4.1. Léducation
des enfants doués
Les enfants particulièrement
doués ne sont pas forcément en tête quand
on leur propose les tests classiques dintelligence, ils
ne brillent pas toujours dans leurs études, les notes
scolaires ne correspondent pas à leur avance intellectuelle
réelle. La question de léducation des enfants
surdoués est capitale pour léducation en
général.
4.1.1. Les enfants surdoués
Rémy Chauvin note que
les enfants surdoués sont une « ressource naturelle
inexploitée, dont limportance peut être plus
grande que la bombe atomique : et malheur à la nation
qui le négligera ».
Le douement peut se manifester de la façon plus ou moins
évidente. Les experts d Eurotalent soulignent
que les termes « douement » et « talent »,
ou leur équivalent ne sont pas interchangeables :
« Le douement a trait à une propriété
psychologique de lindividu décelable de façon
relativement scientifique au sens où, fréquemment,
elle nest pas spontanément, naïvement, reconnue
comme telle : ni par lentourage, ni même par
lintéressé, ou par lun des deux seulement
En revanche, le talent concerne une caractérisation psycho-sociale
constituée et admise par tout ou partie dune société,
à un moment donné de son histoire, pour désigner
des capacités actuelles quon a tendance à
prendre pour une réalité objective. Le douement
a trait à une possibilité de réalisation
conditionnelle, il nest décelable que par des indices
certes comportementaux, (performanciels de ce point de vu) mais
quil a fallu ou quil faut découvrir ou inventer,
généralement en dehors de toute utilité
manifeste de leur accomplissement. Le talent est une manifestation
de réussite, déjà admise au moins localement
et temporairement de façon publique ou extrascientifique,
dans un champ donné de lactivité humaine
où elle est appréciée comme un apport et
à travers un consensus.»
Ellen Winner (Université de Havard) emploie le terme surdoué
pour désigner des enfants « présentant les
trois caractéristiques atypiques suivantes »:
« 1. La précocité. Les enfants surdoués
sont précoces. Ils font leurs premiers pas dans la maîtrise
dun domaine plus tôt que les autres. Ils font aussi
des progrès plus rapides dans ce domaine que les autres
enfants, parce que lapprentissage nest pas un effort
pour eux. Par domaine, jentends un champ organisé
de connaissances tel que le langage, les mathématiques,
la musique, lart, les échecs, le bridge, le ballet,
la gymnastique, le tennis ou le patinage.
Une insistance à se débrouiller seuls. Les enfants
surdoués napprennent pas seulement plus vite que
les enfants ordinaires ou même brillants, mais aussi dune
manière qualitativement différente. Ils se débrouillent
seuls : il leur faut un minimum daide ou dencadrement
de la part des adultes pour atteindre la maîtrise de leur
domaine et, la plupart du temps, ils sont à eux-mêmes
leur propre professeur. Les découvertes quils font
dans leur domaine sont excitantes et motivantes, et chaque étape
les conduit naturellement à aborder la suivante. Souvent,
ces enfants inventent eux-mêmes certaines règles
du domaine en question et imaginent des manières inédites
et personnelles de résoudre les problèmes quils
rencontrent. Cela signifie que les enfants surdoués sont
par définition créatifs
La rage de maîtriser. Les enfants surdoués sont
intrinsèquement motivés pour donner un sens au
domaine où se manifeste leur précocité.
Ils font preuve dun intérêt intense et obsessionnel,
dune faculté de concentration extrême et de
ce que jen suis venue à appeler la « rage
de maîtriser »
»
Le JIPTO est aussi un domaine
comme les échecs et le bridge. Nous constatons lexistence
de nombreux enfants surdoués dans le domaine du JIPTO
qui satisfont aux trois critères de Winner.
Ces critères laissent pourtant à part beaucoup
denfants motivés et capables de travailler dur.
Nous préférons utiliser lexpression « les
enfants doués » qui nest pas réservée
à une petite minorité de la population car le douement
est une propriété psychique générale
des êtres humains.
Nous centrerons létude sur les domaines : douement
artistique et littéraire, douement mathématique,
douement dinventivité ou de découverte, ainsi
que le douement sociorelationnel (organisateur, art de communication).
Ces domaines attirent les enfants et ne nécessitent pas
une vaste accumulation des connaissances.
Utilisons les critères de Winner aux enfants doués
pour le JIPTO. Aujourdhui quand plusieurs dizaines de milliers
de jeunes enfants sont initiés aux JIPTO de base, nous
constatons :
- les règles du JIPTO de base sont faciles pratiquement
pour tous les enfants de 6 ans ;
- les règles du JIPTO de base ne sont pas difficiles pour
la majorité des enfants de 5 ans ;
- les règles du JIPTO de base sont à la portée
dune minorité denfants de 4 ans et des enfants
plus jeunes.
Ainsi daprès le
critère de précocité les enfants surdoués
au JIPTO doivent être capables de jouer au JIPTO de base
au plus tard à 5 ans, les enfants qui font leurs premiers
pas dans la maîtrise du JIPTO plus tôt satisfont
au premier critère de Winner. Ces enfants doivent commencer
à jouer bien avec un minimum daide ou dencadrement
de la part des adultes (une insistance à se débrouiller
seuls). Ils doivent faire preuve dun intérêt
intense et obsessionnel pour le JIPTO de base, dune faculté
de concentration extrême et de la « rage de maîtriser
», qui consiste dans la recherche permanente des meilleures
stratégies dans le JIPTO de base et après dans
les autres versions du JIPTO. En Yakoutie, cet intérêt
intense est renforcé par lintérêt des
adultes pour le JIPTO de base, par lutilisation des kits
du JIPTO de belle esthétique avec des couleurs vivantes,
par lorganisation des JIPTO théâtralisés
et des autres manifestations.
4.1.2. La question de léducation
des enfants doués
Utilisons les idées
principales, exprimées dans la « Recommandation
1248 » relative à léducation des
enfants surdoués par lAssemblée Parlementaire
du Conseil de lEurope (Session 1994), pour lanalyse
de létat léducation des enfants doués.
Les spécialistes dEurotalent considèrent
que ce document « constitue une avancée sans
précédent dans le domaine de léducation
de ces enfants » (Eurotalent, 1998, p. 25).
I. Les enfants surdoués, comme les autres enfants, ont
besoin dun système scolaire adapté qui leur
permette daller au bout de leurs possibilités.
Winner décrit les débats sur la scolarisation des
enfants surdoués dans les termes suivants :
« Les partisans dun enseignement spécialisé
pour les surdoués différent sur la question de
lenseignement « enrichi » ou « accéléré »
que les élèves surdoués devraient recevoir,
sil faut mettre ensemble dans les classes spéciales
avec les enfants dâge et de talent équivalent
ou bien sil faut les placer avec les enfants plus âgés
en leur faisant sauter les classes. Mais ces dissensions dans
le camp des partisans de léducation pour surdoués
sont peu de chose par rapport au débat virulent qui les
oppose aux adversaires dune forme déducation
spécialisée pour surdoués. Chaque parti
est fermement persuadé quil a raison, et que lautre
est moralement tort. Chaque parti croit quil se préoccupe
du sort de tous les enfants alors que lautre ne sintéresse
quà certains. » (Winner, 1997, p. 266).
II. La recherche fondamentale sur la notion de « don »
et de « talent », et de la recherche appliquée,
par exemple pour améliorer les procédures de détection,
devraient être développées parallèlement.
Les tests de Q.I. (Quotient Intellectuel) restent un outil essentiel
lorsquil sagit de penser et mesurer le don... Winer
note :
« Au cours des dix dernières années, un groupe
restreint mais remarqué de chercheurs a commencé
à remettre en cause léquation entre le don
exceptionnel et le QI élevé. Ils se fondent sur
une étude de prodiges menée par les psychologues
du développement David Feldman et Lynn Goldsmith. Ces
prodiges, qui atteignaient un niveau de performance adulte dans
le domaine des échecs, de la musique, des maths ou de
lécriture nétaient pas du tout avancés
dans dautres domaines. On rencontre un scepticisme, croissant
quant à la pertinence des tests dintelligence générale.
Certains commencent même à remettre en cause le
test de QI en tant quindicateur général du
fonctionnement intellectuel. Les chercheurs commencent à
voir que le don et le QI sont deux choses distinctes, et quune
personne peut être très douée dans un domaine
sans présenter pour autant un QI général
élevé. Nous nous approchons ainsi dune vision
plus large, multidimensionnelle de ce que signifie la condition
de surdoué. » (Winner, 1997, p.46).
On voit ces dernières années une prolifération
de nouveaux tests et de nouvelles définitions du don.
Nous utilisons, nous aussi, le JIPTO comme un test qui permet
de détecter les enfants capables de concentration et d'activités
intellectuelles intenses.
III. Les programmes de formation continue des enseignants doivent
prévoir des stratégies de détection des
enfants ayant de grandes capacités ou un talent spécial.
Les enseignants ont une tendance naturelle à qualifier
de « surdoués scolaires » leurs
bons élèves, mais : « Le succès
scolaire est déjà une variété de
prétalent plutôt que le douement » (Eurotalent,
1998, p. 20). Pourtant dans les domaines concrets qui nous intéressent :
douement artistique et littéraire, douement mathématique,
douement dinventivité ou de découverte, le
douement sociorelationnel, les jugements des enseignants, des
parents et des camarades décoles sont assez valables.
Il sagit surtout des domaines régis par des règles
strictes comme les mathématiques et le dessin réalistes.
IV. Les dispositions en faveur des enfants surdoués dans
une matière donnée, doivent de préférence,
être mises en place au sein du système scolaire
normal, à partir du niveau préscolaire. Les programmes
souples, laccroissement des possibilités de mobilité,
le matériel supplémentaire denrichissement,
les auxiliaires audiovisuels et lenseignement orienté
vers les projets sont les moyens et les techniques permettant
de favoriser le développement de tous les enfants.
Nous donnons la préférence à léducation
enrichie et approfondie sans nier pourtant catégoriquement
les avantages de léducation accélérée
qui sont formulées par Terrassier comme une réponse
à la question : « Pourquoi lavance
scolaire ? » :
« Dabord et surtout pour respecter le développement
naturel de lenfant surdoué. Il ne peut être
légitime de retarder le développement dun
enfant sous prétexte que dautres enfants ne se développent
pas au même rythme.
Parce quun enfant souffre dun environnement culturel
et scolaire appauvri, insuffisant par rapport à son stade
de développement. Nous savons que la qualité culturelle
de lenvironnement a une incidence importante sur lévolution
dun enfant. » (Terrassier, 1995, p. 71).
Dans la situation des classes hétérogènes
les professeurs et instituteurs doivent essayer de diversifier
leur enseignement afin de répondre aux besoins de chaque
élève :
« Une véritable différentiation qui
respecte le rythme dacquisition de chaque enfant sera sans
doute un objectif dévolu aux moyens électroniques
denseignement individualisé qui se répandront
bientôt en France et viendront compenser, à leur
façon bien sûr, une carence de notre système
éducatif. Les enfants précoces pourront alors pousser
leur interlocuteur électronique aussi loin quils
sont capables et auront envie de comprendre et dapprendre
» (Ibid, p. 99).
Cest pourquoi, la FIDJIP développe le « Monde
du JIPTO » sur lInternet (www.jipto.com, www.jipto.ru)
et les CD-Rom sur le Système JIP.
4.1.3. Lapplication
du Système JIP
Afin dadapter le Système
JIP à léducation des enfants doués,
nous le reformulons de façon suivante :
- Linitiation précoce au JIPTO de base afin de détecter
et de favoriser le don pour les jeux intellectuels ;
- Lutilisation du JIPTO afin de stimuler la créativité
artistique et littéraire ;
- Lutilisation des JIP comme jeux de simulation afin daugmenter
lefficacité de léducation scientifique
;
- Lorganisation des compétitions afin de détecter
et favoriser le don socioculturel (organisateur, arbitral
)
;
- Lutilisation des JIP afin de détecter le don mathématique
et de stimuler la créativité mathématique
;
- Lutilisation des JIP afin de détecter le don dinventivité
et de stimuler la créativité correspondante.
Lindividu créatif garde en état de fonctionnement
et développe les qualités précieuses propres
à beaucoup denfants qui ont souvent une vive imagination
et la flexibilité mentale. Il importe de donner à
la créativité de lenfant un prétexte,
un départ, une incitation. Le Système JIP met en
avant un jeu, le JIPTO de base, et utilise la richesse du métajeu
JIPTO, composé de jeux très variés, afin
de développer un centre d'intérêt multiforme,
qui permet de stimuler les différentes activités
créatives et le travail scolaire des enfants, de tester
leurs dons.
Dans le cas du JIPTO de base, nous avons là un jeu de
réflexion, qui ne cède en rien aux grands jeux
classiques reconnus, tel le jeu de Dames. Les enfants de 4-6
ans ont pour la première fois un vrai jeu intellectuel
à leur portée et qui peut les intéresser
toute leur vie. Comme les enfants qui jouent bien au JIPTO sinitient
facilement aux autres jeux intellectuels, cet enfant, par exemple,
peut ensuite sinitier très tôt au jeu déchecs
et devenir un surdoué de ce jeu.
Sur la base de l'intérêt ludique des JIP on peut
développer les intérêts sportifs, artistique,
technique, mathématique, etc. La possibilité de
linitiation précoce au JIPTO, la diversité
de ses versions sur le plateau, des versions du JIPTO sportif
et des spectacles-jeux contribuent souvent au développement
dun centre dintérêt stable.
Lintérêt stable pour le JIPTO, manifesté
par une fraction importante des enfants initiés, peut
être utilisé ensuite pour attirer lattention
des élèves vers le programme scolaire. William
James a expliqué cette possibilité dans les termes
suivants :
« Tout objet sans intérêt propre peut en emprunter
à un objet intéressant grâce aux associations
didées qui se forment entre eux. Les deux objets,
pour ainsi dire, nen forment alors plus quun : la
partie intéressante déverse ses qualités
sur le tout
Cest une des preuves les plus étonnantes
de la portée et des applications possibles de la loi de
lassociation des idées. Une idée contamine
une autre idée par son intérêt émotionnel
dès quelles sont associées de manière
à former un tout dans lesprit. Et comme il ny
a pas de limite aux associations dans lesquelles une idée
intéressante peut entrer, on voit de combien de manières
variées lintérêt dérivé
peut être produit. » (Leif, Blancheri, 1966, p.261-262). |