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De la case au béton L'histoire

de la Martinique, au XX` siècle, a incontestablement été marquée par l'éruption de la Montagne Pelée et la loi de départementalisation. L'habitat n'échappe pas à des influences de ces deux événements.

Le 8 mai 1902, d'une part, le volcan a définitivement englouti une ville construite en magnifiques pierres de taille. D'un point de vue architecturalSaint-Pierre n'aura jamais plus son pareil. La catastrophe donnera alors naissance à une ville bâtie dans l'urgence, par des charpentiers : Fort-de-France .L'habitat au cours de ce siècle a, d'autre part, ètè scindé en en deux époques : l'avant et l'après 1945. Au sortir de la seconde Guerre mondiale, le béton s'est imposé, révolutionnant. Les techniques de construction, donnant notamment naissance à des quartiers de la banlieue de Fort-deFrance tels que Sainte -Catherine, Volga-Plage ouTrénelle. " Les petits et . immeubles et les maisons individuelles réunies dans le lotissement de Sainte Catherine, sont un exemple l'architecture moderniste en béton de l'époque ", souligne Lucien Cidalise Montaise, architecte. À la campagne, à côté des cases et des maisons créoles, les logements sociaux ont commencé à s'ériger un peu partout à partir de 1954. A cet égard, Lucien Cidalise Montaise juge que ces constructions " n'ont pas toujours répondu aux aspirations profondes des Antillais mais aux besoins immédiats. La cuisine intégrée dans le logement par exemple, est une notion purement européenne. Une chose est sûre, avec ses avancées et ses défauts, le béton a constitué une étape importante, sinon essentielle de l'évolution de l'habitat au cours de ce siècle.

" On a construit Volga de nos propres mains "

Le quartier de VolgaPlage, à Fort-de-France, est né dans les années 1950. Molière Gustave y a construit sa maison actuelle à cette époque. C'était l'ère naissante des maisons en dur dans les banlieues de Fort-de-France.

" Ma femme et moi nous sommes installés à Volga-Plage à la fin des années 1950. Le quartier était comme une mangrove. Il y avait de la boue et des arbres qu'on appelle "Bois-Mangue". On voyait quelques habitations en fibrociment recouvertes de tôles ondulées. Toutes les maisons du plateau étaient sur pilotis parce que, en fonction des lunes, la marée montait jusqu'ici. " " J'ai fait construire ma maison à cette époque. Elle était comme les autres, sur pilotis et faite de fibrociment et de tôles ondulées. On a aussi utilisé beaucoup de bois pour les menuiseries et le sol. On mettait sur le plancher du linoléum, du gerflex comme on dit aujourd'hui, pour faire beau et pour empêcher l'humidité de remonter.

Ma maison avait un séjour, deux chambres et une petite cuisine à l'extérieur. Franchement, c'était la plus belle petite maison en febrociment du quartier. " " En ce temps-là, on n'avait pas, les commodités d'aujourd'hui. Il fallait aller chercher l'eau à la tannerie. C'était le seul point d'eau du quartier. Comme les toilettes modernes n'existaient pas, on devait charrier les seaux hygiéniques jusqu'à la rivière. Pour la salle de bain, j'avais installé des fûts couchés, attachés sous le plafond. Ils étaient alimentés pur l'eau de pluie qui était guidée par une gouttière. Comme ça, on avait une douche. C'était pratique. " Le meilleur souvenir que j'ai du quartier à cette époque, c'est la formidable ambiance qui y régnait. Volga était un lieu d'amour. Tout était fait par coups de main. On s'entraidait tout le temps. Par exemple, quand j'ai bati ma maison 25 camarades de Volga ont travaillé avec moi. Quand il fallait remblayer ou tracer un chemin, tout le monde s'y mettait. On a tous ensemble sorti Volga de la Mangrove. On a construit Volga de nos propres mains.

 

 

" Les travailleurs vivaient dans des cases très bien entretenues "

Éva Valérius-Laurent habite, depuis près de 70 ans, une modeste maison située à la sortie de Petit-Bourg, sur la commune de Rivière-Salée. Toute son enfance, cette nonagénaire l'a passée ailleurs, dans une maison de géreur d'habitation. Souvenirs. "

Mon papa était le géreur de l'habitation Féral, à Petit-Bourg. J'ai vécu toute mon enfance dans cette maison de bourgeois. C'était dans les années 1910-1920. Les murs de la maison étaient en dur et le toit en tuiles. Comme le carrelage n'existait pas encore, le sol était en grosses pierres maçonnées. Il avait la couleur des "roches la riviè". À l'intérieur, des cloisons séparaient quatre chambres. Deux autres chambres se trouvaient à l'extérieur, pour les servantes. On avait aussi une salle de séjour. C'est là que l'on recevait et que l'on vivait. Mon papa avait également un bureau. C'était son sanctuaire. Juste devant la maison principale, il y avait une petite boutique pour les travailleurs de la canne et, à côté, les deux pièces de la cuisine. " " Le changement qui a été le plus important pour moi, c'est au niveau des installations sanitaires. À l'époque, on n'avait pas de < waters" mais "an pot chamb la poteri>. Grâce à une citerne, on recueillait l'eau de pluie. Et puis, la salle de bain, si on peut l'appeler comme ça, c'était un petit trou où tout le monde allait se baigner. On se lavait avec une casserole d'eau. L'hygiène, chez nous, ça a été progressif. " " Les travailleurs vivaient aussi sur la plantation, dans des cases qui étaient très bien entretenues. Elles avaient des cloisons en briques et des toits en tuiles. Il y avait un dizaine de lots de deux cases mitoyennes. Chaque case était composée d'une seule pièce, mais ils la coupaient en deux avec des tentures, pour séparer les enfants des grandes personnes

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