On voit souvent
dans ce conflit localisé que constituent les Guerres Balkaniques
comme une sorte de dernière répétition où
se heurtent par alliés interposés les différents
impérialismes européens avant la déflagration
de 1914. N'y voir que cet aspect serait inexact, pourtant les grandes
puissances ne sont pas absentes dans ce conflit. Si elles n'y participent
pas directement, elles n'en ont pas moins un rôle actif sur
le plan diplomatique. Et à ce titre, le rôle de la Russie
est assurément le plus important.
Affaibli par
sa défaite dans le conflit qui l'opposait au Japon, ainsi que
par la révolution de 1905, l'Empire russe n'avait pu répondre
à l'annexion de la Bosnie-Herzégovine. La diplomatie
russe était humiliée. La désagrégation
lente de l'Empire ottoman va permettre à la Russie de pouvoir
reprendre part au jeu diplomatique et de tenir ainsi sa revanche.
En effet, la
révolution jeune-turque de 1908 [1]
qui avait suscité de nombreux espoirs chez les différents
peuples qui composent l'Empire, à travers notamment l'octroi
d'une constitution, avait très vite déçu ceux-ci.
Le résultat était tout autre. Une fois installés
au pouvoir les membres du Comité Union et Progrès dévoilèrent
leur programme. Leur but était de renforcer l'élément
turc au sein de l'Empire, aux dépens des autres nationalités,
pour le consolider et éviter ainsi toute désagrégation.
Cette politique nationaliste de "turquisation" qui se traduisait par
la fermeture des écoles de langue nationale,
l'installation de colons turcs dans les régions insoumises,
provoqua une recrudescence de l'agitation nationaliste chez les populations
dominées et notamment en Macédoine des 1910 [2].
Région à population très hétérogène,
la Macédoine suscite la convoitise des petits états
balkaniques. Ces appétits divergents avaient déjà
conduit les grandes puissances à calmer le jeu, en envoyant
en 1904 une gendarmerie internationale avec promesse de la Porte d'engager
des réformes. Celle-ci était restée sans suite.
Mais en 1911 la situation pour l'Empire ottoman est tout autre.
En effet, l'Empire
se trouve aux prises avec un autre problème. La Turquie doit
faire face à une guerre qui l'oppose à l'Italie depuis
le 29 septembre au sujet de la Libye [3].
Guerre qui au contraire des prévisions italiennes se prolonge.
Ce qui oblige ce pays en février 1912, à porter le conflit
dans la Méditerranée orientale, aux portes de la Turquie
(occupation des Îles du Dodécanèse [4],
attaque des détroits), pour forcer l'Empire à céder.
Au contraire les pays balkaniques se trouvent dans de bonnes conditions
pour imposer leurs vues. Tout d'abord la Serbie qui veut effacer l'humiliation
de 1909 lorsqu'elle avait dû reconnaître l'annexion de
la Bosnie-Herzégovine, ensuite la Grèce qui s'est donné
pour chef de gouvernement, le chef du mouvement nationaliste grec
de Crète; Venizélos [5],
et enfin la Bulgarie qui considérait les Macédoniens
comme des Bulgares [6].
Face à
cette opportunité que représente la guerre italo-turque
pour les États balkaniques et la Russie, oblige cette dernière
à faire des choix. Ou bien suivre la ligne préconisée
par Tcharykov l'ambassadeur à Constantinople [7]
qui propose de profiter des difficultés turques pour reposer
la question des détroits [8]
en proposant à la Porte une alliance protectrice qui garantirait
le statu quo dans les Balkans contre un libre passage de la flotte
russe dans les détroits. Ou alors suivre l'avis d'Hartwig,
ministre russe à Belgrade qui soutient les aspirations des
jeunes États balkaniques dont la Russie pourrait se faire une
clientèle contre les prétentions autrichiennes. Face
au désintérêt français uniquement préoccupé
par la crise marocaine, ainsi qu'à la politique de la sourde
oreille de la Porte à toutes propositions russes, la Russie
décide d'opter pour la deuxième solution en facilitant
les négociations entre les différents prétendants
à l'héritage européen de l'Empire ottoman.
Dès
l'automne 1911, en pleine guerre italo-turque, les dirigeants Serbes
et Bulgares sous le patronage des représentants russes dans
les deux capitales négocient les conditions d'un futur partage.
Ces négociations commencent le 11 octobre 1911 à Belgrade
par un entretien entre le président du conseil bulgare Guéchov
et le chef de gouvernement serbe Milovanovitch, puis se poursuivent
à Sofia. Celles-ci sont difficiles et buttent notamment sur
les conditions du partage. Mais grâce à l'arbitrage russe
et à la pression nationaliste des Chrétiens de l'Empire
en but à la "turquisation", les deux gouvernements s'entendent
et signent un traité le 12 mars 1912. C'est en apparence une
alliance défensive contre toute tentative d'annexion d'un territoire
balkanique soumis à la Turquie par un tiers (l'Autriche-Hongrie).
Mais une annexe secrète prévoit une guerre offensive
"au cas où des difficultés intérieures ou
extérieures, avec lesquelles la Turquie se verrait aux prises,
mettraient en cause le maintient du statu quo dans la péninsule
des Balkans." Ce même traité fixe les conditions
du partage de la Macédoine en laissant à l'arbitrage
du tzar une zone contestée de part et d'autre du Vardar [9].
En même temps la Bulgarie négociait avec la Grèce.
Les négociations aboutissent à la signature d'un traité
le 29 mai 1912. Celui-ci prévoit une alliance défensive
contre la Turquie, mais ne fait aucune mention sur les clauses territoriales;
les deux capitales convoitant Salonique [10].
Ainsi prend naissance la deuxième Ligue Balkanique après
la tentative avortée de 1865-1868 après l'assassinat
du prince Mihailo [11]
à Belgrade. Enfin le Monténégro sans signer d'accord
avec les trois autres pays leur fait savoir son intention de les assister
dans l'éventualité d'un conflit.
B.
Les Guerres Balkaniques
L'éventualité
d'un conflit quant à elle devient de plus en plus évidente.
Or la Russie qui a parrainé ces négociations est au
courant de toutes les étapes de ces négociations, elle
sait donc que dans l'esprit des différents gouvernements, cette
Ligue n'a qu'un seul but: la guerre. Après les avoir encouragés,
la diplomatie russe va donc s'efforcer de calmer les états
slaves et ce même si elle reçoit le soutien mesuré
de la France qui ne veut pas affaiblir la Triple Entente [12].
Ainsi Sazonov, le ministre des affaires étrangères russes,
recommande-t-il à la Bulgarie dès le lendemain de la
signature des accords de mener "une politique réfléchie"
[13]
il réitérera ces conseils de prudence le 29 août.
En fait la Russie ne peut plus reculer devant ce mouvement qu'elle
a elle même contribué à lancer. De plus, les conditions
risques de ne plus être aussi favorables pour les Balkaniques
puisque depuis juillet, le gouvernement ottoman est en pourparlers
avec l'Italie. Il leur faut donc agir.
À l'automne
1912, les Balkaniques ont terminé leurs préparatifs.
Depuis plus de six semaines, les chancelleries des deux blocs, connaissant
la détermination de la Ligue, s'agitent pour chercher des solutions
garantissant le statu quo. Peine perdue, les Balkaniques décidèrent
d'agir seuls. Le 30 septembre 1912 prenant prétexte de mouvements
de troupes en Turquie, ils décident la mobilisation générale
et exigent par ultimatum d'importantes réformes dans l'administration
de la Macédoine. Constantinople concentra ses troupes et fit
la sourde oreille jusquau 8 octobre, date à laquelle
le Monténégro sous prétexte de rétablir
l'ordre, envoie son armée en Albanie du Nord [14].
Une semaine plus tard, après avoir signé la paix d'Ouchy
avec l'Italie pour ne pas avoir à combattre sur deux fronts,
la Porte priait les représentants serbe et bulgare de quitter
la capitale. Le 18 la guerre était déclarée à
ces deux pays tandis que la Grèce, au nom de l'Enosis [15],
rejoignait ses alliés.
Les événements
déjouèrent toutes les prévisions des experts
des grandes puissances. Ceux-ci prévoyaient deux cas de figure.
Ou une guerre longue et indécise qui se terminerait par une
médiation des grandes puissances car l'Autriche-Hongrie n'accepterait
jamais un agrandissement de la Serbie. Ou bien pour la plupart d'entre
eux, une rapide victoire des armées du sultan organisées
et équipées par les Allemands. Mais les armées
balkaniques étaient plus nombreuses que celles des Ottomans
qui devaient aussi veiller à la sécurité de l'Empire
dans le Caucase face a la Russie et en Arabie face à l'agitation
des Arabes.
En trois semaines,
la guerre connaissait son dénouement, il s'agissait pour ces
peuples d'une véritable guerre de libération nationale.
Les Bulgares eurent à supporter le principal effort de guerre.
Engageant 200 000 combattants, leur offensive suivit deux axes. Le
premier en Thrace orientale [16]
en direction de Constantinople où après la victoire
de Luleburgaz [17]
le 24 octobre, ils mettent le siège devant Andrinople [18]
avant d'arriver a 50 km de Constantinople. Le second se fait en direction
de la mer Égée et de la Struma [19].
Ils atteignent Salonique mais 24 heures après les Grecs, ce
qui les privait de l'administration de la ville. L'armée de
Georges de Grèce occupait l'Épire [20]
vers Janina [21]
et s'était emparée de Salonique le 8 novembre. Quant
à sa marine empêchant la venue de renforts turcs du Proche-orient,
elle occupait les îles de la mer Égée. Pendant
ce temps, les Serbes descendant vers la Macédoine remportaient
la victoire de Kumanovo [22],
puis poussaient vers Monastir avant de traverser le pays albanais
en direction de Durazzo [23]
et avec l'aide des Monténégrins occupaient le Sandjak
de Novi-Pazar, tandis que ceux-ci mettaient le siège devant
Scutari. L'Empire ottoman était pour ainsi dire presque entièrement
rejeté d'Europe.
L'ampleur et
la rapidité de la victoire des Balkaniques inquiétèrent
les chancelleries. Pour les Russes les victoires bulgares qui menaçaient
Constantinople et les Austro-Hongrois qui voyaient les Serbes se rapprocher
de l'Adriatique, le conflit avait assez duré. D'autant plus
que le nouveau grand vizir, anglophile, se tournait vers Londres pour
demander une médiation. Le 3 décembre, un armistice
était signé et les représentants des belligérants
ainsi que ceux des grandes puissances se retrouvaient à une
Conférence des Ambassadeurs à Londres. Devant les exigences
des États chrétiens, les Turcs se cabrèrent et
un coup d'état mené par Enver Pacha [24]
le 23 janvier 1913 chassa le gouvernement et donna le pouvoir à
un triumvirat militaire germanophile. Le conflit reprenait donc le
3 février 1913.
Mieux préparés
les Turcs résistèrent, mais ne purent faire face au
nombre. Andrinople tombait le 28 mars, Janina était prise le
6 mars par les Grecs, tandis que les Monténégrins prenaient
Scutari alors que les grandes puissances voulaient l'accorder au nouvel
état albanais qui s'était déclaré indépendant
le 28 novembre 1912 pour contrer les ambitions de ses voisins. Ils
résisteront six semaines aux pressions des grands pour qu'ils
évacuent la ville. Le 16 avril, les hostilités cessèrent
et tous se retrouvèrent de nouveau à Londres. La Turquie
devait céder aux Balkaniques tous ses territoires européens
à l'Ouest de la ligne Enos-Midia en Thrace ainsi que la Crète.
Le sort de l'Albanie et des îles de la mer Égée
était renvoyé à la décision des grandes
puissances.
Le partage
des dépouilles va s'avérer plus difficile. Les accords
antérieurs apparaissent insuffisants. Les Bulgares en tant
que principal belligérant réclament la partie contestée
de la région du Vardar, tandis que les Serbes qui occupent
le terrain, la réclame comme compensation, après l'indépendance
de l'Albanie. Les Bulgares s'opposent aussi aux Grecs sur le sort
de Salonique. Les Roumains quant à eux réclament la
Dobroudja [25]
à la Bulgarie comme compensation à sa renonciation à
ses Valaques de Macédoine [26].
Confiante dans son armée, la Bulgarie ne veut pas céder,
c'est elle qui a fourni le principal effort de guerre contre les Turcs.
Au-delà
de ces divergences entre les différents États balkaniques,
ce sont Vienne et Saint-Petersbourg qui s'opposent. La première
voudrait mettre un terme à la Ligue Balkanique qui s'apparente
pour elle à un encerclement par le flanc sud, par la Russie.
Celle-ci au contraire voudrait la maintenir pour asseoir son influence
diplomatique dans les Balkans. Les deux capitales regardent donc avec
préoccupation la perspective d'une guerre entre les anciens
alliés. Ainsi l'Autriche-Hongrie s'emploie-t-elle à
soutenir en sous-main les prétentions bulgares pour affaiblir
la Serbie. En cas de victoire serbe dans un conflit serbo-bulgare,
le chef d'état-major Conrad von Hötzendorf [27]
a même envisagé une action contre la Serbie. La Russie
au contraire s'emploie elle, à refroidir les ardeurs et demande
aux gouvernements grec et serbe de revenir sur leur alliance défensive
du 1er juin, dirigée contre la Bulgarie et de se soumettre
à l'arbitrage russe.
Face à
la pression de son opinion publique Ferdinand Ier de Bulgarie décide
avec l'aide de son chef d'état-major Savov et sans en avertir
son chef de gouvernement alors à Saint-Petersbourg, de prendre
les devants et ordonne dans la nuit du 29 au 30 juin de repousser
les lignes serbo-grecques. La Turquie en profite pour reprendre les
hostilités et reprend Andrinople le 22 juillet. Les Serbes
et les Grecs passent le Vardar et marchent sur Sofia, tandis que les
Roumains entrent en Bulgarie le 10 juillet. Lâchée par
l'Autriche-Hongrie qui n'a pu obtenir le soutien de ses alliés
allemands et italiens pour le plan de Conrad von Hötzendorf,
la Bulgarie demande la médiation de la Russie. En vain, les
rancurs sont là, les Grecs et les Serbes veulent en finir
avec les Bulgares. La Bulgarie est écrasée, Sofia est
menacée, c'est ce moment que choisit Bucarest pour arrêter
les victoires serbes et grecques, et décide l'ouverture des
négociations. L'armistice est signé le 31 juillet et
le 10 août 1913 le traité paix de Bucarest concrétise
la défaite bulgare.
C.
Une paix précaire
Le traité
de Bucarest entérine donc, pour le moment, les profonds changements
que vient de subir la péninsule Balkanique et qui voient la
Turquie rejeter hors d'Europe, sauf un petit morceau de la Thrace
orientale avec Andrinople qu'elle a reprise aux Bulgares lors de la
deuxième guerre balkanique, et ce après plus de cinq
siècles de présence en Europe, allant même jusquaux
portes de Vienne. Le partage des dépouilles qui avait conduit
à la dislocation de la Ligue se fait au détriment de
la Bulgarie.
De ses victoires,
la Bulgarie ne gardait que la Thrace occidentale ce qui lui offrait
un débouché à Dédé-Agatch [28]
sur la mer Égée ainsi qu'un lambeau de la Macédoine
correspondant à la vallée de la Struma. Elle ne gagnait
que 400 000 habitants, alors que, par la même occasion, la Grèce
en gagnait quatre fois plus et recevait l'Épire et toute la
Macédoine du Sud avec notamment Salonique. La Serbie quant
à elle voyait sa population augmenter de 1.2 millions d'habitants
grâce à ses acquisitions en Macédoine avec toute
la vallée du Vardar ainsi que Monastir [29],
tandis qu'elle occupait une partie du Sandjak de Novi-Pazar, qu'elle
partageait avec le Monténégro qui lui était obligé
d'évacuer sa capitale médiévale, Scutari qui
était allouée au nouvel état albanais [30].
La Roumanie, la dernière arrivée dans ce dépeçage,
recevait en compensation la Dobroudja du Sud.
Victorieuses
sur le papier et sur les cartes, les Guerres Balkaniques n'en furent
pas moins désastreuses pour les états de la région.
Tous ces états étaient désormais séparés
par des accusations d'atrocités [31]
et des haines réciproques. De nouveaux types d'alliance se
préfiguraient. D'un côté, une Bulgarie irrédentiste
voulant récupérer contre les Serbes, ses Macédoniens,
contre les Grecs, la ville de Salonique et la Thrace tout entière
et enfin contre les Roumains, la Dobroudja du Sud. De l'autre des
peuples qui ne s'aimaient guère; Serbie, Grèce et Roumanie,
devenaient des alliés naturels pour défendre ce nouveau
statu quo. Tandis que la Turquie esquissait un rapprochement avec
la Bulgarie face aux prétentions helléniques dans la
mer Égée.
Cette victoire
des Balkaniques qui avait d'abord surpris les Grands n'en touchait
pas moins à leurs intérêts dans la région.
Ils y trouvaient néanmoins, la possibilité d'esquisser
de nouvelles alliances. Tout d'abord les Centraux [32]
qui avaient subi une défaite diplomatique, voyaient dans la
dislocation de la Ligue Balkanique un moyen de reprendre du terrain.
À cet effet l'Allemagne qui avait perdu de son prestige dans
la défaite des armées turques équipées
par elle renforça sa présence dans l'Empire ottoman
qui lui basculait clairement dans le camp des Empires Centraux pour
faire pièce aux ambitions russes sur les détroits. De
plus ceux-ci trouvaient dans la Bulgarie flouée de sa victoire,
un allié possible pour contrer les appétits de la Serbie
qui risque de devenir le pôle attractif de tous les slaves du
sud, y compris ceux qui habitent l'Empire des Habsbourg [33].
Ce rapprochement austro-bulgare a pourtant une autre conséquence.
En effet, la Roumanie gouvernée par un Hohenzollern [34],
jusqu'ici tournée vers la Triplice se détache de celle-ci,
car il existe maintenant un contentieux territorial entre elle et
la Bulgarie qui est entrée dans la clientèle des Centraux.
Autre point négatif pour la Triplice [35],
la Grèce, dont le nouveau roi Constantin Ier est réputé
germanophile, mais qui ne peut ignorer les contentieux qui l'opposent
à la Bulgarie et à la nouvelle Albanie voulue par l'Autriche
et l'Italie.
Cette dernière
quant à elle se rapproche de la Triple Entente, et ce même
si elle regarde d'un mauvais il tout agrandissement de la Serbie
en direction de l'Adriatique, puisqu'elle est maintenant en conflit
avec la Turquie au sujet des Îles du Dodécanèse
qu'elle continue d'occuper "provisoirement"
le temps de pacifier la Tripolitaine. Pour l'Empire russe, cet épisode
est un demi-échec. Si elle reste toujours la protectrice de
la Serbie et du Monténégro et si elle voit dans la Roumanie
et la Grèce des possibilités de rapprochements futurs,
il n'en reste pas moins que la Ligue Balkanique qu'elle avait contribuée
à mettre en place n'existe plus. Elle perd de son influence
sur la Bulgarie, tandis que le problème des détroits
reste toujours posé, surtout après l'envoi de la mission
allemande de Liman von Sanders [36]
à Constantinople. Tout au plus peut elle compter sur le soutien
de la France qui dans ce conflit a préféré opter
pour les états balkaniques plutôt que de maintenir l'intégrité
territoriale de la Turquie.
Frustrations
chez les Balkaniques, frustrations chez les Grands, principalement
chez les Centraux, cette paix qui est mise en place à Bucarest
paraît bien précaire et annonce les défections
et les alliances futures qu'engendrera la Première Guerre Mondiale.