants surdoués sont une « ressource naturelle inexploitée, dont l’importance peut être plus grande que la bombe atomique : et malheur à la nation qui le négligera ».
Le douement peut se manifester de la façon plus ou moins évidente. Les experts d ‘Eurotalent soulignent que les termes « douement » et « talent », ou leur équivalent ne sont pas interchangeables :
« Le douement a trait à une propriété psychologique de l’individu décelable de façon relativement scientifique au sens où, fréquemment, elle n’est pas spontanément, naïvement, reconnue comme telle : ni par l’entourage, ni même par l’intéressé, ou par l’un des deux seulement …
En revanche, le talent concerne une caractérisation psycho-sociale constituée et admise par tout ou partie d’une société, à un moment donné de son histoire, pour désigner des capacités actuelles qu’on a tendance à prendre pour une réalité objective. Le douement a trait à une possibilité de réalisation conditionnelle, il n’est décelable que par des indices certes comportementaux, (performanciels de ce point de vu) mais qu’il a fallu ou qu’il faut découvrir ou inventer, généralement en dehors de toute utilité manifeste de leur accomplissement. Le talent est une manifestation de réussite, déjà admise au moins localement et temporairement de façon publique ou extrascientifique, dans un champ donné de l’activité humaine où elle est appréciée comme un apport et à travers un consensus.»
Ellen Winner (Université de Havard) emploie le terme surdoué pour désigner des enfants « présentant les trois caractéristiques atypiques suivantes »:
« 1. La précocité. Les enfants surdoués sont précoces. Ils font leurs premiers pas dans la maîtrise d’un domaine plus tôt que les autres. Ils font aussi des progrès plus rapides dans ce domaine que les autres enfants, parce que l’apprentissage n’est pas un effort pour eux. Par domaine, j’entends un champ organisé de connaissances tel que le langage, les mathématiques, la musique, l’art, les échecs, le bridge, le ballet, la gymnastique, le tennis ou le patinage.
Une insistance à se débrouiller seuls. Les enfants surdoués n’apprennent pas seulement plus vite que les enfants ordinaires ou même brillants, mais aussi d’une manière qualitativement différente. Ils se débrouillent seuls : il leur faut un minimum d’aide ou d’encadrement de la part des adultes pour atteindre la maîtrise de leur domaine et, la plupart du temps, ils sont à eux-mêmes leur propre professeur. Les découvertes qu’ils font dans leur domaine sont excitantes et motivantes, et chaque étape les conduit naturellement à aborder la suivante. Souvent, ces enfants inventent eux-mêmes certaines règles du domaine en question et imaginent des manières inédites et personnelles de résoudre les problèmes qu’ils rencontrent. Cela signifie que les enfants surdoués sont par définition créatifs…
La rage de maîtriser. Les enfants surdoués sont intrinsèquement motivés pour donner un sens au domaine où se manifeste leur précocité. Ils font preuve d’un intérêt intense et obsessionnel, d’une faculté de concentration extrême et de ce que j’en suis venue à appeler la « rage de maîtriser »… »

Le JIPTO est aussi un domaine comme les échecs et le bridge. Nous constatons l’existence de nombreux enfants surdoués dans le domaine du JIPTO qui satisfont aux trois critères de Winner.
Ces critères laissent pourtant à part beaucoup d’enfants motivés et capables de travailler dur. Nous préférons utiliser l’expression « les enfants doués » qui n’est pas réservée à une petite minorité de la population car le douement est une propriété psychique générale des êtres humains.
Nous centrerons l’étude sur les domaines : douement artistique et littéraire, douement mathématique, douement d’inventivité ou de découverte, ainsi que le douement sociorelationnel (organisateur, art de communication). Ces domaines attirent les enfants et ne nécessitent pas une vaste accumulation des connaissances.
Utilisons les critères de Winner aux enfants doués pour le JIPTO. Aujourd’hui quand plusieurs dizaines de milliers de jeunes enfants sont initiés aux JIPTO de base, nous constatons :
- les règles du JIPTO de base sont faciles pratiquement pour tous les enfants de 6 ans ;
- les règles du JIPTO de base ne sont pas difficiles pour la majorité des enfants de 5 ans ;
- les règles du JIPTO de base sont à la portée d’une minorité d’enfants de 4 ans et des enfants plus jeunes.

Ainsi d’après le critère de précocité les enfants surdoués au JIPTO doivent être capables de jouer au JIPTO de base au plus tard à 5 ans, les enfants qui font leurs premiers pas dans la maîtrise du JIPTO plus tôt satisfont au premier critère de Winner. Ces enfants doivent commencer à jouer bien avec un minimum d’aide ou d’encadrement de la part des adultes (une insistance à se débrouiller seuls). Ils doivent faire preuve d’un intérêt intense et obsessionnel pour le JIPTO de base, d’une faculté de concentration extrême et de la « rage de maîtriser », qui consiste dans la recherche permanente des meilleures stratégies dans le JIPTO de base et après dans les autres versions du JIPTO. En Yakoutie, cet intérêt intense est renforcé par l’intérêt des adultes pour le JIPTO de base, par l’utilisation des kits du JIPTO de belle esthétique avec des couleurs vivantes, par l’organisation des JIPTO théâtralisés et des autres manifestations.

4.1.2. La question de l’éducation des enfants doués

Utilisons les idées principales, exprimées dans la « Recommandation 1248 » relative à l’éducation des enfants surdoués par l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe (Session 1994), pour l’analyse de l’état l’éducation des enfants doués. Les spécialistes d’Eurotalent considèrent que ce document « constitue une avancée sans précédent dans le domaine de l’éducation de ces enfants » (Eurotalent, 1998, p. 25).
I. Les enfants surdoués, comme les autres enfants, ont besoin d’un système scolaire adapté qui leur permette d’aller au bout de leurs possibilités.
Winner décrit les débats sur la scolarisation des enfants surdoués dans les termes suivants :
« Les partisans d’un enseignement spécialisé pour les surdoués différent sur la question de l’enseignement « enrichi » ou « accéléré » que les élèves surdoués devraient recevoir, s’il faut mettre ensemble dans les classes spéciales avec les enfants d’âge et de talent équivalent ou bien s’il faut les placer avec les enfants plus âgés en leur faisant sauter les classes. Mais ces dissensions dans le camp des partisans de l’éducation pour surdoués sont peu de chose par rapport au débat virulent qui les oppose aux adversaires d’une forme d’éducation spécialisée pour surdoués. Chaque parti est fermement persuadé qu’il a raison, et que l’autre est moralement tort. Chaque parti croit qu’il se préoccupe du sort de tous les enfants alors que l’autre ne s’intéresse qu’à certains. » (Winner, 1997, p. 266).
II. La recherche fondamentale sur la notion de « don » et de « talent », et de la recherche appliquée, par exemple pour améliorer les procédures de détection, devraient être développées parallèlement.
Les tests de Q.I. (Quotient Intellectuel) restent un outil essentiel lorsqu’il s’agit de penser et mesurer le don... Winer note :
« Au cours des dix dernières années, un groupe restreint mais remarqué de chercheurs a commencé à remettre en cause l’équation entre le don exceptionnel et le QI élevé. Ils se fondent sur une étude de prodiges menée par les psychologues du développement David Feldman et Lynn Goldsmith. Ces prodiges, qui atteignaient un niveau de performance adulte dans le domaine des échecs, de la musique, des maths ou de l’écriture n’étaient pas du tout avancés dans d’autres domaines. On rencontre un scepticisme, croissant quant à la pertinence des tests d’intelligence générale. Certains commencent même à remettre en cause le test de QI en tant qu’indicateur général du fonctionnement intellectuel. Les chercheurs commencent à voir que le don et le QI sont deux choses distinctes, et qu’une personne peut être très douée dans un domaine sans présenter pour autant un QI général élevé. Nous nous approchons ainsi d’une vision plus large, multidimensionnelle de ce que signifie la condition de surdoué. » (Winner, 1997, p.46).
On voit ces dernières années une prolifération de nouveaux tests et de nouvelles définitions du don. Nous utilisons, nous aussi, le JIPTO comme un test qui permet de détecter les enfants capables de concentration et d'activités intellectuelles intenses.
III. Les programmes de formation continue des enseignants doivent prévoir des stratégies de détection des enfants ayant de grandes capacités ou un talent spécial.
Les enseignants ont une tendance naturelle à qualifier de « surdoués scolaires » leurs bons élèves, mais : « Le succès scolaire est déjà une variété de prétalent plutôt que le douement » (Eurotalent, 1998, p. 20). Pourtant dans les domaines concrets qui nous intéressent : douement artistique et littéraire, douement mathématique, douement d’inventivité ou de découverte, le douement sociorelationnel, les jugements des enseignants, des parents et des camarades d’écoles sont assez valables. Il s’agit surtout des domaines régis par des règles strictes comme les mathématiques et le dessin réalistes.
IV. Les dispositions en faveur des enfants surdoués dans une matière donnée, doivent de préférence, être mises en place au sein du système scolaire normal, à partir du niveau préscolaire. Les programmes souples, l’accroissement des possibilités de mobilité, le matériel supplémentaire d’enrichissement, les auxiliaires audiovisuels et l‘enseignement orienté vers les projets sont les moyens et les techniques permettant de favoriser le développement de tous les enfants.
Nous donnons la préférence à l’éducation enrichie et approfondie sans nier pourtant catégoriquement les avantages de l’éducation accélérée qui sont formulées par Terrassier comme une réponse à la question : « Pourquoi l’avance scolaire ? » :
« D’abord et surtout pour respecter le développement naturel de l’enfant surdoué. Il ne peut être légitime de retarder le développement d’un enfant sous prétexte que d’autres enfants ne se développent pas au même rythme.
Parce qu’un enfant souffre d’un environnement culturel et scolaire appauvri, insuffisant par rapport à son stade de développement. Nous savons que la qualité culturelle de l’environnement a une incidence importante sur l’évolution d’un enfant. » (Terrassier, 1995, p. 71).
Dans la situation des classes hétérogènes les professeurs et instituteurs doivent essayer de diversifier leur enseignement afin de répondre aux besoins de chaque élève :
« Une véritable différentiation qui respecte le rythme d’acquisition de chaque enfant sera sans doute un objectif dévolu aux moyens électroniques d’enseignement individualisé qui se répandront bientôt en France et viendront compenser, à leur façon bien sûr, une carence de notre système éducatif. Les enfants précoces pourront alors pousser leur interlocuteur électronique aussi loin qu’ils sont capables et auront envie de comprendre et d’apprendre … » (Ibid, p. 99).
C’est pourquoi, la FIDJIP développe le « Monde du JIPTO » sur l’Internet (www.jipto.com, www.jipto.ru) et les CD-Rom sur le Système JIP.

4.1.3. L’application du Système JIP

Afin d’adapter le Système JIP à l’éducation des enfants doués, nous le reformulons de façon suivante :
- L’initiation précoce au JIPTO de base afin de détecter et de favoriser le don pour les jeux intellectuels ;
- L’utilisation du JIPTO afin de stimuler la créativité artistique et littéraire ;
- L’utilisation des JIP comme jeux de simulation afin d’augmenter l’efficacité de l’éducation scientifique ;
- L’organisation des compétitions afin de détecter et favoriser le don socioculturel (organisateur, arbitral …) ;
- L’utilisation des JIP afin de détecter le don mathématique et de stimuler la créativité mathématique ;
- L’utilisation des JIP afin de détecter le don d’inventivité et de stimuler la créativité correspondante.
L’individu créatif garde en état de fonctionnement et développe les qualités précieuses propres à beaucoup d’enfants qui ont souvent une vive imagination et la flexibilité mentale. Il importe de donner à la créativité de l’enfant un prétexte, un départ, une incitation. Le Système JIP met en avant un jeu, le JIPTO de base, et utilise la richesse du métajeu JIPTO, composé de jeux très variés, afin de développer un centre d'intérêt multiforme, qui permet de stimuler les différentes activités créatives et le travail scolaire des enfants, de tester leurs dons.
Dans le cas du JIPTO de base, nous avons là un jeu de réflexion, qui ne cède en rien aux grands jeux classiques reconnus, tel le jeu de Dames. Les enfants de 4-6 ans ont pour la première fois un vrai jeu intellectuel à leur portée et qui peut les intéresser toute leur vie. Comme les enfants qui jouent bien au JIPTO s’initient facilement aux autres jeux intellectuels, cet enfant, par exemple, peut ensuite s’initier très tôt au jeu d’échecs et devenir un surdoué de ce jeu.
Sur la base de l'intérêt ludique des JIP on peut développer les intérêts sportifs, artistique, technique, mathématique, etc. La possibilité de l’initiation précoce au JIPTO, la diversité de ses versions sur le plateau, des versions du JIPTO sportif et des spectacles-jeux contribuent souvent au développement d’un centre d’intérêt stable.
L’intérêt stable pour le JIPTO, manifesté par une fraction importante des enfants initiés, peut être utilisé ensuite pour attirer l’attention des élèves vers le programme scolaire. William James a expliqué cette possibilité dans les termes suivants :
« Tout objet sans intérêt propre peut en emprunter à un objet intéressant grâce aux associations d’idées qui se forment entre eux. Les deux objets, pour ainsi dire, n’en forment alors plus qu’un : la partie intéressante déverse ses qualités sur le tout … C’est une des preuves les plus étonnantes de la portée et des applications possibles de la loi de l’association des idées. Une idée contamine une autre idée par son intérêt émotionnel dès qu’elles sont associées de manière à former un tout dans l’esprit. Et comme il n’y a pas de limite aux associations dans lesquelles une idée intéressante peut entrer, on voit de combien de manières variées l’intérêt dérivé peut être produit. » (Leif, Blancheri, 1966, p.261-262).

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