Le Morvan vu par Jacques Lacarrière


Chemin faisant - 1973

Longtemps le Morvan fut pour moi comme une tache d'encre sur un buvard : un pays dont les frontières changeaient sans cesse.

Où commence-t-il, où finit-il exactement ? D'après la carte récemment éditée par l'Office du Parc Naturel Régional, je vois avec surprise qu'il commence très au nord, à quinze kilomètres à peine de mon village de Sacy. Sa frontière nord suit en effet grosso modo une ligne qui passe, au dessus d'Avallon par Savigny-en-Terre-Pleine, Montréal, Lucy-le-Bois, Sermizelles et Châtel-Censoir. Pourtant si on demande à des habitants de Lucy-le-Bois ou de Sermizelles où ils habitent, la plupart répondront en Bourgogne ou dans l'Yonne, jamais : dans le Morvan.

A le parcourir d'ailleurs on éprouve immédiatement, instinctivement, le sentiment que le Morvan commence, en fait, là où débute le granite. Ses frontières actuelles sont plus administratives que naturelles.

Car le Morvan, c'est avant tout du granite, des fougères, des digitales, des collines plus audacieuses, des éminences plus affirmées et un air différent de celles de la Basse Bourgogne.

Je l'ai senti, dès le commencement de ma nouvelle marche, en quittant la forêt au Duc pour arriver sur les hauteurs du Vieux-Dun : on est déjà entre 500 et 600 mètres. Les reliefs s'accentuent, les forêts s'épaississent, les ruisseaux et les rus pullulent. Certaines hauteurs sont suffisamment escarpées pour avoir servi d'abri et de refuge aux Eduens qui vivaient ici. Voilà, j'ai trouvé le mot : depuis hier, je suis en pays Éduen.

C'est cela pour moi le Morvan, avec le souvenir des près mouillés de l'aube, les grandes forêts d'épicéas, de la folie multicolore des fleurs : du granite, un air vif et la terre d'élection de nos ancêtres Éduens.
 

Le Morvan

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