II. Poètes de la révolution et ingénieurs des âmes

Lounatcharski, un intellectuel parmi les bolchéviques

Le Narkompros

La naissance du réalisme socialiste

 

La naissance du réalisme socialiste

L' ingénieur des âmes
L
e 2 octobre 1920, dans sa Résolution du Congrès du Proletkult de toutes les Russies, Lénine affirme une nouvelle fois que les forces politiques et celles de l'art doivent s'unir pour faire triompher la dictature du prolétariat. Le mot avant-garde est utilisé ici, non pas en référence aux artistes, mais au Parti communiste en tant qu' avant-garde du prolétariat:
"...le prolétariat aussi bien dans la forme de son avant-garde, le parti communiste, que dans la forme de la masse toute entière des diverses organisations prolétariennes doit coopérer de manière particulièrement active et essentiellement à l'éducation générale du peuple. "
Lénine ne fait que reprendre ici son discours de 1905, " L'organisation du Parti et la littérature du Parti ", où il définit déjà les intellectuels communistes comme l'avant-garde de la classe ouvrière chargée de faire fonctionner à l'intérieur du mécanisme social la " petite roue " et la " petite vis " de la littérature :
" La littérature doit devenir une partie de la cause générale du prolétariat, " une petite roue et une petite vis " dans le mécanisme social-démocrate, un et indivisible, mis en mouvement par toute l'avant-garde consciente de la classe ouvrière. "
Historiquement, le terme avant-garde apparaît pour la première fois Russie en 1863 sous la plume du philosophe Herzen dans un sens péjoratif pour décrire l'expansion des valeurs bourgeoises en Russie. Avec la Première Guerre Mondiale, le public se familiarise avec les noms d' avant-gardes et d'arrière-gardes militaires. Les mouvements cubo-futuristes avec leur goût prononcé pour la bravoure, l'exploration, l'action, l'agression, sont associés par le public au phénomène militaire. Mais beaucoup d'artistes sont aussi appelés au front ou font un long service militaire. L'armée fait partie du paysage commun de l'époque. Un passage de la lettre de Malévitch à Alexandre Benois, écrite en 1916 en plein guerre, illustre bien cette utilisation de la terminologie militaire dans les débats artistiques:
" Et il me semble que votre reproche selon lequel ma philosophie ressemble à celle qui souffle des millions de vie est erroné. Ne ressemblez-vous pas tous au tir qui bloque et empêche tout mouvement? "
Mais dans la Russie du début du 20ème siècle, ni les artistes modernes, ni leurs détracteurs, n'utilisaient explicitement le terme d' " avant-garde " avant les années 1920 sauf Malévitch et les membres de l'Ounovis. C'est dans " L'architecture comme gifle au béton armé ", un article d'avril 1918 de la revue Anarchie repris en décembre 1918 dans " L'Art de la Commune ", que Malévitch donne pour la première fois le nom d' " avant-garde " au mouvement artistique qui lutte contre le blocage de l'art dans le passéisme :
" L'art a avancé ses avant-gardes en les faisant sortir des tunnels des temps passés ".
L'emploi de ce terme d'avant-garde devient fréquent après la résolution de Lénine de 1920 où le terme d' " avant-garde " figure pour définir le Parti par rapport aux masses. En occident, l'appellation " avant-garde est introduite " par Camilla Gray en 1962 . Il s'applique actuellement couramment aux expériences culturelles russes et soviétiques des années 1910 et 1920, mais il est aussi fréquemment employé dans un sens plus large, aux phénomènes culturels s'écartant de la norme réaliste ou même à l'ère du modernisme qui s'étend de 1890 aux années 1930 .
Pour contrer l'initiative de Lénine, Bogdanov définit dans un article de 1920 " Les voies de la création prolétarienne " paru dans la revue " Culture prolétaire " les grandes lignes d'un nouvel art rompant avec les concepts de l'art bourgeois. Dans sa volonté de créer une nouvelle culture prolétarienne, Bogdanov pensait abolir la séparation entre travail et création. Sans être de nature différente, la création serait simplement la forme la plus élevée et la plus complexe du travail et cesserait donc par là d'être un fétiche mystique. En effet, lorsque le travail cesse d'avoir un caractère collectif et devient une activité individuelle, c'est à dire lorsqu'il est fait par une seule personne et qu'il est en soi-même son propre but, alors, il est création. Ainsi, le travail, tout comme la création se décomposent en deux stades: premièrement, la combinaison des éléments matériels dans le travail physique et des images dans l'activité spirituelle, deuxièmement, la sélection des résultats, avec l'élimination des éléments indésirables et la conservation des éléments appropriés. La science organisationnelle permet pour Bogdanov le passage de la structure familiale autoritaire (qu'elle soit bourgeoise ou paysanne) à un " collectivisme conscient " fondé sur les relations de camaraderie et d'entr'aide mutuelle. Elle favorise la compréhension entre peuples. Dans le domaine artistique, on quitte les anciennes méthodes hasardeuses fondées sur l' inspiration et l'art devient un outil de prédilection pour transformer la vie qui implique cependant l'abandon de l'individualité. L'originalité devient alors la faculté pour l'artiste de comprendre l'expérience collective et sa participation active à la création de cette totalité. L'objectivité remplace l'inspiration. L'art cesse alors d'être une méthode isolée des autres techniques. Il est désormais sur le même plan que toute forme de travail ou de science, et les trois domaines entrent en interactivité. Par conséquent, l'art peut s'appliquer à n'importe laquelle de ces formes, travail ou science, et inversement, le travail et la science peuvent s'appliquer à l'art. Cette conception " futuriste " et utilitaire de l'art, au sens où il s'appuie sur le monde industriel et propose d'effacer les frontières entre les disciplines, a probablement servi de base de réflexion à la tendance constructiviste dont le premier groupe est fondé le 13 décembre 1920.

Lénine avait défini en 1905 les intellectuels communistes comme l'avant-garde de la classe ouvrière chargée de faire fonctionner à l'intérieur du mécanisme social la " petite roue " et la " petite vis " de la littérature. Il introduisait ici l'idée d'un art fondé sur des notions d'inginérie. Cette idée sera reprise par Staline dans son concept d' " ingénieur des âmes " et se concrétisera dans les années 1930 avec la doctrine du réalisme-socialiste. Lénine voyait l'art d'une manière pragmatique et illustrative. Le 12 avril 1918, il fera publier par le Comité Central du Parti un décret sur le démantèlement des monuments élevés en l'honneur des Tsars et de leurs valets. Ces monuments seront purement et simplement remplacés par des " monuments en hommage aux grandes figures de l'activisme social et révolutionnaire " comme le stipule le décret sur la propagande monumentale paru deux jours plus tard, le 14 avril 1918 et visant à ériger des " monuments en hommage aux grandes figures de l'activisme social et révolutionnaire ". Lénine sera particulièrement irrité lorsque Lounatcharski autorisera les futuristes à décorer les villes pour la célébration de l'anniversaire de la révolution en 1918 et de dessiner les monuments pour les héros révolutionnaires du passé. Il détestait les monuments cubistes et futuristes les considérant comme tournant en dérision et déformant la notion originelle de célébration de la tradition révolutionnaire et en fera grief à Lounatcharski. Il prendra particulièrement mal le fait que les futuristes aient peint d'une peinture indélébile les arbres des jardins du Kremlin pour le 1er mai.
L'initiative de Lénine d'ériger des monuments aux grandes figures sociales n'était pas originale puisqu'elle était calquée sur la politique des arts de la Révolution française. Elle rappelait le décret du 11 août 1792 qui, pour prévenir le risque de destruction du patrimoine par le peuple, avait ordonné que les statues rappelant le règne du despotisme soient enlevées, conservées et remplacées par des monuments en l'honneur de la liberté . Mais l'application dans la Russie du 20ème siècle d'un principe révolutionnaire de la fin du 18ème siècle prenait un tout autre sens. Contrairement aux français pour qui les arts appartenaient à la philosophie et l'artiste représentait le prototype de l'homme libre, les Russes considéraient les arts plastiques comme dépendants de la littérature. Influencés par le modèle du peintre d'icônes, pour eux, l'artiste était le prototype du travailleur modèle. L'art réaliste de propagande issu de la politique de Lénine est dénoncé dès 1919 par Malévitch qui critique l'éxagération baroque et la lourdeur de cette sculpture soviétique qui prétend " tomber du ciel " comme les images " non faites de main d'homme ", les " achéiropoïètes " de la religion orthodoxe. Sa description cerne déjà les traits du réalisme socialiste en vigueur pendant plus d'un demi-siècle en Russie:
" Faire des plis sévères sur le front, représenter des mains et des poings de cent kilos chacun- c'est une amusette simple; c'est de cette amusette "acheiropoïète " que sont encombrées les places de Moscou et de Pétrograd. "
Malévitch reproche de considérer la représentation sur le seul plan objectif:
" Représenter un monument n'est pas une tâche photographique. On ne peut pas considérer le représenté uniquement d'un seul côté tout de go, cela, un appareil photographique pourra le faire. "
Il insiste sur l'importance du processus de transformation de la réalité opéré par l'artiste dans le " laboratoire " intérieur de son cerveau:
" Et auparavant, avant le processus de conception, j'assemble en moi, dans le laboratoire intérieur de mon cerveau, les éléments indispensables [..] du processus de conception. "
Pour Malévitch, les artistes conventionnels ne pénètrent pas assez leur sujet et se contentent de restituer une oeuvre hybride, vaguement interprétée:
" C'est pourquoi il en est résulté que les monuments sont à moitié réels, à moitié enduits de la pommade de leur salon de coiffure intérieur inutile. "
On peut considérer ce texte comme la première et une des rares critiques énoncée par des contemporains envers ce néo- réalisme socialiste. Lorsque Lounatcharski cessera de soutenir les artistes modernistes, il reprendra la référence de Lénine à la Révolution française pour justifier l'art de propagande (architecture monumentale populaire destinée à remplacer les temples de l'ancien régime, spectacles pour unir les foules dans une action commune..):
" C'est ce dont la Révolution française rêvait, ce à quoi elle aspirait; c'est ce qui était fait par les gens les plus raffinés de la plus cultivée des démocraties, Athènes; c'est de quoi nous nous approchons déjà. "

Le nationalisme révolutionnaire
C
omment s'est développé ce style qui ne s'appelera qu' à partir de 1934, le "réalisme-socialiste" et qui chassera définitivement de la scène artistique les avant-gardes, dominant la Russie soviétique pendant des décennies ? Après la victoire des bolchéviques, Répine, le "Tolstoï de la peinture russe" avait émigré. Les peintres réalistes rejoignirent tardivement l'IZO où ils furent accueillis sous les risées des " peintres de gauche ":
" Maintenant que la victoire de la classe ouvrière est claire comme le jour, nombre d'artistes qui, l'année dernière encore, grognaient et croassaient comme des corbeaux en prédisant la chute prochaine du communisme sont venus s'excuser. Maintenant ils sont prêts, comme tout le monde , à servir la patrie socialiste sur un pied d'égalité avec tout le monde. Bonne chance camarades retardataires! "
C'est en février 1922 seulement, à Moscou, alors que se tenait la 47ème exposition des Ambulants, que certains membres quittent ce groupe pour fonder l'Association des artistes de la Russie révolutionnaire l' " AKhRR " , " Association des artistes de la Russie révolutionnaire " qui sera le noyau autour duquel se formera l'esthétique connue sous le nom de " réalisme socialiste ". Destinée à contrer l'influence de l'avant-garde artistique proche du pouvoir, l'AKhRR se met à la disposition du Comité Central et dans son manifeste fondateur, énonce le concept de réalisme héroïque:
" Le jour de la révolution, le moment de la révolution, est le jour de l'héroïsme, le moment de l'héroïsme- et maintenant nous devons révéler nos expériences artistiques dans les formes monumentales du style du réalisme héroïque. "
Ce réalisme qui fondait l'art des Ambulants constituait déjà pour des penseurs marxistes comme Plékhanov un modèle esthétique propre à exprimer le matérialisme. Il voyait dans les thèses de Tchernitchevski:
"un essai pour construire une esthétique sur les bases de la philosophie matérialiste."
A cause de sa connotation politique, la peinture des Ambulants était aussi la référence esthétique de Lénine:
" .. la critique marxiste a été formulée en Russie pendant les années entre les deux révolutions, apparaissant dans les écrits de Georges Plekhanov et les articles de Lénine. En pratique, la critique marxiste était une réminiscence du didactisme du 19ème siècle et un retour au goût du milieu du 19ème siècle pour le réalisme, pour la peinture de genre et la musique romantique tardive."
Lounatcharski, déçu par les "futuristes" accepte à présent avec enthousiasme l'offre des peintres réalistes et lance un appel: "retour aux Peredvijniki". Il faut dire que les peintres réalistes s' étaient introduits au coeur même de l'appareil du pouvoir. L' Armée Rouge est leur principal client. Les ressources financières de l' Armée Rouge étaient importantes et mécènent largement l'art réaliste:
"Trotski, commandant en chef de l'armée, Simon Boudionny, le magnifique, et le métallo et futur maréchal Klim Vorochilov furent les premiers mécènes de l'art soviétique. "
Les militaires ne se contentent pas de se faire tirer le portrait. De véritables liens d'amitié se créent. Les peintres de l'AKhRR ont des laissez-passer permanent pour le Kremlin, ils côtoient les hauts responsables de l'Armée et du Parti qui leurs dispensent des conseils amicaux et font leur éducation politique. Les portraits de généraux sont si nombreux à la seconde exposition militaire de 1923, que Trotski demande sous forme de boutade de ne plus faire de portraits de généraux pendant 5 ans. Le PUR, l'Administration politique de l'armée Rouge, disposait de ressources très importantes et commandait de nombreuses oeuvres à l'AKhRR. Lounatcharski, peut-être sur l'impulsion de Trotski et de sa femme Natalia Trotska, qui tenait une partie du Narkompros, songeait d'ailleurs à restructurer le Narkompros sur le modèle du PUR . En 1924, les efforts déployés par l'AKhRR pour des peintures thématiques sur les usines et les campagnes s'étaient déjà soldés par de nombreuses expositions qui avaient amené la fondation du Musée du Conseil Central de l'Union des Syndicats, du Musée de l'Armée Rouge et du Musée de la Marine. Les bureaux d' " agitprop " créés par l'Union soviétique dans dix-sept villes allemandes pour répandre la culture communiste, popularisent en Allemagne vers la fin des années 20 et le début des années 30 le style plastique caractéristique du " réalisme socialiste ".
Le 16 juin 1925, une résolution du Comité Central concernant la littérature, affirme à la fois la pluralité des courants et la nécessité d'élaborer un art compréhensible pour les masses. Cette résolution se recommandait de l' esthétique élaborée par Lénine et dont nous connaissons l'existence par les entretiens à Clara Zedkin en 1920. Bien que l'indépendance de l'artiste ait constitué pour lui une des conditions de l'existence de l'art:
"Tout artiste, et tout individu qui se considère comme tel, a le droit de créer librement en accord avec son idéal personnel, et sans tenir compte de rien d'autre. "
Lénine définissait ainsi la forme dans laquelle devait s'incarner un art de masse :
"Ce qui importe, ce n'est pas ce que l'art apporte à plusieurs centaines, ou même à plusieurs milliers de membres d'une population qui se chiffre en millions. L'art appartient au peuple. Ses racines doivent pénétrer, le plus largement possible, au plus profond du coeur des masses laborieuses. Il doit être compréhensible pour ces masses et être aimé d'elles. "
Mais ces conceptions devaient être connues dès le lendemain de la révolution puisqu'en 1919, Malévitch critique déjà le concept d' art de masse et de propagande. Malévitch propose au contraire un programme d' éducation du public pour qu'il puisse monter son niveau et accéder à la compréhension des nouvelles créations artistiques. Ce sont les figures de Lénine et de Lounatcharski qui sont implicitement visées sous l'appellation " les socialistes les plus cultivés ":
"On exige toujours de l'art qu'il soit compréhensible et jamais on ne s'astreint à adapter sa propre tête à la compréhension et les socialistes les plus cultivés ont pris ce chemin avec cettre même exigence à l'égard de l'art, tel un marchand qui exige des peintres des enseignes qui représentent de façon compréhensible les marchandises qu'il a dans sa boutique. "
Après la mort de Lénine en janvier 1924, le champ était libre pour une réinterprétation par le Comité Central du Parti, qui va forcer le trait sur l'art de masse et gommer la spécificité individuelle de l'artiste. Le Comité Central va déterminer une esthétique précise. Ce sont les techniques du passé, jugées fiables et opérationnelles, qui sont désignées pour forger un art accessible à des " millions de travailleurs ". Mais cette esthétique n'est pas suffisante pour réaliser l'art de masse. Il faut aussi des exécutants standardisés. La résolution de juin 1925 du Comité Central est trop mitigée, et Boukharine, théoricien du Parti, expose quelques temps plus tard dans une rencontre entre artistes, écrivains et savants, une nouvelle conception de l'intellectuel standardisé comme un produit industriel :
" Il est essentiel pour nous que les cadres de l'intelligentsia aient une formation idéologique stricte. Oui, nous allons manufacturer les intellectuels comme des produits fabriqués à la chaîne dans les usines. "

L'AKhRR sera officiellement accréditée par Staline en 1928, lors de sa seule et unique visite d'une exposition artistique. L'AKhRR suit les directives du Parti et prône le caractère national, l'héritage culturel, se défendant de toute approche de type formaliste. L'art réaliste héritier de l'art des Ambulants était comme celui-ci, tributaire du thème littéraire. La littérature occupe dans les arts en Russie une place prépondérante. C'est elle qui fixe l'attitude esthétique, des Ambulants avec la littérature critique au futurisme avec le zaoum en passant par le Monde de l'Art avec le symbolisme. C'est dans un texte sur la littérature que Lénine avait fixé dès 1905 les règles d'un art comme rouage de la société. Staline, étendra cette idée de la " petite roue " et la " petite vis " à une inginérie sociale où il jouera le rôle " d'architecte du communisme " pour transformer les écrivains en "ingénieurs de l'âme humaine ". Cette conception de " l'ingénieur de l'âme " avait déjà été développée au début des années 1920. Alexéi Gastev, membre important du Proletkult et responsable du " TSIT ", l' Institut Central du travail, fondé en 1921, avait déjà forgé le concept " d' inginérie sociale " utilisant l'art comme moyen scientifique pour reconstruire la vie sociale et le psychisme humaine. Les émotions devaient être appréhendées avec des coefficients scientifiques. La notion de psycho-ingénieur avait ensuite été formulée en 1923 par Serge Trétiakov, membre de la LEF , que Staline fera mourir dans un camp mais dont il s'était réapproprié l'idée:
"L'artiste-ouvrier doit se tenir à côté du scientifique comme un psycho-ingénieur, un psycho-constructeur (...) C'est la propagande qui aidera à former des hommes nouveaux, (c'est elle) qui doit constituer le contenu unique et essentiel des oeuvres futuristes. "
En 1932, Staline amalgamant les concepts de Lénine, Gastev, Trétiakov et Boukharine va mettre concrètement ses nouveaux " ingénieurs de l'âme" au service de l'exécution de ses plans de " grand architecte " du communisme. Le 23 avril 1932, il fait liquider officiellement par un décret du Comité Central du Parti Communiste tous les groupements d'artistes et d'écrivains existant en U.R.S.S., et institue des syndicats uniques rassemblant tous les praticiens dans le domaine des arts visuels, de la littérature et de la musique. Le terme de "réalisme socialiste" apparaît pour la première fois le 25 mai 1932 dans la " Literartournaïa Gazeta ". Le 25 juin 1932 est créée l'Union régionale moscovite des artistes soviétiques, suivie de créations similaires dans les autres villes. Ce conglomérat sera regroupé dans l'Union des artistes soviétiques qui deviendra un organe structuré en 1938 sous la férule d'Alexandre Guérassimov dirigeant son Comité exécutif.

Mais la véritable énonciation du réalisme socialiste a eu lieu le 26 octobre 1932. Staline a fait convoquer, sur un coup de téléphone de la Sécurité, un certain nombre d'écrivains triés sur le volet à une réunion secrète à minuit dans l'appartement de Gorki pour mettre au point les principes du réalisme socialiste qu'il avait établi comme fondement de l'art soviétique et les modalités de son application. La discussion consistait surtout à donner la version de Staline du réalisme socialiste comme étant la meilleure interprétation parmi toutes celles de cette assemblée d'intellectuels et à la désigner comme le modèle à suivre:
" Nous savons que lors d'une de ces réunions à huis-clos, Staline prit dix ou quinze fois la défense du terme " réalisme socialiste ". Ses détracteurs souhaitaient nommer la méthode fondamentale de l'art soviétique, " art matérialiste didactique ".
La période comprise entre les premiers jours de la Révolution soviétique et l'avènement du réalisme socialisme se referme alors avec l'exposition, fin 1932, au Musée russe de Léningrad, intitulée "Quinze Ans d'art soviétique". Cette exposition présentait l'évolution de toutes les tendances de l'art soviétique et donc les contributions de l'avant-garde. Mais en juin 1933, la même exposition à Moscou supprime toutes les oeuvres de l'avant-garde. Cette réorganisation est considérée par la voix officielle d'Iskoustvo comme une expérience concluante de la reconnaissance d'un nouveau style soviétique expurgé des scories du passé, c'est à dire des formes d'art n'ayant pas eu d'avenir:
"L'exposition de Moscou voit le formalisme comme quelque chose appartenant à un sombre passé qui se perpétue mais qui n'est plus vivant dans le présent, si on peut dire, et qui n'a pour nous aucune viabilité dans l'avenir. (...) Puisqu'une telle expérience a prouvé qu'on a tout fait pour obtenir un nouveau style soviétique et réorganiser les modes de créativité existant au préalable dans les arts plastiques. "
L'histoire de l'art soviétique sera désormais calquée sur ce modèle révisionniste. La lutte contre le formalisme, nom générique donné à l'art moderne par les staliniens, est déclarée et beaucoup d'oeuvres de l'avant-garde détruites physiquement. En 1933, les revues artistiques sont supprimées et remplacées par le journal Iskousstvo, " Art ", organe du Syndicat des artistes soviétiques, normalisant ainsi la critique d'art. Lounatcharski déclenche une seconde vague de propagande monumentale, mais qui devait cette fois célébrer des personnalités vivantes. 1934 est une date importante, car c'est à ce moment que la doctrine du " réalisme socialiste " a été officiellement proclamée au Premier Congrès de L'Union des Ecrivains Soviétiques par Andréï Idanov, un des grands responsables de la liquidation des libertés en Russie. L'Union, créée en 1932, ne tint son premier congrès à Moscou qu'en août 1934 sous la direction de Maxime Gorki qui, ayant quitté la Russie soviétique depuis 1921 pour rejoindre l' Italie mussolinienne, revenait en fils prodigue et en profitait pour régler ses comptes avec l'avant-garde russe en déclarant:
"La période de 1907 à 1917 fut, pour les hommes de lettres russes, une période totalement obtuse et irresponsable sur le plan de la pensée, toute pleine qu'elle était de "liberté créatrice. "
Le Congrès déclarait ses moyens comme étant ceux du langage : "Notre arme est le mot." La doctrine officielle du " Réalisme Socialiste " suivait la logique de Staline pour qui le but de "l'ingénieur de l'âme" était de dépeindre la réalité dans sa "dynamique révolutionnaire". La méthode réaliste-socialiste" devait donc combiner la fidélité de la représentation avec le remodelage idéologique. La littérature était vue sous un angle plastique (les termes de " représentation ", " dépeindre ", sont abondamment utilisés), marquant sa proximité avec les arts visuels, qui étaient, eux, chargés de décrire et de figurer. Staline était élevé au rang d'architecte dirigeant les bâtisseurs du socialisme. Dans son discours sur la littérature soviétique au congrès de 1934, Gorki hissait les valeurs du travail au niveau de l'art:
" Nous devons choisir le travail comme le héros central de nos livres, c'est à dire l'homme organisé par les processus du travail, qui dans notre pays est armé de toutes les possibilités de la technologie moderne, l'homme qui, à son tour, rend le travail plus aisé, plus productif, l'élevant au niveau de l'art. Nous devons apprendre à comprendre le travail comme créativité. "
Pour les arts visuels, Igor Grabar ne faisait que suivre la voie tracée par la littérature:
" Camarades écrivains, vous dépeignez la vie comme vous la voyez, la comprenez et la ressentez, et nous la dépeignons de la même manière. Vous utilisez la méthode du réalisme socialiste, et nous aussi nous utilisons cette méthode qui a fait ses preuves, la meilleure de toutes celles qui existent. "


Le texte final sur le " Réalisme Socialiste " adopté par le congrès ne concernait que la littérature, mais cette résolution était valable aussi pour les syndicats d'artistes, contraints de s'y tenir s'ils voulaient continuer à exercer. La production et la conservation de l'art réaliste socialiste obéissait à un processus d'ordre industriel, rigoureusement plannifié. La liste des membres de l'Union des artistes soviétiques était dressée par le Parti et les artistes devaient se mettre au service de l'Etat. Un comité d'exposition dans chaque syndicat déterminait des thèmes, passait des commandes à une sélection d'artistes qui recevaient une avance et étaient envoyés dans toute la Russie en "mission créatrice" par le syndicat pour représenter les activités des travailleurs et des soldats. Les artistes achevaient leurs oeuvres dans des "maisons de créativité" situées de préférence dans des stations climatiques à la mode. Le travail terminé était montré au Comité d'exposition qui vérifiait la validité idéologique des oeuvres, les payait, organisait des expositions publiques et montrait les tableaux à la commission d'achat du ministère de la Culture soviétique. Celle-ci avait le monopole d'achat des oeuvres d'art et acquérait de manière quasi-automatique les oeuvres dont le paiement était transféré de l'Etat au syndicat. Les oeuvres participaient à des expositions itinérantes avant de rejoindre les musées de province ou les réserves du Ministère de la Culture où elles finissaient leurs jours comme des décors de théâtre d'une pièce qui a cessé d'être jouée. En 1934, Iskousstvo parachève l'oeuvre révisionniste en fustigeant dans ses colonnes la politique "antiléniniste" de l'ex-Narkompros et en dénonçant le formalisme, terme qui désignait à présent toute forme d'art moderne non conforme au réalisme photographique, comme un déviationnisme contre-révolutionnaire. Dans les années 40, le réalisme socialiste est défini comme un art de forme nationale et de contenu socialiste, les invectives contre le " cosmopolitisme sans racines " se multipliant. Seuls " l'art noble " et l 'artisanat ont de la valeur aux yeux du pouvoir stalinien. Le nationalisme est censé apporter la diversité stylistique des différentes traditions nationnales du territoire de l'URSS et le socialisme conférer des vertus morales au thème (courage, esprit de Parti..). Les variations stylistiques restent cependant très limitées et finalement tout écart par rapport au standard du seul style " russe " sévèrement condamné. Dans l'art réaliste socialiste, le typique est l'exceptionnel, ce sur quoi se fonde cet art de l'optimisme social mythique qui ne représente jamais un visage triste. On constate une évolution d'un art de reportage dans la fin des années 10 vers une création de ces "types" optimistes dans les années 20 et 30 pour aboutit vers les années 40 à un "archétype" monumental.


En 1936, la lutte contre le "formalisme" continue avec des articles de la Pravda intitulés: "Le chaos a remplacé la musique", "La cacophonie dans l'architecture", "Sur l'artiste barbouilleur". A la fin des années 40, la revue officielle " Iskousstvo " propose à présent une approche révisionniste de tout l'art occidental, inspirée par Gorki qui demandait que tout le passé artistique soit lu à la lumière de Marx-Engels-Lénine-Staline. La période de 1946 à 1953 est considérée comme la période la plus " classique " des arts plastiques de l'époque stalinienne. Le nationalisme soviétique est censé s' opposer au " cosmopolitisme formaliste ". C'est en 1947 seulement que sera rétablie l'Académie des Arts et fondé un Institut de l'Histoire et de la Théorie des Arts chargé de donner une vision révisionniste. En 1950, dans "Marxisme et Questions de Linguistique", Staline affirme que le langage prévaut sur la classe, parcequ'il sert le peuple, entité plus stable que les structures sociales. Staline semble chercher à effacer toutes les traces du renouveau du langage russe effectué par les poètes (Khlebnikov) et les linguistes (Jakobson). Sa référence est Pouchkine :
"Plus de cent ans se sont écoulés depuis la mort de Pouchkine. Au cours de ce siècle , l'ordre féodal et l'ordre capitaliste ont été abolis en Russie , et un troisième ordre, l'ordre socialiste, a émergé. (...) Mais si on prend, par exemple , la langue russe , on constate alors que, durant tout ce temps, elle n'a connu aucune rupture, et (que ) le langage contemporain diffère très peu, structurellement, de celui de Pouchkine. "
Alors que les futuristes avaient jeté Pouchkine par-dessus bord et que Livchits avait proclamé Khlebnikov le nouveau Pouchkine, Staline affirme l'absence de rupture dans le langage russe pendant la période récente. Or contrairement aux autres personnalités révolutionnaires comme Lénine, Trotski, Lounatcharski, Gorki, qui étaient à l'étranger pendant les années futuristes de la Russie, Staline avait vécu dans le pays les évènements futuristes et ne pouvait ignorer le phénomène de renouveau du langage opéré par le zaoum. Gorki en tout cas connaissait parfaitement les développements culturels de cette époque puisqu'il avait fustigé en 1934 au Congrès des écrivains la " liberté créatrice " qui régnait dans les années 1907 à 1917. Il faut cependant noter que la " canonisation " des Ambulants est tardive et n'advient qu'en 1952 sous l'impulsion de Guérassimov, lors de la campagne de Idanov au congrès de l'Académie des Arts pour mettre au pas les arts:
" Tout propos oiseux de nature à dénigrer la culture artistique des Péredvijniki est un mensonge éhonté et une calomnie. "
Le même Guérassimov qui en 1963, sentira " l'Homme " menacé par les " tableaux " futuristes et cubistes empilés dans les réserves de la Galerie Trétiakov. Symboliquement, le musée de référence de cet art soviétique des années 50 et 60 est donc bien le Musée Russe du tsar Alexandre III, avec sa politique autoritaire et son annexion pure et simple de l'art des Ambulants à ses projets nationalistes. Il n'y a, dans ce système, aucune place pour le collectionneur passionné ou l'artiste novateur, deux profils artistiques qui ont fécondé la vie culturelle russe pendant la courte période de liberté entre les deux régimes totalitaires des tsars et de Staline.

La mémoire de l'art russe moderne

En 1963, Alexandre Guérassimov, toujours membre de l'AKhRR, l'Association des Peintres de la Russie Révolutionnaire, gardienne des valeurs du réalisme socialiste, déclarait:
" J'ai toujours pensé [..] à la quantité innombrable de mauvais tableaux que je souffre de voir s'accumuler dans les magasins spéciaux. Les réserves de la galerie Trétiakov, par exemple, sont encombrées de piles de " tableaux " futuristes, cubistes, etc. On est en droit de se demander: combien coûte au peuple la conservation de tels " chefs d'oeuvre " ? Combien de papier a-t-il fallu utiliser pour les emballer? Combien de personnes sont-elles employées à la garde de ces déchets, dans des conditions hygrométriques scientifiquement établies? On ne peut s'empêcher de se dire qu' " on a peur pour l'Homme. "
La visite des réserves des musées d'URSS où les oeuvres de l'avant-garde étaient conservées, avait été formellement interdite en 1960, après la publication le 28 mars par un journaliste américain, Alexandre Marshack, de photos de ces réserves dans le magazine " Life ". Les photos montraient des lieux en désordre et un piètre état de conservation des oeuvres. A la suite de la parution de l'article, plusieurs responsables de musées en Russie furent renvoyés de leur postes. En donnant un ton de scandale à ses révélations, Marshack avait servi sans le savoir les intérêts des tenants de l'académisme russe. Alors que Khrouchtchev tendait vers une certaine réhabilitation de l'art moderne en proposant tout un groupe de jeunes architectes pour le prix Lénine, les académiciens, par le seul fait de montrer la double page de " Life ", présentant côte à côte une reproduction d'une peinture réaliste socialiste, le " Discours de Lénine à Smolny " de Sérov avec l'uvre d'un jeune peintre soviétique, Zvérev, un " Autoportait " maculé qui évoquait un Christ, avaient anéanti en une seconde tous les efforts d'ouverture de Khrouchtchev. La seule vue de ces deux images amena le communiste orthodoxe qu'était malgré tout Khrouchtchev, à durcir sa position et geler pendant plusieurs années sa politique de libéralisation en faveur de l'art moderne.
C'est toute l'histoire de l'art russe moderne que convoquait cette simple juxtaposition de deux photos de " Life ", de la confrontation du symbolisme de Vroubel au nouvel académisme des réalistes " Ambulants " en 1896 à Nijni Novgorod, à celle des cubistes défiant le sophistiqué Alexandre Benois du " Monde de l'Art " et des futuristes exaspérant Lénine en peignant les arbres des rues moscovites pour le 1er mai. Mais, à cause de la longue fermeture au monde extérieur, cette histoire de l'art russe n 'était pas clairement connue, même par les russes eux-mêmes, et un simple journaliste américain pouvait provoquer chez les russes avec deux seules images un choc artistique aussi important que ceux qui jalonnent l'histoire de l'art russe. Pourquoi le support imprimé n'a-t-il pas eu en Union Soviétique l'effet salutaire du Musée Imaginaire? Ce que la structure de l'imprimé liait en un tout éclatait aux yeux des académiciens soviétiques et de Khrouchtchev comme le parangon de l'inconciliable. Ce n'est pas la possibilité de confrontation des uvres apportée par les techniques de reproduction qui est en cause ici, c'est le principe des couples d'opposition en histoire de l'art. C'est d'un effet de choc semblable entre deux uvres d'art qu'est issue la réflexion de Malévitch sur la manière dont il faut effectuer l'analyse comparative des uvres d'art modernes :
" Lorsqu'on juxtapose des uvres de Répine et de Picasso , les lignes divergent à la fois dans la vision du monde et dans celle de l'art, au point qu'on peut penser que le nouvel art semble carrément venir d'une autre planète, qui n'a rien en commun avec nos lois humaines et notre perception humaine, ni avec la structure physique de l'il de l'artiste. Mais en fait, ça n'est pas du tout comme ça. Le lien de l'art nouveau et de l'art imitatif au modèle de la nature est le même, bien qu'il varie graduellement et de manière presque imperceptible d'une uvre à l'autre. Et si nous plaçons une série d'uvres dans l'ordre de leur développement historique, nous ne trouverons pas une telle ligne de contraste. "
Deux images ne suffisent pas pour écrire l'histoire de l'art moderne. Il en faut un grand nombre. Mieux, lorsque l'on dispose une série d'uvres en un certain ordre, le continuum de l'art apparaît comme la logique du spectre coloré qui fonde la lumière blanche. C'est donc un système linéaire plutôt qu'un système de couples d'opposition qui apportera la réponse à la question de la validité de l'art moderne.
Les " mauvais tableaux " que Guérassimov souffrait de voir s'accumuler dans les réserves de la galerie Trétiakov n'ont pas toujours été dans des magasins spéciaux. Ils ont fait partie intégrante d'un vaste réseau des premiers musées d'art moderne du monde, créés spécialement en l'honneur de ces tableaux, mais qui n'avaient pas d'architecture propre. La Galerie Trétiakov elle-même n'a pas toujours été une réserve d'uvres, elle a été l'uvre d'un seul homme dont elle porte le nom.
Si la Révolution Française a créé de toutes pièces le musée d'art et en a fait une institution stable et une forme de monument qui devait traverser les siècles, la Révolution Russe s'est contentée de rajouter aux lieux de conservation d'uvres d'arts existants les objets provenant des confiscations et, plus tard, une production culturelle industrielle normalisée. Les seuls musées qui ont été créés de toute pièce par le jeune état soviétique sont les " musées de la culture artistique ", les premiers musées d'art moderne du monde. L'abandon, aussi soudain qu'inattendu, de la représentation dans le nouvel art, n'avait pas d'équivalent dans l'histoire et, hormis la révolution politique, il n'existait aucun modèle auquel ce nouvel art put se référer. La révolution politique russe avait en revanche un précédent, la révolution française, dont elle s'inspirait largement. Si leurs modèles esthétiques respectifs entraient en conflit, le monde artistique et le monde politique ont cependant trouvé un dénominateur commun dans l'idée de musée.
Il ne nous reste de ces musées laboratoires russes, pourtant si proches de nous dans le temps, que des descriptions. Aucun bâtiment spécifique ne les symbolisait, la majeure partie des collections qui les constituait a été détruite et il n'en reste ni photographie ni catalogue. Mais du travail de laboratoire de l'un d'entre eux nous sont parvenus des témoins matériels qui ornent les murs de deux musées dans le monde. Le Museum of Modern Art de New York et le Stedelijk Museum d'Amsterdam possèdent chacun une partie d'une uvre, une série de planches didactiques qui, réunies en un tout, forme le panorama des recherches de Malévitch dans le musée laboratoire du Ghinkhouk de Léningrad. Le support imprimé, une revue ukrainienne à la fin des années vingt, relaie le musée pour garder la trace des recherches de Malévitch en matière de muséographie et nous permet de connaître de manière détaillée dans un tour d'horizon de 140 uvres d'art modernes la manière dont Malévitch envisageait la présentation de l'art moderne devant le grand public.

 II. Poètes de la révolution et ingénieurs des âmes

Lounatcharski, un intellectuel parmi les bolchéviques

Le Narkompros

La naissance du réalisme socialiste