Extrait du livre ‘Lo toupin de la Marietà’
de Luc de Goustine
‘……………nous nous rendrons
d’abord à Chauzeix, village de la commune de Saint-Augustin,
vieux bourg des Monédières, où Gabrielle – c’est
le nom de son baptême- naît en 1865 ; ses parents,
Léonard et Catherine, cultivent là un petit domaine qui
leur appartient, certes, mais qui ne saurait nourrir plusieurs couples.
…………la Mariétà
n’a pas encore ses dix-huit ans qu’elle est donnée en mariage
à Jean-Baptiste, cadet d’une famille paysanne voisine, des
Gouttes de Madranges, et qui donc laissera à l’aîné
l’exploitation paternelle pour « aller gendre ». Comme il
est coutume dans ce temps, les futurs échangent par contrat, les
12 et 20 novembre 1882, promesse de dot, avancement d’hoirie et
donation préciputaire, mais le point qui nous intéresse
est le suivant : les époux futurs demeureront chez les parents
de la fille qui s’obligent de les loger, nourrir, entretenir, soigner,
blanchir, chauffer et éclairer, tant en santé qu’en
maladie, ainsi que les enfants qui naîtront de leur union,
à charge pour eux tous de travailler au profit des dits parents.
Certes il est prévu que
le futur époux (qui tiendra à son profit dix brebis
mères dans le troupeau) pourra travailler pour son compte
personnel pendant six mois de chaque année, du premier novembre
au premier mai, et profitera exclusivement du produit de ce travail…
Mais voici qu’un bail de
meubles, dressé cinq ans plus tard ( la Mariétà a
déjà mis au monde deux enfants dont la seconde , Marie,
survivra) entre le père Léonard, et Baptistou, le gendre,
démontre l’insuffisance du domaine de Chauzeix, et peut
être la fatigue des vieux parents, puisque voilà le gendre
qui s’émancipe et qui prend en ferme à son nom un domaine
sis au chef lieu de la commune de Murat où n’ayant pas de quoi
se meubler, il passe bail à son beau-père des meubles et
objets mobiliers appartenant à ce dernier ; parmi lesquels nous
relèverons : deux bois de lit, trois marmites, une
brasière, une autre marmite, un seau en fer blanc, une baratte,
huit chaises en paille, dix-huit draps de lit, sept serviettes, un drap
vulgo balin, quatre sacs, une armoire, deux coffres, une huche et une
table, un chaudron en fonte, deux chenets, quarante – huit hectolitres
de châtaignes, un hectolitre de blé noir et quatre
hectolitres quatre-vingt litres de blé noir sauvage, dix-huit
hectolitres quarante litres de blé…et la condition, inverse du
contrat précédent, et cette fois l’obligation pour
Jean-Baptiste, de loger, nourrir, soigner et entretenir , en
santé seulement (preuve que Léonard avait
conservé la propriété de Chauzeix et en touchait
le fermage.), Léonard et Catherine, les parents de sa femme,
à charge toutefois pour ces derniers de travailler à son
profit.
Ainsi va la ronde des
générations et commence vraiment pour la
Mariétà, en 1887, le premier établissement
indépendant. De Murat à la Goutte, à Vedrenne,
à Bouchard, à Espagne, au Bourneix, à Sounit, la
ronde se poursuivra, mais, on le voit déjà ressortir de
l’inventaire, les denrées de base d’une subsistance paysanne et
limousine sont rassemblées : les châtaignes, le blé
noir et le seigle, et les ustensiles : marmites, brasière,
baratte, chaudron de fonte , ce valeureux topin dont nous avons ici
pieusement retenu la forme symbolique.
C’est que ,voyez vous ,ce
symbole est vérité pure : pendant que s’arrondissent, au
fil des moissons, des retours de saison aux Landes de Baptistou, le
scieur de long, et des déménagements successifs, les
flancs de la Mariétà autour de François,
d’Antoine, de Maria, d’Anna et enfin d’Eugénie, il faut bien
que, sur la pierre fogière, entre les chenets
susmentionnés, s’arrondissent également autour de la
pitance commune les flancs du topin symbolique.
|