La musique rythme la viePersonne ne pourra le nier, la vie sociale, politique, culturelle et évidemment économique du siècle qui s'achève a été rythmée par la musique. De l'époque de Saint-Pierre à nos jours, des chansons ont marqué les esprits. Nous avons en mémoire " moin décendre Saint-Pierre " Périnelle, ho ! ", " La rue Zabine " . Leurs auteurs ont fait battre nos curs. On peut citer parmi ceux qui ont gravé de leur empreinte le siècle, des noms tels que Léona Gabriel, Alexandre Fructueux, dit Stellio, l'étoile, l'homme à la clarinette, Ernest Léardée, Eugène Delouche ou encore plus près de nous Ti-Emile ou Eugène Mona... La musique se réfère également à quelques grandes époques. Les années vingt où toute la jeunesse martiniquaise émigrée vibrera au rythme du fameux bal nègre, les années trente qui permettent de danser le fox-trot, le slow fox, le jazz. En 1935 on se délecte des dernières chansons de Léona Gabriel. L'après-guerre est marquée par la naissance des grandes formations. C'est aussi la mode de la samba brésilienne, suivie d'une vague de musique latine et cubaine avec les autres mambos, boléros, cha-cha-cha, guaracha et meringués. Ces musiques sont jouées dans des paillotes qui drainent des foules de 1000 à 3000 danseurs chaque samedi et parfois le dimanche de 11 heures à 15 heures au cours des fameux " punch en musique ". Le Printania, à Sainte-Marie, et la Bananeraie, au Lamentin, évoquent bien des souvenirs. C'est en plein boum des paillotes que la musique haïtienne fait son entrée à la Martinique. Le compas réveille l'amour propre des musiciens Martiniquais qui donneront naissance à notre fameux zouk vers 1963 et l'apogée des orchestres tels Play-Boy, les Vickings, la Perfecta, Les Léopards, Simon Jurad et bien entendu Kassav'...
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Fernand Donatien " Il faut revenir à nos sources "Fernand Donatien, aujourd'hui âgé de 77 ans, est un célèbre auteur compositeur a qui l'on doit plusieurs succès. Parallèlement à sa carrière d'enseignant (professeur de musique), il a pu composer de nombreuses chansons qui lui ont permis de remporter des premiers prix dont celui de la chanson créole dès 1948. A la tête de l'orchestre " Stardust ", il a bâti 20 ans de succès et plusieurs chanteurs ont interprété ses uvres. Nous l'avons interrogé et, pour lui, la référence c'est Victor Coridun qui a pu exhumer des cendres de Saint-Pierre les chansons oubliées. Selon lui, c'est ce musicien et d'autres tels que Stellio, Léona Gabriel, Ernest Léardée, Archange Saint-Hilaire, Victor Colat, Léon Apanon, Garcin, Orphélien "qu'il faut suivre si l'on veut maintenir la tradition musicale trop souvent assiégée, ballottée, bousculée par des vagues successives de musiques exogènes introduites par des snobisme d'époque". Ses propos sont plutôt sévères, jugez-en plutôt: " Grâce à une certaine prise de conscience, nous sommes revenus à la chanson créole mais, depuis, il y a une marche qui n'est pas très rentable : c'est le reggae, le ragga muffin, une tendance vers la grossièreté, un retour vers les paroles grivoises et on croit que c'est ça la culture. C'est bien entendu pour gagner de l'argent que l'on tombe dans ces travers. Tous ceux qui ont une petite idée quelconque veulent la mettre en musique parce que cela leur paraît facile or ce n'est pas si facile que cela. Composer est un art et écrire des textes en est un autre. Il suffit maintenant de sortir quelques banalités assorties de quelques grossièretés et l'on fait un CD. C'est ce qui permet aux gens maintenant de faire prétendument de la musique. Je suis un peu sévère mais, il y a eu une régression de la musique. On a perdu de vue la vraie chanson créole qui était une chanson événementielle. Elle traduisait les événements en musique. Il faut revenir à une musique plus saine. Heureusement, il y a quelques musiques valables, celles qui reviennent à la tradition, celles gui sont de la créativité et qui donnent une mélodie, un texte et un rythme. Il y a également, il faut le reconnaître, de bons zouks, mais dans la généralité le zouk ne témoigne que d'une seule chose l'absence de créativité,. Si nous n'avons plus de grands noms tels que Stellio et Léardée, c'est qu'il n'y a pas de formation. Tout le monde se présente comme musicien c'est une donnée de l'époque. On ne cherche pas à se former; on cherche plutôt à paraître, à produire dans un but commercial. On ne sait pas faire deux accords mais on fait un CD. Il faut éviter les erreurs du passé et s'appuyer sur ce qu'il avait de bon. Notre musique nous vient de Saint-Pierre. Elle a été traduite par Victor Coridun. C'était une musique métissée avec l'apport africain et l'apport européen. La musique Martiniquaise est née de la conjonction de ses deux musiques. C'est ce qui a donné la biguine, la mazurka. On a eu tendance tantôt de privilégier la musique européenne, tantôt comme c'est le cas maintenant de ne voir comme musique locale que celle venant d'Afrique c'est-à-dire Bel-air, Ladjia, ce qui est une autre erreur. Nous sommes des métis nous devons assurer notre culture syncrétique. l! faut que nous revenions à nos sources ". |
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