Attila et l’Occident

© Grigori TOMSKI

Empereur et Pape

Situation politique et militaire

Education soignée

Population hunnique

Personnalité d’Attila

5 juillet 452


Sommaire

On peut pourtant facilement deviner l’ordre du jour|de cette rencontre du 5 juillet 452. Attila a dû naturellement commencer les discussions par l’analyse de la situation politique et militaire.

Citons Maurice Bouvier-Ajam : «Valentinien III réunit ses ministres et conseillers : il faut essayer d’éviter le pire, il faut demander à Attila quelles sont ses conditions ... Il faut qu’une ambassade parte, chargée de cadeaux, prête aux plus humiliantes supplications ...

On réunit le Sénat. Le Sénat unanime dit qu’il faut composer et désigne quelques sénateurs qui solliciteront en son nom la paix au prix qu’il demandera...

On assemble les habitants de la Ville ; des sénateurs, des officiers de l’Empereur leur exposent la menace qui pèse sur Rome, sa destruction totale peut-être. Tout le nord de l’Italie a été ravagé, les légions ne peuvent que momentanément faire barrage sur la vallée du Pô, l’arrivée de l’ennemi terrible est proche. Le peuple veut-il la paix ou la guerre ?

- La paix ! La paix !

Le peuple veut-il qu’on attende l’arrivée des Huns ou qu’on envoie une ambassade ?

- Une ambassade ! Une ambassade !

Et le Sénat se réunit à nouveau, en présence de l’Empereur, des ministres ... Mais qui dirigera l’ambassade ? Qui est susceptible d’être reçu ? On ne peut tout de même pas envoyer l’Empereur lui-même ! Et même, dans cette indigne hypothèse, l’Empereur serait-il reçu ? Alors se lève le plus illustre des sénateurs, Gennadius Avienus, qui déclare : «Le pape, lui, serait reçu.» (M.Bouvier-Ajam, Attila. Le Fléau de Dieu, Tallandier, 1982, p. 369-370).

C’était l’époque de l’essor des peuples turco-mongols que nous appellerons dans ce texte la «population hunnique». La Chine a connu au IVème siècle les grandes invasions hunniques, deux empereurs chinois ont été capturés (312 et 316) par un roi hun qui «fut l’Attila de la Chine» (R.Grousset, L’empire des steppes, Payot, 1965, p. 96), celui-ci les contraignit à lui servir d’échansons, «rincer des coupes dans les banquets» et finalement les exécuta (313 et 318). A l’époque d’Attila les Tabgatch ont unifié les autres Etats hunniques de la Chine du nord et fondent la dynastie impériale Wei. Sur l’autre front les Huns Hephtalites («Huns Blancs») prirent une importance considérable, finalement ils vaincront et tueront le roi sassanide Péroz (484), un prince hun entre 502 et 530 «fut vraiment l’Attila de l’Inde (R.Grousset, p. 114).

Gérard Chaliand note : «Les fronts militaires des nomades altaïques couvrent - à l’exception du Maghreb - l’ensemble du théâtre des conflits du monde antique et médiéval. Sur les deux millénaires où ces nomades exercent leur pesée, à deux reprises, ils sont présent à l’échelle du monde : aux IV-V siècles et aux XIII-XV siècles de notre ère. La première fois par une série d’invasions provoquant la chute des empires han (Chine) et gupta (Inde) et indirectement celle de l’Empire romain...» (G.Chaliand, Les Empires nomades, de la Mongolie au Danube, Perrin, 1995, p. 59.)

La supériorité militaire des cavaliers des steppes a été fondée sur leur stratégie très dynamique inimitable pour les peuples sédentaires, leur tactique a été une démonstration de la prédominance de la manoeuvre sur la défense statique : «Nulle part, hors de la steppe, la révolution que constitue l’usage de la cavalerie n’a été portée à une telle efficacité militaire. Mobilité, capacité de concentration, puissance de jet de l’arc à double courbure, technique de harcèlement et de feintes font des monades de la steppe, ..., les représentants majeurs d’une culture stratégique d’une singulière efficacité ...» (G. Chaliand, p. 61).

En plus, la civilisation des peuples hunniques avait ses points de supériorité technologique sur celles des Romains et des Chinois : «Les innovations concernant le cheval - mors, rênes, étriers - ou l’armement, tel le sabre qui sera adopté partout, ... , sont toutes des inventions des nomades.» (G.Chaliand, p. 34).