Venus (RifRaf n°88, mars 2003)
     
Texte  
 
Devenu une valeur sûre sur la scène belge, Venus continue à marquer les esprits avec 'Vertigone'. Malgré la déchirure interne et le départ de Thomas van Cottom et de Patric Carpentier, le groupe affiche une belle santé et sort un disque apaisé.

Quel regard portez-vous sur le succès que renconte Venus ?
Marc
: Je pense surtout à ce qui se passe maintenant. Nous avons acquis une reconnaissance critique. Nous avons vendus pas mal d'albums et nous disposons également d'un suivi du public. Mais il n'était pas dit que cette reconnaissance continue avec ce nouvel album, car beaucoup de temps s'est écoulé depuis le dernier disque.

Dans je sens que rien n'est jamais définitif ?
Marc
: Oui, et surtout qu'on aurait trés bien pu tomber aux oubliettes. Les gens auraient pu ne pas se souvenir de nous. C'est donc hyper positif. A nous de bien se rendre compte que nous avons de la chance. Et réaliser que des gens attendent vraiment l'album, c'est super...

Quelle a été votre démarche pour ce nouvel album ?
Marc
: Il n'y a pas eu de réunion pour dire on va faire comme ci ou comme ça. Mais personnellement je voulais qu'il soit assez différent du premier.
Christian Schreurs (violon): Oui mais s'il n'y a pas eu de réunion avant l'enregistrement on s'est quand même posé la question de savoir ce que chacun de nous avait envie pour ce disque. Et on s'est donnés beaucoup de libertés, tant au niveau des instruments qu'on allait utiliser que des couleurs de ces instruments. On avait un peu envie de casser la rigidité du premier album, qui était plus un album de compositions qu'on pouvait jouer en live avec chacun de son côté jouant son instrument et quelques overdubs. Ici, on s'est plus fait plaisir en utilisant beaucoup plus de couleurs qu'auparavant. Il est plus calme, mais je crois qu'on ratisse plus large, et que 'Vertigone' ouvre plus de portes.
Marc: La principale différence vient du tait que nous n'avons pas travaillé avec une montre. Nous avons tout fait pour disposer d'un maximum de temps. Pouvoir être aussi minutieux que nous le voulions, prendre du temps sur chaque petite chose, travailler sur plusieurs morceaux à la fois. Ce qui donne cet aspect raffiné ou recherché dans l'arrangement. Ce n'était pas le cas pour Welcom To the Modern Dancehall, album pour lequel la méthode utilisée était plus classique: on travaillait un morceau de a à z et on passait au suivant. Ici, on pouvait attaquer une batterie d'une chanson et travailler ensuite les claviers d'une autre.
Christian: Si nous avons eu tout ce temps, c'est parce que nous n'étions pas en studio. Nous avons trouvé plusieurs salles dans lesquelles nous pouvions installer tous nos instruments et notre matériel technique. Nous n'avions dés lors aucune deadline, cela nous a donné une liberté totale. C'était un luxe.
Marc: Tout à fait, le luxe, ce n'est pas d'avoir un studio mais du temps.

Venus a été marqué par de nombreux changements depuis sa formation...
Marc
: Walter est parti en 99 et c'est à ce moment là que Pierre nous a rejoints. En septembre 2001, Thomas Van Cottom et Patrick Carpentier sont partis. On a trouvé un nouveau batteur, on n'est plus que quatre.

Quel changement cela a apporté au niveau du groupe ?
Marc
: Chaque membre du groupe a ses aptitudes musicales, son talent mais surtout sa personnalité. Jean-Marc Butty, par exemple, le nouveau batteur, est quelqu'un de très posé, qui a beaucoup d'expérience. Artistiquement, il est trés à l'écoute des morceaux, propose beaucoup. Humainement il apporte du calme. Beaucoup de changements, donc Venus a un peu changé, oui.

Comment expliquer tous ces départs ?
Marc
: Cela s'est mal passé. Et je pense que c'est mieux qu'on n'en parle pas, vu que tu n'auras qu'une seule version. Je préfère éviter d'en parler maintenant, avec la sortie de l'album, car c'est un sujet délicat, fragile.

Cela fait dix ans que tu es dans la musique, en compant So, ton précédent groupe. Comment vois-tu ton évolution ?
Marc
: Artistiquement, pour moi, c'est toujours meilleur, sachant qu'au début, ce n'était pas terrible. Même au niveau de Venus, je pense qu'on n'arrête pas de progresser. Tu parles de succès, mais c'est relatif. Le principal, c'est le suivi artistique. C'est ton travail, c'est ton évolution. Et je crois qu'avec Venus, la réussite vient plus de notre travail que de notre talent. Le travail, être de plus en plus exigeant avec toi-même, c'est ce qui te permet d'évoluer.

Pour Vertigone, on a l'impression que tu as orchestré l'album à ta façon.
Marc
: Je ne peux pas nier ce que tu dis. J'ai composé la base des morceaux, c'est donc normal que cela imprime le travail du groupe. Ma contribution est plus importante. Je suis arrivé avec des compositions plus élaborées et une idée précise de ce que je voulais. Et ce n'est pas un hasard si je me retrouve plus dans ce disque que dans le précédent. Je suis plus en phase avec Vertigone.
Pierre Jacqmin (basse): Pour moi, il s'agit surtout de me mettre au service d'un travail qui est à la base apporté par Marc. Et ensuite, chacun de nous y ajoute sa touche personnelle, ses envies. Et cela reste très ouvert.
Christian: Tu as l'impression que Marc est plus présent que pour notre premier disque, mais j'ai tendance à dire que c'était déjà Marc qui apportait tout à l'époque. Comme dit Pierre, on est au service de la composition, qui est effectivement amenée par Marc. Mais la méthode d'enregistrement est différente ici, nous n'avons jamais joué ensemble lors de la préparation de l'album, nous avons travaillé en ajoutant des parties sur le multipistes. Le contexte, aussi, était plus posé qu'auparavant. Donc, pour moi, ce n'est pas plus Marc Huyghens qu'avant.
Marc: Si je réécoute Ballroom ou White Star Line, ce sont des morceaux que j'aime encore bien écouter, mais j'ai l'impression que c'est quelqu'un d'autre qui les a écrits. Dans le premier disque, il y a beaucoup plus de tensions, qui étaient intéressantes. Ces tensions partaient dans tous les sens. Ici, avec Vertigone, tu en sens moins, mais les morceaux vont dans ta même direction. Ce disque est plus homogène que le premier.
Christian: Pour moi, c'est discutable, Pour le premier, c'est toujours les
mêmes couleurs qui reviennent donc il y a aussi homogénéité. Je ne sais pas si homogène est le bon terme pour Vertigone. Disons qu'il est plus ouvert.
Marc: Pour moi, homogène ne veut pas dire que tu retrouves d'office toutes tes mêmes couleurs. Mais ici, les chansons forment un tout plus cohérent.

Comment est venue l'idée de faire appel à un choeur pour Running at full speed ?
Marc
: En fumant... J'étais de mon côté et j'ai eu une illumination. Je suis revenu le lendemain en leur disant tout content et tout cerné: « ce serait super qu'on essaye avec un choeur ». C'était une vieille chanson qu'on avait gardée dans un tiroir, on aimait son harmonie et c'est Christian qui a travaillé sur un arrangement pour un quatuor à cordes. On a envoyé les partitions dans une école de Charleroi qui avait une activité de chorale, avant d'aller enregistrer là-bas. Avec une trentaine d'adolescents âgés entre 12 et 17 ans. C'était vraiment une chouette expérience.

La musique te permet-elle d'exprimer plus de choses que dans la vie quotidienne ?
Marc
: Sûrement, mais la musique est plus pour moi le seul moment ou je ne pense à rien d'autre. C'est en quelque sorte une thérapie, un exutoire. Ces moments où je ne pense à rien d'autre, souvent sur scène ou chez moi, m'amènent une plénitude, un moment de bonheur. C'est une concentration totale, mais apaisante.

Venus
'Vertigone'
Capitol Music / EMI

Après un été sous les trombes diluviennes et les inondations, la formation bruxelloise s'orne de blanc et de fraîcheur pour son nouvel album. Un blanc épuré. Sage. Ressourcé. Ressourçant. Calme. Ce calme plein de tensions avant l'apparition d'une nouvelle tempête. En grand capitaine de route, Marc Huyghens est sûr de son fait. Il a à nouveau préparé son navire pop d'une armature acoustique. Après avoir colmaté les brèches provoquées par la fougue du précédent Welcome To the Modern Dancehall, il conduit sa troupe à travers courants et marées en vue d'un territoire apaisé et évite la menace d'un naufrage. Il recueille même Pall A. Jenkins à bord, échappé du radeau de Black Heart Procession, pour l'employer à la scie sur Million Miles Away. Ce second disque offre des chansons retenues, tout en harmonie, et impose les marques d'une nouvelle maturité. Arrivés à bon port, ils peuvent jeter l'encre en paix.

Julien Gillebert

 
  Notes  
 
Merci à Sandrine
 
You won't tell me, I know it's hard
To keep your dream alive
Royalsucker
 
 
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