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jeudi, juin 26, 2008
L'affaire Rudy: d'office labellisée "acte antisémite" par de nombreux media, mais...
Ne point tirer leçon de quoi que ce soit: l'affaire de la fausse agression antisémite du RER D, entre-autres (1), n'avait servie à rien. Une fois de plus, agences de presse et journaux rempillent: ainsi l'agence photographique Sipa Press livre des photos avec une légende toute faites comme l'évidence témoignant du "rassemblement de Paris suite à l'agression antisémite du jeune Rudy" (2). Puis l'émouvant témoignage de la mère du jeune Rudy diffusé sur la chaine de télévision France 2 où l'on apprend d'une maman au bord des larmes que son fils n'est qu'un garçon comme les autres - précisant néanmoins, avec prudence dont une certaine presse a fait l'économie, qu'elle n'a pas de certitude quant à la nature essentiellement antisémite de l'agression- (3).
Il s'avère que le jeune Rudy, en dépit du caractère condamnable de l'agression et malgré l'émotion compréhensible de sa maman devant les cameras de France 2, n'est pas vierge de péchés: la victime est en effet connue des services de police car ayant été interpelée le 9 décembre 2007 puis placée en garde à vue pour "coups et blessures volontaires avec arme par destination". Rudy et ses camarades avaient été trouvés porteurs de poings américains et "autres projectiles de défense" (4) et condamné en première instance à un an de prison avec sursis.
Le spectre de l'anti-sémétisme réapparait donc, dans un contexte qui est celui du voyage du chef d'état français en Israel, et l'on peut s'interroger sur certaines prises de positions à-priori, avant tout résultat d'enquète, et sur la mise en avant flagrante de l'agression prétendument antisémite, contre un juif. Sans meme traiter du carractère possiblement contre-productif et spéculer sur la coincidence avec le voyage en Israel de Nicolas Sarkozy, et peut être même dangereux de cette mise en avant de la figure du "juif innocent" éternelle victime à-priori, l'on peut se demander où se situent les véritables raisons de cette mise en exergue en regard du nombre d'agressions quotidiennement perpétrées ne recevant comme écho que le silence: où, entre reflexe pavlovien et opération d'intimidation culpabilisatrice susceptible d'être instrumentalisée ? Une chose est le moment certaine: la réponse ne se trouvera certainement pas en prime-time du JT de 20 heures.
Dans un article intitulé "L'affaire Rudy, une nouvelle arnaque à l'antisémitisme", Egalité & Réconciliation revient sur cette affaire en se demandant pourquoi les agressions anti-sémites passionnent autant les media français, plus que d'autres, en ces temps de mode égalitariste.
A lire aussi: Olivier Bonne, "Affaire Rudy H. : antisémitisme, extrémisme sioniste et récupération politique", Voxnr, 26 Juin 2008.
(1) Voir "A propos de la réalité des actes antisémites",Observatoire du communautarisme, 26 Août 2004.
(2) Reportage numéro 562887, la légende cité entre guillement apparaissant telle qu'indiquée dès le 22 juin.
(3) Journal télévisé de 20 heures, France 2, mercredi 25 juin 2008, " Agression d'un adolescent juif : sa mère témoigne", 20h19m33s.
(4) LeFigaro.fr, 24 juin 2008. Le poing américain est une pièce de métal dans laquelle on passe les doigts. Lorsque l'on ferme le poing, la pièce de métal vient donc en prolongement des excroissances des articulations osseuses. Si l'on frappe quelqu'un avec un poing américain, c'est le métal qui vient d'abord en contact, avec les conséquences suivantes: la surface de contact étant petite, la force est très concentrée et l'impact plus efficace ; la personne qui frappe a moins peur de s'endommager les mains en frappant, ce qui lui permet de frapper d'autant plus fort (Wikipedia).